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Interview de Claude Ecken
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Interview de Claude Ecken

ActuSf : Comment avez-vous découvert la science-fiction ?
Claude Ecken : J'ai découvert la SF très jeune, en lisant Bob Morane. J'avais remarqué que les intrigues SF me plaisaient mieux que les polars. Elles étaient plus étonnantes. De là, j'ai lu des Marabout, essentiellement fantastique (Jean Ray, Erkmann-Chatrian, Seignolle, Owen). Mais j'aimais aussi les BD petit format genre Artima avec de la SF et du fantastique. Puis, vers 14 ans, j'ai lu un Fiction et un Galaxie. Dans le n° de Fiction, il y avait entre autres Dick, Sturgeon et Young. Ce fut le choc. Mon destin était scellé. Je suis devenu un lecteur régulier des deux revues. Comme bien d'autres, je ne pouvais que rêver aux fabuleux titres du CLA qui présentaient les meilleurs titres des auteurs qu'on lisait chaque mois. Jusqu'au jour où J'ai Lu a sorti Clarke, Asimov, van Vogt et consorts en poche.

ActuSf : Y’a-t-il des auteurs ou des livres qui vous ont marqué ?
Claude Ecken : Oui. Mais ils sont trop nombreux pour être cités ici. Je n'aime pas donner un ou deux noms, comme s'ils n'existaient qu'eux dans mon panthéon alors qu'il y a tant de merveilles dans des registres très différents.

ActuSf : Qu’est-ce qui vous plait particulièrement dans ce genre littéraire ? Claude Ecken : S'amuser à réfléchir, observer le monde avec un regard différent, être étonné par des faits extraordinaires pourtant justifiés de façon plausible (la fameuse suspension de l'incrédulité), tirer des logiques jusqu'à leurs ultimes conséquences, même absurdes ou contradictoires, manier des concepts ébouriffants, éprouver un dépaysement total par la magie d'un style, rêver en liberté. Mais surtout réfléchir à l'aide de ce merveilleux prisme déformant qui nous offre des perspectives inédites du monde, du réel, de la société.

ActuSf : Vous souvenez-vous quand vous avez commencé à écrire ? Et ce qui vous a donné envie de continuer et de publier des livres ?
Claude Ecken : J'ai commencé à écrire en même temps que j'apprenais à lire. Il y avait peu de loisirs à la maison, donc j'écrivais les histoires que j'aurais aimé lire. Il s'agissait bien sûr de démarquages de mes lectures. Mais cela constitue un bon apprentissage. J'ai toujours rêvé d'être écrivain, contre vents et marées. Je m'affirmais comme tel à l'âge de neuf ans. Sur la porte de ma chambre, je plaçais un écriteau signalant que l'écrivain travaillait. C'est donc tout naturellement que j'ai proposé des critiques dans des revues, puis des nouvelles, et des romans enfin.

ActuSf : Avec le recul, comment jugez-vous votre premier livre et toute cette période « Fleuve Noir » pendant laquelle vous avez beaucoup publié ?
Claude Ecken : Ce fut une période d'apprentissage. On avait au moins la chance de publier les histoires qu'on imaginait. Mon premier livre, paradoxalement, fut un polar, puisqu'on m'avait dit que la collection Engrenage cherchait des textes. C'était un cri de colère contre la pédophilie, suite à une émission télé montrant le quotidien des enfants de Thaïlande, qui se prostituaient pour nourrir leurs parents, eux-mêmes anciens prostitués. On y montrait des clients français et allemands, bons pères de famille, justifier leur présence avec un vernis de bons sentiments, car ils permettaient à ces familles de vivre. Comment faire prendre conscience de la gravité de leur acte ? Montrer ce qui se passait dans l'intimité de la chambre ? C'est ce que j'ai décidé de dire à travers un récit, situé en France, puisque dans le même temps on parlait de réseaux pédophiles organisant des colonies de vacances à l'intention des enfants défavorisés. Un retraité prenait des photos pour la revente sur le côte ouest des E-U. Il y avait un abbé dans le coup. L'affaire s'est délitée quand on s'est aperçu qu'il y avait des ramifications dans les milieux politiques en France et en Allemagne. En même temps, je réglais mes propres comptes avec les pensionnats religieux où j'ai fait ma scolarité, où il se passait des trucs pas nets. Le résultat a fortement déplu : à vouloir faire toucher du doigt l'horreur, on me taxe de complaisance. Bref, c'est avec un petit scandale que j'entre en scène. Mais je n'avais probablement pas encore le métier nécessaire pour traiter des sujets aussi délicats. Avec le recul, mieux vaut oublier ce défaut de jeunesse. Pour l'anecdote, j'entre au Fleuve en même temps que Michel Pagel qui publie le même mois Demain, au chant du tueur. Le suivant, mon premier SF dans la collection Anticipation, est aussi le premier double de la collection. Je m'étais rendu à Metz pour y rencontrer Pierre Pelot, auteur que j'admirais, et que j'admire toujours. Lequel me présente à Patrick Siry comme un nouvel auteur maison. Siry, alors directeur du Fleuve, et qui ouvrait les portes aux jeunes auteurs, m'a dit qu'il admirait les écrivains et leur imagination féconde. Il me demande sur quoi je travaille actuellement et je lui réponds qu'il me reste un mois pour terminer un roman de science-fiction. Il me conseille de le lui envoyer directement. Et c'est avec surprise que j'apprends, un mois après l'envoi, que La Mémoire totale est acceptée au Fleuve Noir. On a rarement vu acceptation plus rapide.

ActuSf : Vous vous êtes fait discret dans les années 90, pour quelles raisons ? Pourquoi ce « trou » dans votre bibliographie ?
Claude Ecken : J'ai souffert, comme d'autres, du départ de Nicole Hibert. Dans mon cas, elle venait d'accepter un roman en quatre volumes qu'elle me demandait de réduire en trois et un autre en deux volumes. Mais elle n'a jamais eu le temps d'envoyer les contrats, ni l'avance, alors que je ne disposais plus que de mille francs en poche. J'apprends son éviction le jour même de la mort de mon père, ce qui signifie que j'avais d'autres chats à fouetter. Son remplaçant, Philippe Hupp, n'est pas disposé à publier des romans à suite. Il me demande le thème de mon prochain roman, le trouve intéressant. Mais je suis incapable de le terminer, n'aillant plus un sou vaillant. Mes collègues ont assuré des traductions ou ont fait le nègre pour des plumes plus réputées. D'autres ont disparu de la scène. Pour ma part, j'ai trouvé un boulot de manœuvre dans une sablière, puis de conseiller pour jeunes dans une Mission Locale. Je donne également de mon temps aux plus défavorisés, devenant même président d'une association de lutte contre la délinquance, noble bénévolat s'il en est, mais qui ne me laisse guère le loisir d'écrire. De là, j'ai cependant développé l'animation d'ateliers d'écriture et progressivement reconquis mon indépendance pour redevenir auteur à part entière.

ActuSf : Comment s’est fait votre « retour » ? Et comment cela s’est-il passé ?
Claude Ecken : Il n'était plus question de placer tous mes oeufs dans le même panier. Je tente donc une diversification de mes écrits et publie, dans ces années 90, deux romans pour la jeunesse, une BD et un roman SF dans la collection Macno chez Baleine. Le problème est un défaut de visibilité : l'auteur jeunesse est inconnu du lecteur BD qui est ignoré du lecteur SF (et même Macno, au sein du lectorat SF)... Je laisse de côté le roman jeunesse, malgré trois manuscrits dans mes tiroirs. Denis Guiot en sait quelque chose, qui m'en a fait retravailler deux qu'il essayait d'imposer chez Hachette, avant d'aller créer la collection Autres Mondes avec le succès que l'on sait. Mais je poursuis l'aventure BD, un milieu dans lequel je me sens bien, puisque j'ai toujours voulu écrire des scénarios en même temps que des romans. Pas mal de projets sont en cours de réalisation. En même temps, avec la fin de cette période, quelque chose s'est cassé en moi. Mon écriture est devenue plus lente, hésitante. Je me demande si je suis encore à la hauteur. Je ne parviens pas à faire publier mes anciens manuscrits. Normal, le paysage éditorial a changé. Je m'aperçois surtout que je suis redevenu un parfait inconnu qui a besoin de (re)faire ses preuves, les directeurs de collection n'accordant pas de crédit à mes propositions de roman sous forme de synopsis, comme s'ils émanaient d'un débutant (pas tous les éditeurs, quand même). Bref, je doute de moi. Je n'ai pas le choix, je repars à zéro en publiant des nouvelles dans des revues et des anthologies. Pas tout à fait de zéro non plus puisque je n'ai jamais cessé de publier des critiques dans divers supports et que je ne suis pas totalement un inconnu pour les fans de l'époque.

ActuSf : En parallèle à votre métier d’écrivain, vous avez toujours été critique littéraire. Cela vous a-t-il apporté quelque chose dans votre écriture ? C’est un vrai plus ? Et si oui quoi ?
Claude Ecken : Critiquer un livre empêche de se comporter en consommateur stupide, qui ouvre un livre sitôt le précédent terminé, sans réfléchir à ce qu'il vient de lire. Cela impose une lecture plus attentive. On se rend compte qu'un livre qu'on a apprécié ne dégage aucune originalité, ni sur le plan de l'originalité du scénario, ni sur celui de l'écriture. Il est plaisant, sans plus, et totalement interchangeable avec un autre du même acabit. J'aime le livre qui me titille les neurones et ai donc tendance à récuser les récits purement distractifs. Je suis contre les constructions purement intellectuelles, qui oublient l'intrigue de base. Avant d'écrire au second ou au énième degré, il faut avant tout respecter l'histoire, donc des paliers. Le lecteur grimpera les marches jusqu'à la hauteur qui lui convient. Le meilleur exemple de cette démarche est Astérix qui s'adresse aussi bien aux enfants qu'aux adultes : la finesse de certains jeux de mots n'empêche pas à ceux qui ne les appréhendent pas d'apprécier l'intrigue de base. Avec le temps, on se rend compte aussi que telle nouveauté portée au pinacle n'est qu'une resucée, réactualisée, d'idées traitées depuis longtemps. Le lecteur de la nouvelle génération n'y voit que du feu car il n'a jamais lu les versions originales. Il faut donc en tenir compte dans une critique. Je ne sais pas si cela m'a apporté quelque chose dans mon écriture. Il n'est pas nécessaire d'être critique pour éprouver de la fascination à la lecture d'un roman qui vous inspire, sinon par le thème, du moins par le désir de faire aussi bien, ou qui vous permet de pointer les défauts qu'il ne faut pas répéter. Mais comme je ne saurais reprendre une idée qui ne me paraît pas originale, avoir beaucoup lu m'empêche de puiser dans un fond commun. Mais je trouve également cette limitation extrêmement stimulante.

ActuSf : Evoquons Enfer clos. Comment est né ce livre coup de poing ? Qu’aviez-vous envie de faire ?
Claude Ecken : Je m'explique déjà assez longuement sur Mauvais genres à ce propos. J'ai été fasciné par la lecture d'un fait divers qui m'a poussé à me demander comment on pouvait vivre dans de telles conditions. Une telle descente aux enfers méritait réflexion. Pour y parvenir, j'ai reconstruit mentalement cet enfermement, sans chercher à me documenter pour ne pas m'y enfermer ni entraver mon imaginaire. Mettre en scène est souvent la meilleure façon de comprendre un phénomène ; c'est la fameuse expérience de pensée, c'est aussi ce que fait la science-fiction en imaginant, à partir d'un matériau "objectif" (des données scientifiques ou sociologiques), un récit permettant d'en mesurer la portée ou l'intérêt, en tout cas de mener une réflexion. Voilà pour l'intention. Je ne suis pas sûr d'avoir trouvé une réponse satisfaisante. Il m'a été difficile en tout cas, voire impossible, de me glisser dans la tête des personnages, à partir du moment où ils basculent dans la folie. C'est pourquoi je me suis livré à une description clinique, assez froide et distanciée, des événements, laquelle ajoute encore à l'horreur. Une chose que j'ai pu exprimer, cependant, c'est que l'enfer, ce n'est pas les autres. Du moins quand ces autres sont en nombre suffisant. L'homme est un animal social qui a besoin de ses semblables pour se former, se forger une identité. On sait ce qu'il advient des enfants sauvages. Comme chez Sartre, mes personnages se torturent sans fin, mais c'est bien parce qu'ils sont isolés des autres, sans ouverture sur l'extérieur pour se ressourcer, et non pas parce que l'autre est source de conflit. Communiquons donc les uns avec les autres de façon la plus large possible !

ActuSf : Quelles ont été les réactions après sa publication ?
Claude Ecken : Un accueil critique assez mitigé, dû à la noirceur et la violence du roman, tout en lui reconnaissant un certain impact et une force de narration. En tout cas, je n'ai jamais lu de critique entièrement négative. Il revenait souvent qu'on en sortait assommé, ce qui est le cas : j'ai ressenti la même chose en relisant les épreuves, ayant eu le temps de l'oublier depuis. Dans le privé, beaucoup de lecteurs m'ont dit avoir apprécié ce livre malgré sa dureté. D'autres m'ont aussi assuré avoir refusé de le lire. Olivier Girard a également des retours favorables : soit on aime ce roman, soit on le déteste, mais on ne reste pas indifférent.

ActuSf : Le livre suivant est votre tout dernier recueil aux éditions du Bélial : Le Monde tous droits réservés. Comment est née l’idée de rassembler vos nouvelles pour en faire un livre ?
Claude Ecken : Faut-il avoir une illumination pour songer à rassembler des nouvelles en recueil ? Il me semble qu'après un certain laps de temps, il est naturel de vouloir rassembler dans un volume des textes éparpillés dans des supports éphémères et variés. Je ne sais plus qui a proposé le premier ce recueil : Gilles Dumay, Olivier Girard, Roland Wagner ? Je me souviens d'autant moins qu'il est depuis longtemps en chantier (1998, je crois) et qu'il s'est régulièrement étoffé de certains de mes textes parus entre-temps (d'autres ayant été retirés). Je ne pense pas l'avoir proposé moi-même, ce n'est pas dans mes habitudes d'aller tirer les gens par la manche.

ActuSf : Comment avez-vous sélectionné les textes qui sont au sommaire ?
Claude Ecken :Je n'ai pas effectué la sélection moi-même. Roland s'en est occupé.

ActuSf : On y trouve beaucoup de choses et notamment un certain goût pour la politique fiction. C’est un genre que vous appréciez ? Vous suivez l’actualité avec un oeil critique ?
Claude Ecken : Je ne pense pas avoir un goût prononcé pour la politique-fiction et je ne pense pas que ça en soit. Ayerdhal, de ce point de vue, est nettement plus politique dans ses intrigues, et aussi plus engagé. Mais quand on parle de sociétés futures, il est impossible de faire l'impasse sur le politique (et non pas la politique). Tout choix de société implique une décision politique à la base. Je suis obligé d'en tenir compte, même si je ne fais pas obligatoirement la critique d'un système. Arrêtons nous un instant sur la nouvelle du Monde, tous droits réservés. Est-ce de la politique fiction ? Nous avons une intrigue polar, à savoir un trafic d'organes via une clinique. Je lie cette intrigue à mon sujet premier, portant sur le journalisme. Le fait que le maire soit propriétaire de la clinique ne change pas grand chose au récit, mais permet d'expliquer pourquoi il a décidé de mener la guerre aux laissés-pour-compte qui encombrent sa ville. Dans La Dernière Mort d'Alexis Wiejack, l'accroissement de la longévité amène également une décision politique. Ici non plus, le discours n'est pas politique : je ne fais que présenter le cadre de ma société future, sans m'attarder sur les raisons qui la motivent. Celles-ci sont essentiellement économiques et ne découlent pas d'une politique précise. En France, compte-tenu du déficit de la Sécurité Sociale, on peut se demander si celui-ci ne détermine pas les choix en matière de soins, voire freinerait la recherche médicale. On peut imaginer que tout labo travaillant sur un médicament miracle se verrait supprimer ses subventions car il coûterait cher à la société. Voilà une idée qui mériterait un développement sous forme de nouvelle. S'agit-il pour autant de politique-fiction ? Non, le propos, pour moi, est davantage sociologique. Je me moque de savoir si la politique aboutissant à cette décision est de droite ou de gauche : elle est, et en observateur de la société, j'analyse les comportements et les réactions qui en découlent. Dans Eclats lumineux du disque d'accrétion, les positions droite-gauche sont plus évidentes ; mais une fois de plus, ma réflexion porte davantage sur une société bien forcée d'assister d'une façon ou d'une autre les exclus qu'elle génère que sur les luttes de pouvoir entre les partis en place. Je ne peux pas ignorer la dimension politique, mais je ne me focalise pas dessus. Mon analyse est nettement plus globale. Et puis, j'ai assez fréquenté les politiques du temps de mon bénévolat associatif (ce sont les associations qui, souvent, font bouger les choses en faisant pression sur les politiques... qui se contentent de récupérer en leur nom les avancées sociales) pour ne plus me faire d'illusions à leur sujet et ne pas avoir envie de m'étendre sur leurs luttes intestines, pour un pouvoir qui flatte leur égo ou leurs intérêts, sauf si cet aspect peut servir une de mes intrigues. Le sujet, au départ, sera forcément ailleurs.

ActuSf : On sent aussi que vous appréciez les sciences et l’astrophysique. Est-ce vrai ? Et qu’est-ce qui vous passionne dedans ?
Claude Ecken : Ben, le fait que ça parle de sciences et d'astrophysique, justement. Plus sérieusement, c'est le ferment de la SF, non ? Je renvoie à la définition de Sturgeon : "Une histoire de science-fiction est une histoire construite autour d'êtres humains, avec un problème humain et une solution humaine, et qui n'aurait pu se produire sans son contexte scientifique." Le contexte peut ressortir des sciences dures ou des sciences humaines, peu importe. L'essentiel est là. Je partage cette définition de la science-fiction. Ecrire de la SF suppose qu'on s'intéresse à ce qui nous entoure. Et aux sciences en particulier, puisque c'est grâce à elle que l'on avance dans la connaissance de l'univers, qu'on invente et qu'on innove également, de façon positive ou négative. Si l'écrivain est un témoin de son temps, je crois qu'il devrait davantage intégrer dans ses récits les questions liées au clonage, aux OGM, à la biologie en général, à l'informatique et aux réalités virtuelles, aux nanotechnologies, mais aussi à l'écologie, aux menaces qui pèsent sur la planète et sur le vivant. Ceci dit, je ne suis pas un scientifique, loin de là ; mes connaissances dans le domaine sont plus que limitées. C'est peut-être un atout qui me permet d'imaginer des récits là où beaucoup de scientifiques n'oseraient pas s'aventurer car ils connaissent la complexité du problème. Mais je lis beaucoup de vulgarisations scientifiques et, à partir d'elles, j'imagine quel type de société peut en résulter. Ce qui m'intéresse est l'impact social des nouvelles technologies, de même que les choix de sociétés, modifiant le comportement des gens. Je suis donc une vraie éponge qui se gorge du monde environnant pour en faire le substrat de mes fictions. L'astrophysique m'intéresse pour les vertiges spéculatifs qu'elle procure. Elle questionne le mystère de nos origines, de la naissance de l'univers ou du commencement de la vie. La physique quantique et la biologie me titillent tout autant, de même que l'informatique et les réalités virtuelles, l'intelligence et le fonctionnement du cerveau, le langage et bien d'autres sujets. Il suffit que ceux-ci m'étonnent et me fassent entrevoir des futurs possibles.

ActuSf : Comment pourriez-vous présenter ce recueil à ceux qui ne l’ont pas lu ? Le meilleur de Claude Ecken ? :-)
Claude Ecken : Allez-y, c'est de la SF !

ActuSf : Une nouvelle détonne dans l’ensemble du recueil, c’est En sa tour, Annabelle parce qu’elle ne parle ni de science, ni finalement du futur. Pourquoi l’avoir choisie et quelle est sa genèse ?
Claude Ecken : Je suppose que Roland l'a choisie pour montrer que je pouvais également m'exprimer hors de la SF. Il avait aussi sélectionné une nouvelle fantastique, pour les mêmes raisons, mais elle ne cadrait pas avec l'ensemble et a donc été retirée. En sa tour, Annabelle a été écrit pour participer à un concours de nouvelles sur le thème de la folie. Elle a obtenu le prix de la ville de Castres. Je ne sais plus comment m'est venue l'idée, je me souviens juste que le fait de présenter une personne dont les propos sont incompréhensibles me plaisait bien. Avec le temps, je me rends compte qu'il s'agit d'une profession de foi. Mes parents considéraient mes lectures d'un mauvais oeil. Trop irréelles et stupides, autrement dit complètement folles. J'ai souvent poursuivi ces lectures en cachette, comme le narrateur de la nouvelle qui écoute sa sœur la nuit, quand ses parents dorment. Annabelle pourrait être une métaphore de la SF, de même que la nouvelle Le Monde, tous droits réservés définit la SF ou la fiction de façon plus générale : une manière de décrypter le réel par le biais de l'imaginaire, à partir du moment où le simple discours porté sur lui est faussé.

ActuSf : Quels sont désormais les projets sur lesquels vous travaillez ?
Claude Ecken : En octobre paraîtra un roman fantastique aux éditions Nestiveqnen, écrit il y a déjà quelques années. J'entame actuellement une série SF en BD avec Benoît Lacou, avec qui j'ai réalisé les trois tomes du Diable au port. Cette série historique est pour l'instant en sommeil. J'ai aussi un autre projet BD avec Cédric Debard, un polar en un album. J'ai quelques nouvelles en chantier. Mais quelques unes attendront que je vienne à bout d'un roman SF que je traîne depuis quelques temps déjà. C'est un gros morceau mais j'espère bien en venir à bout. Merci pour vos questions.

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