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Interview de François Froideval
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Interview de François Froideval

Actusf : La plupart de vos œuvres relèvent des genres de l'imaginaire. Y êtes-vous particulièrement attaché et pourquoi ?
Froideval : J'ai toujours été un lecteur de fantastique et de science-fiction. Je préfère ça à des romans classiques parce que les situations de la vie quotidienne m'ennuient profondément. Si une histoire se déroule dans notre monde, cela ne m'intéresse pas. Ca passe mieux s'il y a autour un univers fantastique, de fantasy ou de science fiction.

Actusf : C'est pour cela que vous utilisez les genres de l'imaginaire dans vos scénarios…
Froideval : Ce qui m'intéresse, c'est de mettre en scène des univers, d'écrire des situations extrêmes, de donner aux lecteurs des choses qui les décoiffent et qui les dépaysent. Moi j'adore la fantasy, le space-opéra parce que ce sont des terrains fertiles et qu'on y trouve des situations hors normes vraiment intéressantes.

Actusf : Quels sont les auteurs qui vous ont marqué ?
Froideval : Des tas : Verne, Wells, Heinlein, Van Vogt, Asimov, Herbert… Tous les classiques… Y'en a des paquets et des paquets (rires). J'ai des milliers de bouquins à la maison. Ce qui m'intéresse surtout, ce sont les grandes sagas historiques, les vies d'hommes célèbres. Toujours des choses surdimensionnées. Ce qui fait rêver, ce qui dépayse…

Actusf : Et aujourd'hui ?
Froideval : En France j'aime bien ce que font Pierre Bordage, Ayerdhal et Pagel… J'ai plein de copains là dedans, je les connais tous. Et puis il y a toujours de très bonnes choses chez les américains. En BD, j'ai adoré les histoires de Karl Barts, avec Picsou, Donald etc. Evidemment Astérix et Valérian. Là aussi il y en a beaucoup. Mais c'est pareil. J'en ai lu tellement que ça devient dur de dire lesquels sont mes préférés et surtout de n'en citer que quelques-uns. Je sais pas, j'ai dû lire 15 000 bouquins et vu autant de films. Donc aujourd'hui ça commence à faire une masse.

Actusf : Qu'est-ce que vous aimez faire avec vos lecteurs ? La même chose que ce que vous aimez lire ?
Froideval : Ca dépend si c'est une histoire qui vient de moi ou si c'est une histoire que je fais pour l'illustrateur. En général, si je dois travailler avec quelqu'un, j'essaie de voir ce qu'il fait, ce qu'il aime, quel est son trait. Je prends sa palette de couleurs. Et avec tout ça j'essaie de faire une histoire qui lui convient et qui nous plait à tous les deux. Les histoires que j'aime raconter sont différentes à chaque fois. Mens Magna c'est du fantastique. Fatum est un truc un peu mafieux, un peu SF. Les Chroniques de la Lune noire c'est de la pure fantasy. Ce que j'aime, c'est que le lecteur se prenne une vraie claque (avec les cheveux bien plaqués en arrière) en ouvrant une de mes BD…

Actusf : Pourquoi ne pas avoir écrit des nouvelles ou des romans ?
Froideval : En fait, au début, Les Chroniques de la Lune Noire auraient dû être un roman. J'ai commencé à écrire ça quand j'étais aux Etats-Unis en 1982. J'avais écris les deux premiers chapitres lorsqu'à cause d'une erreur de manip j'ai écrasé les fichiers. Plus moyen de les récupérer. J'étais tellement énervé que j'ai laissé tomber pour me consacrer au jeux de rôle. Et puis en rentrant en France, on m'a présenté Ledroit. Comme son dessin était clairement un dessin de fantasy, je lui ai proposé mon histoire pour en faire un scénario. Et c'est comme ça qu'au lieu d'être un roman, Les Chroniques de la Lune Noire sont devenues une BD.

Actusf : Et après vous ne vous êtes pas remis à la nouvelle ou au roman ?
Froideval : Je pourrais. Ca me travaille de temps en temps. C'est clair que c'est quelque chose qui m'intéresse comme, pourquoi pas, de réaliser un film. Mais pour l'instant je n'ai pas ressenti le besoin absolu de me lancer. Ca arrivera peut-être un jour.

Actusf : Pour revenir aux Chroniques de la Lune noire, le onzième tome vient de sortir, 16 ans après la sortie du premier. Quel regard portez-vous sur cette série ?
Froideval : Je ne sais pas. Je n'ai aucune fierté ou prétention sur ce que je fais. J'ai du décalage. Je peux très bien relire une de mes BD comme si ce n'était pas moi qui l'avait écrite. Je ne les renie pas mais il n'y a pas de fierté particulière. J'ai toujours beaucoup de recul par rapport à mes BD. Après, ça plaît, ça ne plaît pas, ce n'est pas mon problème. Je ne fais pas ça pour séduire ou pour emmerder le monde. Je fais seulement ce que j'ai envie de faire. Après si ça fait rêver les gens, si ça les dépayse, tant mieux.

Actusf : Après 11 tomes, où en êtes vous ? Avez-vous encore des choses à dire ?
Froideval : En tous cas, je sais où je veux emmener ma série. Je savais où elle allait avant d'avoir écrit la première phrase. Je pourrais écrire 4 000 ans dessus. Je sais comment va se développer cet univers. Après il y a des choses que tu dois raconter par rapport à ce cycle. Et puis une fois que tu l'as écrit, tu passes à autre chose.

Actusf : Beaucoup de lecteurs suivent Les Chroniques de la Lune Noire et plus généralement vos séries. Vous avez des relations particulières avec eux ?
Froideval : Je les vois finalement assez peu. Je ne dédicace pas beaucoup. Après il y a quelques discussions. Mais ce ne sont jamais des discussions très fouillées. Lorsque tu dédicaces, tu ne vois la personne que 5 ou 10 minutes. C'est pas comme si tu étais autour d'une table pendant des heures.

Actusf : Qu'est-ce qui vous pousse ? Le plaisir de raconter des histoires ?
Froideval : Oui. C'est exactement ça : l'envie de raconter des histoires et d'explorer des univers. C'est  le genre de question qui mériterait des heures pour y répondre. Qu'est-ce qui nous pousse ? J'ai la grande chance de vivre en racontant des histoires. Si ça peut faire rêver les gens c'est formidable. C'est comme quand je travaillais sur le jeux de rôle, on a fait rêver des milliers de gens et c'est très bien. On est tous des grands rêveurs quoi… (rires).

Actusf : Et les projets ? Quels sont-ils maintenant ?
Froideval : Y'a un truc avec le dessinateur de Fatum. Une histoire de science-fiction. Après chez Casterman j'ai une nouvelle série en préparation qui se passe au début 1900 sur une île anglo-normande avec un univers fantastique et onirique, mais avec également des morceaux d'histoires. J'aurais avec moi un dessinateur russe qui est très très doué qui a fait L'Oiseau de feu chez Casterman. Et puis il y a les autres séries que l'on connaît déjà. Methraton, la suite de 666 qui s'appellera 6666 et qui se passe 4000 ans après la fin de la première série. Ce sont des histoires je pourrais raconter pendant des siècles. Y'a pas le dixième de ce que j'ai imaginé qui sera publié. Je n'ai pas d'angoisse de la page blanche (rires)…

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