Actusf : Vous avez fait des études d'ethnologies et d'histoire. Mais vous avez été aussi responsable d'une bédéthèque. Vous pourriez-nous en dire un peu plus sur cette expérience ?
Le Galli : J'étais au lycée et j'ai fait ça avec une bande de copains pendant 14 ans. J'ai commencé en seconde, en 1987, la bédéthèque existait déjà et comportait environ 5 000 albums. C'est une source de découvertes absolument formidable quand on est gamin. Puis, je suis devenu responsable des achats, ce qui m'a permit de sortir encore plus des sentiers battus et de ne plus me cantonner aux ouvrages qui se trouvaient sur les rayonnages. Je suis parti vers des choses qui naissaient comme l'Association. Ca a vraiment été une expérience extraordinaire… J'ai ensuite eu l'idée de monter un festival de BD sans dédicace. Je voulais qu'il puisse seulement offrir ce qu'il y a de mieux au public, c'est à dire des expos, des animations et des ateliers avec des auteurs … Juste pour le plaisir de provoquer une autre sorte de rencontres avec eux.
Actusf : Vous pensiez déjà à faire scénariste à l'époque ?
Le Galli : Non pas du tout. Je me suis longtemps destiné à la recherche universitaire. Ma thèse d'ethnologie portait d'ailleurs sur les auteurs de bande dessinée. Je me suis positionné en tant que scénariste en essayant de faire de l'observation par séquence, c'est à dire d'essayer de comprendre comment fonctionnent leurs relations entre eux, celles avec les éditeurs et celles avec les lecteurs. Je voulais donc voir de l'intérieur comment fonctionne le fait d'être auteur de BD. J'ai eu une chance extraordinaire car je faisais partie du comité d'organisation de Quai des Bulles, le festival de St Malo. Cela m'a permit de rencontrer Dieter. Il m'a proposé de venir passer quelques temps chez lui pour approfondir mon travail. Il m'a en quelques sortes mit le pied à l'étrier et m'a permit de me rendre compte que scénariste était une fonction qui me convenait très bien… Parallèlement mon goût pour l'université déclinait. Les cours que j'y donnais me plaisaient de moins en moins et j'ai dérivé vers le métier de scénariste en un an.
Actusf : Comment s'est passée la rencontre avec Michalak ?
Le Galli : C'est une copine que j'ai rencontré au festival de St Malo qui nous a présenté. Je lui ai dit que je cherchais un dessinateur pour un projet de polar psychologique, presque un hommage à François Truffaut. Elle, à ce moment là, travaillait avec un dessinateur dont le style ne lui convenait pas mais qui aurait pu selon elle répondre à mes attentes. On s'est rencontré et on a très vite commencé à bosser sur ce projet. On a ensuite eu quelques déboires avec l'éditeur. On a proposé notre travail à droite et à gauche. Delcourt nous a dit que le côté " polar psychologique " ne leur convenait pas mais que l'histoire pourrait rentrer dans le cadre de la collection Machination. On a donc retravaillé le projet, on la représenté et il a été accepté.
Actusf : Qu'aviez-vous envie de faire au départ ? Un polar psychologique mêlé de fantastique ?
Le Galli : Il fallait qu'on respecte le cahier des charges de la collection puisque c'est sur elle que le projet a été retravaillé. Le côté fantastique avait donc été développé, mais également la psychologie du personnage principal. Elle va d'ailleurs prendre énormément d'ampleur dans la suite de l'histoire. On va suivre de près le parcours d'Edgar dans les prochains épisodes. Sur le premier tome il apparaît comme un personnage très monolithique et sûr de lui. Les fissures vont pourtant apparaître au fur et à mesure, et il va bientôt se montrer sous un jour beaucoup plus incertain. Il va lui arriver plein de choses et l'adversité va lui apprendre à se découvrir lui-même. Autour de lui, nous avons posé d'autres protagonistes et événements divers qui vont venir se croiser. Certains des événements posés au tome 1 ne prendront leur sens qu'aux tomes 2 ou 3 pour forcer Edgar à se révéler lui-même.
Actusf : Au début c'était un flic très classique…
Le Galli : Tout à fait. Même dans la structure du tome 1, on voulait placer un flic dans son boulot classique. Tous les éléments ont été posés : l'interrogatoire, la conférence de presse, la descente et puis on l'a fait rentrer chez lui en passant par une planche sans parole. Et à partir de là on bascule : plus rien ne sera plus pareil dans sa vie.
Actusf : C'est vrai qu'au début, les décors, les vêtements et les ambiances font penser à un film américain et on dérive petit à petit…
Le Galli : Il y avait effectivement une volonté d'emmener le lecteur du classicisme vers l'inconnu. C'est plus facile à appréhender quand on a d'abord posé les bases d'une histoire classique qui dérive petit à petit.
Actusf : Comment s'est passé le travail avec Michalak ?
Le Galli : Je lui ai d'abord fourni un synopsis. Ensuite chaque scène a été dialoguée et j'ai ensuite complètement structuré l'album. Je savais par exemple que chaque scène devait se terminer en bas page… Ensuite je lui ai envoyé un découpage par scène, puis les différents cadrages et découpes. Lui m'envoyait ensuite un story-board. A partir de là on a discuté sur ses idées de mise en scène. Il nous arrivait ensuite de revenir sur des dialogues qui avaient déjà été établi. On a vraiment retravaillé la mise en scène.
Actusf : La mise en scène d'accord, mais est-ce que vous discutez également du scénario ?
Le Galli : Tout à fait puisqu'il est mon premier lecteur et donc mon premier critique. On discute souvent de ce qu'il a aimé ou de ce qu'il aurait aimé accentuer.
Actusf : Je voudrais parler un petit peu de l'ambiance générale qui se dégage de la BD. Elle provient essentiellement des couleurs. Est-ce que vous avez donné des indications à Fabrys sur votre manière de voir les choses ?
Le Galli : Je lui ai laissé une bonne marge de liberté. Je sais qu'au moment de la mise en couleurs il a beaucoup dialogué avec Michalak qui avait une idée très précise de la lumière qu'il fallait donner. La démarche de Fabrys était bonne, il ne voulait pas se cantonner à une simple mise en couleurs mais voulait apporter une véritable strate supplémentaire. Il y a des moments où il a permit d'améliorer la narration. Des scènes de malaise ont par exemple été traitées dans les tons vert et rouge : ce n'est absolument pas esthétique mais l'ambiance qui a été installée par le scénario et le dessin y est renforcée par la mise en couleur.
Michalak arrive à ce moment là
Actusf : Et pour vous Mr Michalak, comment a commencé ce projet ?
Michalak : Le projet a commencé avec trois planches. Je présentais plusieurs projets à l'époque et c'est celui-ci, que j'avais le moins travaillé, qui a été accepté. Et là j'ai eu une grosse frayeur parce que je n'avais vraiment rien approfondi, aucun personnage, pratiquement pas de décors, rien… C'était donc un peu dur au début. Un personnage comme Edgar par exemple, j'ai eu l'impression de le bosser en direct et de le faire évoluer jusqu'à la fin.
Le Galli : tu ne me l'avais pas dit ça …
Michalak : non effectivement (rires). En fait je déteste les recherches de personnages. Je ne peux les faire qu'à partir de la mise en scène. C'est en voyant un personnage bouger que je vais savoir s'il va avoir des faussettes, un menton volontaire, etc… Mais bosser dans le vide, je ne sais pas faire.
Actusf : A partir du moment où il y a eu le projet, vous avez fait des recherches, vous saviez ce que vous alliez rendre en dessin ?
Michalak : Je savais que ça allait être un polar réaliste. J'ai donc commencé à être très réaliste mais j'ai vite été confronté à un problème. Je trouvais que mes personnages n'avaient aucune vie, que leurs yeux ne reflétaient absolument rien. Je me suis alors inspiré du Peter Pan de Loisel. Je me suis donc autorisé de légères déformations. Je ne suis pas sûr qu'elles soient visibles pour le lecteur. Ca reste toujours du dessin réaliste mais je me suis libéré du carcan. J'ai ensuite fait des recherches en encrages. Je travaille d'habitude au crayon et suis donc beaucoup plus habitué aux niveaux de gris qu'au noir et blanc. Je suis resté au stylo bille parce que c'est ce qui se rapproche le plus du crayon. J'ai ensuite agrandi le format pour m'adapter à mon outil et enfin arriver à un résultat plus ou moins correct.
Actusf : Vous avez beaucoup travaillé avec le coloriste ?
Michalak : Oui (rires). A la base on a choisi Fabrys pour son beau travail de texture et de lumière et le fait qu'il semblait relativement autonome. On a vu au fil des pages qu'il avait quand même besoin d'aide pour les ambiances. Il n'avait pas l'habitude de travailler les lumières sur un dessin aussi réaliste. Je lui ai donc donné un petit coup de mains à la fin. On lui a aussi demandé de contraster son travail de couleurs ce qu'il a immédiatement fait. Ca n'avait pas été le cas de la précédente personne.
Actusf : Vous aviez donc un coloriste différent au départ ?
Michalak : Oui mais ça n'avait pas convenu au niveau des nuances de valeurs.
Actusf : Vous allez continuer votre collaboration avec Fabrys sur les prochains albums ?
Michalak : Je pense que Fabrys sera totalement autonome sur les prochains albums.
Le Galli : En même temps, on l'a dit, il avait une immense marge de manœuvre et nous a apporté beaucoup au niveau de la création. C'est un auteur à part entière qui nous a énormément apporté, et non un simple " colorieur ".
Actusf : Quel est votre sentiment à la fin de ce premier tome ?
Le Galli : Vivement le tome 2.
Michalak : Je m'attendais à une grosse explosion de joie. En fait j'ai plutôt l'impression aujourd'hui d'avoir posé une première pierre et d'avoir maintenant le mur à construire.
Le Galli : On a eu des bons retours critiques et ça c'est plutôt agréable. C'est quand même un soulagement d'avoir terminé cette partie.
Actusf : Comment l'histoire va évoluer désormais, est-ce que vous pouvez nous donner quelques pistes ?
Le Galli : On va désormais vraiment tourner autour d'Edgar et le mettre face à ses difficultés.
Michalak : Il y a déjà au moins trois histoires qui apparaissent dans le tome 1, qui vont se lier autour d'Edgar dans le tome 2 pour se rejoindre dans le tome 3.
Le Galli : Quelque chose qui n'apparaît pas encore dans le 1 est l'importance de la femme pour Edgar, qui va jouer un rôle fondamental dans l'avenir de la série.
Actusf : Allez-vous faire évoluer le dessin ?
Michalak : Tout à fait, je l'ai conçu dès le début comme un dessin évolutif. Sans non plus provoquer de grandes fractures, le découpage, les personnages et les décors vont quand même évoluer au cours de l'histoire.
Actusf : Etes-vous impatients d'avoir des retours de lecteurs ?
Le Galli : Bien sûr, je pense que c'est important. Au début, mon parcours a fait que je voulais gagner le respect de mes collègues de travail. Mais il est fondamental de savoir si les lecteurs ont pu rentrer dans notre histoire et se laisser gagner par les émotions.
Michalak : Moi je voudrais l'avis du lecteur anonyme. Savoir ce qui va et ce qui ne va pas. J'ai par exemple vu revenir souvent sur Internet une critique sur la grosseur du trait. J'ai besoin de ce genre d'informations pour faire évoluer le tome 2. Je sais déjà que je vais travailler l'encrage et essayer d'affiner mes traits.
Actusf : Dernière question, quels sont vos projets ?
Michalak : Moi je reste sur celui-ci jusqu'à la clôture du tome 5. Ensuite j'ai quelques petits projets qui n'en sont pour l'instant qu'au stade de graine…
Le Galli : Moi j'ai un album qui parait chez Carabas en début de l'année prochaine, il s'agit de quelque chose de très intimiste centré autour d'une jeune fille vivant sur une île exclusivement peuplée de fous, et j'ai aussi pas mal d'autres projets ailleurs.
Le Galli : J'étais au lycée et j'ai fait ça avec une bande de copains pendant 14 ans. J'ai commencé en seconde, en 1987, la bédéthèque existait déjà et comportait environ 5 000 albums. C'est une source de découvertes absolument formidable quand on est gamin. Puis, je suis devenu responsable des achats, ce qui m'a permit de sortir encore plus des sentiers battus et de ne plus me cantonner aux ouvrages qui se trouvaient sur les rayonnages. Je suis parti vers des choses qui naissaient comme l'Association. Ca a vraiment été une expérience extraordinaire… J'ai ensuite eu l'idée de monter un festival de BD sans dédicace. Je voulais qu'il puisse seulement offrir ce qu'il y a de mieux au public, c'est à dire des expos, des animations et des ateliers avec des auteurs … Juste pour le plaisir de provoquer une autre sorte de rencontres avec eux.
Actusf : Vous pensiez déjà à faire scénariste à l'époque ?
Le Galli : Non pas du tout. Je me suis longtemps destiné à la recherche universitaire. Ma thèse d'ethnologie portait d'ailleurs sur les auteurs de bande dessinée. Je me suis positionné en tant que scénariste en essayant de faire de l'observation par séquence, c'est à dire d'essayer de comprendre comment fonctionnent leurs relations entre eux, celles avec les éditeurs et celles avec les lecteurs. Je voulais donc voir de l'intérieur comment fonctionne le fait d'être auteur de BD. J'ai eu une chance extraordinaire car je faisais partie du comité d'organisation de Quai des Bulles, le festival de St Malo. Cela m'a permit de rencontrer Dieter. Il m'a proposé de venir passer quelques temps chez lui pour approfondir mon travail. Il m'a en quelques sortes mit le pied à l'étrier et m'a permit de me rendre compte que scénariste était une fonction qui me convenait très bien… Parallèlement mon goût pour l'université déclinait. Les cours que j'y donnais me plaisaient de moins en moins et j'ai dérivé vers le métier de scénariste en un an.
Actusf : Comment s'est passée la rencontre avec Michalak ?
Le Galli : C'est une copine que j'ai rencontré au festival de St Malo qui nous a présenté. Je lui ai dit que je cherchais un dessinateur pour un projet de polar psychologique, presque un hommage à François Truffaut. Elle, à ce moment là, travaillait avec un dessinateur dont le style ne lui convenait pas mais qui aurait pu selon elle répondre à mes attentes. On s'est rencontré et on a très vite commencé à bosser sur ce projet. On a ensuite eu quelques déboires avec l'éditeur. On a proposé notre travail à droite et à gauche. Delcourt nous a dit que le côté " polar psychologique " ne leur convenait pas mais que l'histoire pourrait rentrer dans le cadre de la collection Machination. On a donc retravaillé le projet, on la représenté et il a été accepté.
Actusf : Qu'aviez-vous envie de faire au départ ? Un polar psychologique mêlé de fantastique ?
Le Galli : Il fallait qu'on respecte le cahier des charges de la collection puisque c'est sur elle que le projet a été retravaillé. Le côté fantastique avait donc été développé, mais également la psychologie du personnage principal. Elle va d'ailleurs prendre énormément d'ampleur dans la suite de l'histoire. On va suivre de près le parcours d'Edgar dans les prochains épisodes. Sur le premier tome il apparaît comme un personnage très monolithique et sûr de lui. Les fissures vont pourtant apparaître au fur et à mesure, et il va bientôt se montrer sous un jour beaucoup plus incertain. Il va lui arriver plein de choses et l'adversité va lui apprendre à se découvrir lui-même. Autour de lui, nous avons posé d'autres protagonistes et événements divers qui vont venir se croiser. Certains des événements posés au tome 1 ne prendront leur sens qu'aux tomes 2 ou 3 pour forcer Edgar à se révéler lui-même.
Actusf : Au début c'était un flic très classique…
Le Galli : Tout à fait. Même dans la structure du tome 1, on voulait placer un flic dans son boulot classique. Tous les éléments ont été posés : l'interrogatoire, la conférence de presse, la descente et puis on l'a fait rentrer chez lui en passant par une planche sans parole. Et à partir de là on bascule : plus rien ne sera plus pareil dans sa vie.
Actusf : C'est vrai qu'au début, les décors, les vêtements et les ambiances font penser à un film américain et on dérive petit à petit…
Le Galli : Il y avait effectivement une volonté d'emmener le lecteur du classicisme vers l'inconnu. C'est plus facile à appréhender quand on a d'abord posé les bases d'une histoire classique qui dérive petit à petit.
Actusf : Comment s'est passé le travail avec Michalak ?
Le Galli : Je lui ai d'abord fourni un synopsis. Ensuite chaque scène a été dialoguée et j'ai ensuite complètement structuré l'album. Je savais par exemple que chaque scène devait se terminer en bas page… Ensuite je lui ai envoyé un découpage par scène, puis les différents cadrages et découpes. Lui m'envoyait ensuite un story-board. A partir de là on a discuté sur ses idées de mise en scène. Il nous arrivait ensuite de revenir sur des dialogues qui avaient déjà été établi. On a vraiment retravaillé la mise en scène.
Actusf : La mise en scène d'accord, mais est-ce que vous discutez également du scénario ?
Le Galli : Tout à fait puisqu'il est mon premier lecteur et donc mon premier critique. On discute souvent de ce qu'il a aimé ou de ce qu'il aurait aimé accentuer.
Actusf : Je voudrais parler un petit peu de l'ambiance générale qui se dégage de la BD. Elle provient essentiellement des couleurs. Est-ce que vous avez donné des indications à Fabrys sur votre manière de voir les choses ?
Le Galli : Je lui ai laissé une bonne marge de liberté. Je sais qu'au moment de la mise en couleurs il a beaucoup dialogué avec Michalak qui avait une idée très précise de la lumière qu'il fallait donner. La démarche de Fabrys était bonne, il ne voulait pas se cantonner à une simple mise en couleurs mais voulait apporter une véritable strate supplémentaire. Il y a des moments où il a permit d'améliorer la narration. Des scènes de malaise ont par exemple été traitées dans les tons vert et rouge : ce n'est absolument pas esthétique mais l'ambiance qui a été installée par le scénario et le dessin y est renforcée par la mise en couleur.
Michalak arrive à ce moment là
Actusf : Et pour vous Mr Michalak, comment a commencé ce projet ?
Michalak : Le projet a commencé avec trois planches. Je présentais plusieurs projets à l'époque et c'est celui-ci, que j'avais le moins travaillé, qui a été accepté. Et là j'ai eu une grosse frayeur parce que je n'avais vraiment rien approfondi, aucun personnage, pratiquement pas de décors, rien… C'était donc un peu dur au début. Un personnage comme Edgar par exemple, j'ai eu l'impression de le bosser en direct et de le faire évoluer jusqu'à la fin.
Le Galli : tu ne me l'avais pas dit ça …
Michalak : non effectivement (rires). En fait je déteste les recherches de personnages. Je ne peux les faire qu'à partir de la mise en scène. C'est en voyant un personnage bouger que je vais savoir s'il va avoir des faussettes, un menton volontaire, etc… Mais bosser dans le vide, je ne sais pas faire.
Actusf : A partir du moment où il y a eu le projet, vous avez fait des recherches, vous saviez ce que vous alliez rendre en dessin ?
Michalak : Je savais que ça allait être un polar réaliste. J'ai donc commencé à être très réaliste mais j'ai vite été confronté à un problème. Je trouvais que mes personnages n'avaient aucune vie, que leurs yeux ne reflétaient absolument rien. Je me suis alors inspiré du Peter Pan de Loisel. Je me suis donc autorisé de légères déformations. Je ne suis pas sûr qu'elles soient visibles pour le lecteur. Ca reste toujours du dessin réaliste mais je me suis libéré du carcan. J'ai ensuite fait des recherches en encrages. Je travaille d'habitude au crayon et suis donc beaucoup plus habitué aux niveaux de gris qu'au noir et blanc. Je suis resté au stylo bille parce que c'est ce qui se rapproche le plus du crayon. J'ai ensuite agrandi le format pour m'adapter à mon outil et enfin arriver à un résultat plus ou moins correct.
Actusf : Vous avez beaucoup travaillé avec le coloriste ?
Michalak : Oui (rires). A la base on a choisi Fabrys pour son beau travail de texture et de lumière et le fait qu'il semblait relativement autonome. On a vu au fil des pages qu'il avait quand même besoin d'aide pour les ambiances. Il n'avait pas l'habitude de travailler les lumières sur un dessin aussi réaliste. Je lui ai donc donné un petit coup de mains à la fin. On lui a aussi demandé de contraster son travail de couleurs ce qu'il a immédiatement fait. Ca n'avait pas été le cas de la précédente personne.
Actusf : Vous aviez donc un coloriste différent au départ ?
Michalak : Oui mais ça n'avait pas convenu au niveau des nuances de valeurs.
Actusf : Vous allez continuer votre collaboration avec Fabrys sur les prochains albums ?
Michalak : Je pense que Fabrys sera totalement autonome sur les prochains albums.
Le Galli : En même temps, on l'a dit, il avait une immense marge de manœuvre et nous a apporté beaucoup au niveau de la création. C'est un auteur à part entière qui nous a énormément apporté, et non un simple " colorieur ".
Actusf : Quel est votre sentiment à la fin de ce premier tome ?
Le Galli : Vivement le tome 2.
Michalak : Je m'attendais à une grosse explosion de joie. En fait j'ai plutôt l'impression aujourd'hui d'avoir posé une première pierre et d'avoir maintenant le mur à construire.
Le Galli : On a eu des bons retours critiques et ça c'est plutôt agréable. C'est quand même un soulagement d'avoir terminé cette partie.
Actusf : Comment l'histoire va évoluer désormais, est-ce que vous pouvez nous donner quelques pistes ?
Le Galli : On va désormais vraiment tourner autour d'Edgar et le mettre face à ses difficultés.
Michalak : Il y a déjà au moins trois histoires qui apparaissent dans le tome 1, qui vont se lier autour d'Edgar dans le tome 2 pour se rejoindre dans le tome 3.
Le Galli : Quelque chose qui n'apparaît pas encore dans le 1 est l'importance de la femme pour Edgar, qui va jouer un rôle fondamental dans l'avenir de la série.
Actusf : Allez-vous faire évoluer le dessin ?
Michalak : Tout à fait, je l'ai conçu dès le début comme un dessin évolutif. Sans non plus provoquer de grandes fractures, le découpage, les personnages et les décors vont quand même évoluer au cours de l'histoire.
Actusf : Etes-vous impatients d'avoir des retours de lecteurs ?
Le Galli : Bien sûr, je pense que c'est important. Au début, mon parcours a fait que je voulais gagner le respect de mes collègues de travail. Mais il est fondamental de savoir si les lecteurs ont pu rentrer dans notre histoire et se laisser gagner par les émotions.
Michalak : Moi je voudrais l'avis du lecteur anonyme. Savoir ce qui va et ce qui ne va pas. J'ai par exemple vu revenir souvent sur Internet une critique sur la grosseur du trait. J'ai besoin de ce genre d'informations pour faire évoluer le tome 2. Je sais déjà que je vais travailler l'encrage et essayer d'affiner mes traits.
Actusf : Dernière question, quels sont vos projets ?
Michalak : Moi je reste sur celui-ci jusqu'à la clôture du tome 5. Ensuite j'ai quelques petits projets qui n'en sont pour l'instant qu'au stade de graine…
Le Galli : Moi j'ai un album qui parait chez Carabas en début de l'année prochaine, il s'agit de quelque chose de très intimiste centré autour d'une jeune fille vivant sur une île exclusivement peuplée de fous, et j'ai aussi pas mal d'autres projets ailleurs.