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Interview de Séverine Pineaux
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Interview de Séverine Pineaux

Actusf : J'imagine que le dessin est une passion depuis l'enfance. Y'a-t-il des illustrateurs ou des images qui vous ont particulièrement marqués dans votre jeunesse ?
Séverine Pineaux : Effectivement, j'ai décidé de devenir dessinatrice à 6 ans après avoir vu la photo d'une jeune dame blonde qui gouachait un dessin de La belle au bois dormant dans Le journal de Mickey... Ce qui est surprenant, c'est que cette vocation ait survécu à ma septième année, même si je ne suis jamais devenue blonde... Sinon, j'ai beaucoup regardé pendant mon enfance les peintres classiques, gothique, rennaissance jusqu'au romantiques du 19 ème siècle, dans les livres d'art de mes parents et plus tard, ado/jeune adulte, ce sont les dessinateurs du défunt journal de BD Métal Hurlant comme Moebius, Druillet, Caza, ( j'ai aussi découvert Giger dans ce journal...) qui ont rempli mon imaginaire...

Actusf : Quel a été votre parcours avant de devenir illustratrice ? Avez-vous fait une école ou avez pratiqué le dessin en loisir ?
Séverine Pineaux : J'ai fait un atelier à Paris après le bac, ou j'ai appris des bases techniques et j'ai ensuite passé une licence d'arts plastiques à Paris VIII ou j'ai eu un très bon cours en BD et un autre très formateur en peinture à l'huile, avec un peintre du nouveau réalisme. Parrallèlement, je travaillais avec deux copains à un projet de dessin animé (... influence persistante du Journal de Mickey ?). Notre idée était de faire du Tex Avery à la sauce punk rock.... C'était avant le dévellopement de l'informatique à la maison, tout était fait à la main et ça m'a fait travailler le dessin dans tout les sens, décors, personnages, mouvements etc. A la suite de ça, nous avons créé une petite socièté de communication ou j'ai continué à faire un peu de tout dans le domaine du graphisme...

Actusf : A quel moment vous-êtes vous dit que vous vouliez faire du dessin votre métier ?
Séverine Pineaux : Je n'ai jamais vraiment envisagé un autre métier, mais l'illustration et la peinture proprement dites me sont venues de mon goût pour le fantastique et la sf qui m'ont amenée à démarcher les éditeurs des livres que je lisais et à faire mes premières couvertures.

Actusf : Quelle a été votre première commande et comment cela s'est-il passé ?
Séverine Pineaux : Ma première commande est en fait liée au projet de dessin animé de mes années de fac. Nous avions rencontré un éditeur que cette histoire avait intérressé et qui nous a financé deux ans, nous permettant de réaliser un pilote et un petit album de BD accompagnant le projet. Le dévelloppement ultérieur, en particullier vers la télé n'a pas suivi, et je me rend mieux compte maintenant que nous étions beaucoup trop jeunes et inexpérimentés pour aller beaucoup plus loin, mais ça nous a fait démarrer, nous a donné confiance en nous et nous a permis de continuer.

Actusf : Parlez nous un peu de votre style "sylvestre". Comment vous êtes vous orienté vers ce style ?
Séverine Pineaux : En fait, à 15 ans, je faisais un peu de peinture à l'huile et mes quelques tableaux les plus aboutis traitaient de ce thème de l'homme-arbre, j'ai ensuite cessé de peindre pendant pas mal de temps, penchant plutôt vers la bd et plus tard, l'illustration. Quand j'ai quitté ma petite société de communication pour devenir illustratrice indépendante, l'envie de peinture est revenue, et, après la naissance de mon premier enfant j'ai repris les toiles et l'huile. En cherchant quel thème traiter, ce sont ces hommes-arbres, sur lesquels j'avais arrété la peinture qui se sont imposés. Puis, j'ai trouvé de nombreux dévelloppements autour de ces sylphes, qui me permettent de representer des sentiments, des liens entre les gens, d'évoquer toutes sortes de choses sans que la symbolique ne soit trop claire, et donc, gardant un mystère que j'apprécie en peinture...

Actusf : Comment travaillez vous ? Quelles techniques appréciez vous ?
Séverine Pineaux : Pour l'illustration, je mélange pas mal de choses, acryliques, crayon de couleur, aquarelles et aussi infographie, le tout sur papier. En peinture, j'ai un travail assez traditionnel, j'ébauche de façon poussée mon tableau à l'acrylique et je le termine à l'huile en finissant par des glacis ( couhes semi -transparentes sur fond plus opaque) J'ai une idée de ce que je veux faire et je cherche de la documentation qui soutiendra mon dessin, puis je fais des esquisses successives, je me gratte la tête, je jette un certain nombre de ratés et quand je pense tenir le bon dessin, je me lance dans la réalisation. S'il s'agit d'une commande, je propose plusieurs esquisses et finalise celle qui est retenue, (Si aucune n'est retenue, je me suicide et je recommence)

Nous :
Parlons un peu de l'inspiration. Quels sont vos principales sources ? La nature j'imagine et aussi la mythologie non ?
Séverine Pineaux : La nature est une inspiration visuelle, couleur, formes, texture..., la mythologie fonctionne plutôt en aller-retour, un tableau que j'ai peint me rappelle un mythe (comme Daphné changée en laurier, ou Philémon et Baucis couple à jamais enlacé sous forme d'arbre) et ce mythe suciste en moi des images qui donneront lieu à de nouveaux tableaux.. Sinon, je fonctionne plutôt par images, et tout ça reste assez instinctif. Le décodage , si il y a lieu, intervient après...

Actusf : Lorsque vous peignez, pensez-vous déjà au regard du public, et si oui, qu'avez-vous envie par rapport à lui ? De susciter de l'émotion ?
Séverine Pineaux : A part l'envie enfantine d'épater la galerie par la virtuosité de mon travail (... et c'est pas gagné...), je ne pense pas à un éventuel public quand je peint, ça vient une fois le tableau terminé avec un certain trac...

Actusf : Quelles sont d'ailleurs vos relations avec ce public ? Y'a-t-il des réactions qui vous ont touché, ou surprise ?
Séverine Pineaux : Les reactions que j'ai pu avoir m'ont toujours surprise et toujours fait plaisir, je suis ravie quand les autres s'approprient mes images et y mettent leurs émotions et leurs histoires, c'est pour ça que je les peints...

Actusf : Vous oeuvrez pas mal pour les genres de l'imaginaire (fantasy, fantastique, science-fiction). Est-ce le hasard ou êtes vous une amatrice de ce genre de littérature ?
Séverine Pineaux : Je lis beaucoup de sf, de fantasy et de fantastique et mon imagination fonctionne comme ça. Si je peignais une nature morte, je ne pourrais pas m'empêcher d'y glisser quelque chose de pas naturel...

Actusf : Y'a-t-il une toile ou un travail dont vous êtes particulièrement fier ? Et pourquoi ?
Séverine Pineaux : Le meilleur tableau, c'est toujours celui qu'on a dans la tête et qu'on n'a pas encore peint. Certains tableaux vieillissent mieux que d'autres, c'est souvent dans la durée qu'on fait vraiment le tri...

Actusf : Et la grande question ! Et pourquoi pas de la bande dessinée ?
Séverine Pineaux : Pour l'instant, j'ai trop envie de travailler en profondeur chaque image, pour me lancer dans la BD dont les impératifs sont différents... Mais cette envie peut changer dans l'avenir, je n'ai pas d'apriori dans ce domaine...

Actusf : Avec le recul, quel regard portez-vous sur le monde de l'illustration ? Est-ce difficile aujourd'hui de faire ce métier ?
Séverine Pineaux : L'illustration, hors le pré carré de l'illustration jeunesse, est assez peu reconnue, par rapport, par exemple, à la bande dessinée, mais il y a de nombreux illustrateurs de grand talent en France et un public qui apprécie vraiment leur travail, on peut donc espèrer que les choses évolueront... Mais pour en vivre correctement, un illustrateur doit se diversifier à l'heure actuelle, et ça reste un métier passionnant mais aléatoire.

Actusf : Quels sont vos projets et vos envies ? Parlez nous un peu de ce livre "steam punk celtique" sur lequel vous travaillez ? Qu'y trouvera-t-on ?
Séverine Pineaux : Je travaille actuellement sur un livre Ysambre à paraitre aux éditions Semic - La Mascarade et qui va dévellopper l'univers des Hommes-arbres... Ce projet vient d'une rencontre avec Michaêl Ivorra, co-fondateur de l'association "Chasseurs de Rêves" et concepteur du art-book collectif Terra Incognita, Michaêl a inventé un univers qui explique l'existence de mes personnages -arbres et nous avons conçu un livre qui est à la fois un beau livre d'image et un voyage à travers différentes aventures, vécues à des époques différentes par plusieurs personnages qui permettront au lecteur de découvrir cet univers d'inspiration celtique, et d'en comprendre les secrets...
C'est l'inverse de l'illustration traditionnelle, les images ont suscité l'histoire et l'histoire ,à son tour, m'a fait créer de nouvelles images... et sinon, je l'espère, beaucoup de tableaux et d'expositions, comme à Damparris en novembre 2004 et à Arlon, en Belgique, en avril 2005...

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