Actusf : Quand avez-vous commencé à écrire ? Qu’est-ce qui vous a donné envie ?
Glen Duncan : J'ai toujours mis plus d'énergie (et reçu plus de récompenses) en « écriture créative » même quand j'étais élève en école primaire, vers sept ou huit ans. Mais à 15 ans, j'ai lu le roman de John Irving, Le Monde selon Garp. Il a changé ma vie. Ou plutôt, il a confirmé ce que je suspectais depuis longtemps : la seule chose que je voulais être dans la vie était écrivain. En partie parce que je voulais écrire quelque chose qui affecterait les autres comme ce livre m'avait affecté – me laissant avec un mélange d'euphorie, de mélancolie et de rire réconfortant – mais également parce que ce roman décrit la vie d'un romancier : assis chez lui toute la journée, à inventer des histoires à propos de personnages fictifs. Mon idée du paradis !
Actusf : Parlez-nous de Moi, Lucifer. Comment est née l’idée de ce livre ?
Glen Duncan : Une combinaison de pauvreté et de rage. Je venais de passer six ans à écrire un long roman que personne ne voulait publier et il ne me restait plus que £50. J'avais depuis longtemps dans l'idée d'écrire une histoire à propos du Diable traversant la crise de la quarantaine – une sorte d'humour noir cosmique métaphysique (et métafictionnel) – et vu mon état d'esprit à ce moment-là, c'était plutôt un choix naturel. Il a été, de diverses manières, très facile à écrire. (Pas contre, l'amener jusqu'à la publication a été un processus long et difficile).
Actusf : Votre Lucifer est finalement assez humain... Était-ce difficile de se “glisser” dans la peau du Diable ?
Glen Duncan : Pas vraiment. Comme je l'ai dit, à ce moment-là j'étais possédé (sans mauvais jeu de mot) par mes propres échecs, faiblesses, faims et furies. C'était un sentiment très profond... Écrire ce roman m'a permis d'accéder à une nouvelle étape de ma vie beaucoup plus amusante. Il m'a fait beaucoup rire. Les lecteurs aussi, je l'espère.

Glen Duncan : Une combinaison de pauvreté et de rage. Je venais de passer six ans à écrire un long roman que personne ne voulait publier et il ne me restait plus que £50. J'avais depuis longtemps dans l'idée d'écrire une histoire à propos du Diable traversant la crise de la quarantaine – une sorte d'humour noir cosmique métaphysique (et métafictionnel) – et vu mon état d'esprit à ce moment-là, c'était plutôt un choix naturel. Il a été, de diverses manières, très facile à écrire. (Pas contre, l'amener jusqu'à la publication a été un processus long et difficile).
Actusf : Votre Lucifer est finalement assez humain... Était-ce difficile de se “glisser” dans la peau du Diable ?
Glen Duncan : Pas vraiment. Comme je l'ai dit, à ce moment-là j'étais possédé (sans mauvais jeu de mot) par mes propres échecs, faiblesses, faims et furies. C'était un sentiment très profond... Écrire ce roman m'a permis d'accéder à une nouvelle étape de ma vie beaucoup plus amusante. Il m'a fait beaucoup rire. Les lecteurs aussi, je l'espère.
Actusf : Vous en profitez pour égratigner au passage quelques institutions comme l’Église. Vous aviez envie de profiter de ce roman pour faire passer quelques messages ?
Glen Duncan : Eh bien, vous ne pouvez pas écrire un roman sur Lucifer sans, tôt ou tard, tomber sur les crimes historiques et l'hypocrisie de l'Église catholique. Mais le but premier du roman était de revisiter les principaux mystères de l'être humain. Amour, sexe, mort, désir, cruauté, compassion, trahison et pardon. Et, d'une manière toutefois modeste et absurde, de célébrer la vie.
Actusf : Même question pour Le Dernier Loup-Garou. Comment ce roman est-il né ?

Glen Duncan : Au départ il y avait le même manque de succès commercial. J'avais publié sept romans de littérature qui avaient tous eu le même destin : aucun n'avait remporté de prix et mes lecteurs étaient peu nombreux. Je savais que si je voulais continuer ma carrière, je devais trouver une manière d'utiliser mon territoire thématique pour qu'il intéresse une audience bien plus grande. À la base, mon intention était d'écrire un roman sur un serial killer à l'époque victorienne, un genre de « Oliver Twist » rencontrant « Le Silence des agneaux » (ça va en inspirer quelques-uns) mais les recherches étaient un vrai calvaire. Je connais la littérature anglaise du XIXe siècle, les systèmes d'égout de l'époque nettement moins. Et puis, lors du réveillon 2009, un ami m'a demandé ce que « j'espérais accomplir » durant l'année à venir. Résistant à l'envie de lui fracasser une bouteille sur la tête, j'ai dit – sans vraiment de raison, hormis que j'étais bourré et que nous discutions films d'horreur – que j'allais écrire un roman sur le dernier loup-garou survivant. Tout le monde a trouvé ça super. Et c'était toujours une bonne idée quand je me suis réveillé le lendemain matin.
Actusf : Est-ce difficile d’écrire sur un sujet tel que les loups-garous vu le nombre de fois où ils ont été mis en scène au cinéma ou en littérature ? Avez-vous d'ailleurs tenu compte de ses incarnations les plus connues ?
Glen Duncan : L'arrogance ou l'idiotie m'ont amené à croire que mon loup-garou ne serait pas comme ceux que les lecteurs avaient déjà pu rencontrer. Ceci étant dit, je n'ai lu aucun des livres de la série Twilight (si c'est à ça que vous faites référence) ou vu les films donc je ne sais pas vraiment comment les lycanthropes y sont présentés. Mais je suppose que ce n'est pas en tant que milliardaire, fumeur compulsif, amoureux de la littérature, amateur de scotch avec une libido outrancière et un vrai ras-le-bol de la vie ? À peu près au milieu de l'écriture du roman j'ai percuté que l'antécédent officiel du Dernier Loup-Garou était le film Le Loup-garou de Londres. Il possède le même mélange de purs moments de frayeur et de haute comédie, une histoire d'amour crédible et une volonté de prendre au sérieux la psychologie de la condition du personnage – et ses dilemmes moraux. Mais ça a été une prise de conscience tardive. Ma méthode pour écrire à propos des loups-garous est la même que si j'écrivais sur un vendeur de chaussures du Midwest malheureux : se mettre sans réserve à la place du personnage et imaginer fidèlement et scrupuleusement à quoi cela pourrait ressembler.
Actusf : Là aussi, le personnage principal n'est pas franchement un "gentil". Il aime tuer au moins une personne chaque mois. Y'a-t-il dans ces deux romans une volonté de votre part de bousculer le lecteur, de le mettre mal à l'aise ? Tout du moins de repousser certaines limites ?
Glen Duncan : Je ne voulais pas particulièrement mettre les lecteurs mal à l'aise. Simplement les amener à s'interroger sérieusement sur ce qu'ils pourraient faire s'ils étaient à la place de mon personnage. Le Dernier Loup-Garou est un roman d'enquête morale, bien qu'elle soit teintée d'humour noir.
Actusf : Les droits des deux livres ont été vendus au cinéma. Où en sont les projets d'adaptation ?
Glen Duncan : Il n'y a pas grand-chose à en dire pour le moment. Scott Free possède les droits. Il y a un script en développement. Je ne suis pas vraiment impliqué. J'aimerais être aux sessions de casting pour Talulla et Madeline, si c'est possible, mais je ne me fais pas trop d'illusions.
Actusf : Votre dernier livre s'appelle Talulla Rising. De quoi parle-t-il ?
Glen Duncan : Difficile de répondre sans spoilers mais c'est la version féminine (qui fera référence, je l'espère) de l'espèce. C'est un roman de loup-garou qui explore la grossesse, la maternité, la sexualité, le corps... Le tout avec une intrigue au rythme rapide et une voix narrative nouvelle et distincte.
Actusf : Quels sont vos projets ? By Blood We Live est-il terminé ?
Glen Duncan : By Blood We Live (le troisième tome de la trilogie) est terminé et sera publié à la fin de l'année. J'en suis très content. Le prochain roman à venir parle d'un serial killer et avec un un twist surnaturel. J'ai déjà commencé à l'écrire. Quand il sera terminé, j'aimerais des vacances !