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Invisible

Fabrice Colin ( Auteur), Manchu (Illustrateur de couverture)
Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 31/12/2005  -  jeunesse
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Invisible

Il n’est pas un pan d’imaginaire qui résiste à Fabrice Colin. Cet auteur est sans nul doute le plus prolifique et le plus reconnu de la jeune génération qui a fait ses premières armes dans le jeu de rôle. C’est un habitué de la collection Autres Mondes puisqu’il y a déjà publié Les Enfants de la Lune, Projet oXatan, Cyberpan et Le Mensonge du siècle.

Hors contrôle


Pour survivre dans les favelas de Rio, Tiago n’a pas eu d’autre choix que de monnayer ses services auprès du gang d’Angel. Difficile d’échapper à ce système, de s’extraire de ce corps parasite nourri de misère, de violence et de colère, de cet organisme qui s’alimente de combines et de coups. Malgré cette interdépendance entretenue par les chefs de gang,s quand une attaque à main armée d’un fourgon tourne mal, Tiago voit dans le fait de s’en être sorti vivant un signe qu’il doit s’enfuir, se sortir de ce cycle vicié et vicieux.
Mais la part de butin que Douglas le meilleur ami de Tiago a prélevée va bouleverser ses plans des nanites ont infecté leurs sangs tandis que des andrones fous s’en prennent aux êtres humains. Il ne s’agit plus de sauver leur peau mais peut-être l’humanité toute entière menacée par une arme microscopique.

Quelle rédemption, quel espoir ?

La statue du Christ rédempteur domine Rio de Janeiro et de ce fait une partie du roman.
Un des phénomènes qui sous-tend l’intrigue est le complexe d’Adam, la rancœur de la créature envers son créateur, la pulsion d’anéantir celui-ci pour avoir l’illusion de n’exister que par soi-même.
Intervenir au cœur même de la matière c’est toucher au domaine jusqu’ici réservé au démiurge. Et les andrones ont réalisé ce potentiel bien plus vite que les humains.

Face au chaos, trois attitudes


La foi en Dieu guide le père Miguel et le grand-père de Tiago, ils cherchent le réconfort dans la prière.
La foi en l’être humain anime les activistes ludiques du FNL dont Verlaine énonce la profession de foi : « Nous voulons provoquer le réveil des masses. Montrer aux gens à quel point ils sont dépendants de la technologie. ». Tiago reconnaît l’utilité de ce combat « Cette lutte est une cause d’utilité publique » déclare-t-il p. 148. Mais il ne partage pas pour autant cet engagement. Lui il est mû par l’instinct de vie, le même qui fait pousser les favelas comme des champignonnières, le même qui le pousse au sacrifice quand la vie est mise en danger par la froide détermination des robots à proliférer pour éradiquer tout obstacle à leur existence, le même instinct qui s’adapte à la réalité binaire de Heaven. Cet instinct s'exprime nottament par ses désirs dont il déclare :
« C’est notre désir qui nous sauve. Nous ne voulons pas finir comme nos parents. Nous voulons que ce siècle se souvienne de nous. »

Et cet instinct lui confère une confiance aveugle dans le futur, qui peut passer pour de la résignation, voire de la folie aux yeux de Maria par exemple qui invective Tiago en ces termes « Tu es fou, comme tous les gens de cette ville, de ce pays, de ce monde comme tous les gens qui continuent de sourire pour de vrai alors que l’espoir s’effrite sous leurs doigts, que les guerres font rage partout, que rien ne s’arrange jamais. »
Et cette certitude tranquille sur les capacités de la vie à se perpétuer semble s’incarner dans le nombre élevé de fois où les protagonistes, et même l’auteur dans sa post-face, concluent philosophes l’"on verra bien". Car qui vivra verra ?

Au-delà de la projection catastrophique, un hymne à la vie

Le danger exposé ici repose sur deux peurs largement usitées en science-fiction car profondément ancrées dans l'incosncient collectif : l'angoisse face à la contamination virale, la pendémie qui sournoisement, sans se montrer, infecte le corps humain, le fait muter. Et la rébellion des robots dont nous craignons tous que les lois d'Asimov ne contiendraient pas longtemps.
Avec la finesse et l'envergure qui caractérise son œuvre, Fabrice Colin mêle dans ce cauchemar de la prospective un avertissement (car comme il l'écrit "Le rôle de la science-fiction -si elle en a un autre que divertir – est de mettre en garde, de prévenir au moins d'attirer l'attention"), une sonette d'alarme sur la capacité de l'homme à provoquer sa propre disparition avec un fabuleux hommage à la vie, à l'amitié, au sentiment grisant et dangereux d'exister.

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