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ITW Et si... Napoléon avait triomphé à Waterloo ?
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ITW Et si... Napoléon avait triomphé à Waterloo ?

ActuSF : Bonjour à tous, pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs?
PV : Bonjour je m’appelle Philippe Valode, J'ai conduit une carrière de chef d'entreprise: patron de banques, de l'0ffice d'HLM du Grand Lyon, de maisons d'édition. Depuis 12 ans, j'ai écrit 58 livres d'histoire chez une petite dizaine d'éditeurs.

LM : Bonjour je m’appelle Luc Mary, historien de formation, je suis professeur, et amateur éclairé de science-fiction, je ne pouvais rêver d'un sujet plus emballant que l'Uchronie (qui comme chacun sait est très lié au thème du voyage dans le temps, autre de mes dadas auquel j'ai consacré plusieurs livres). A l'image de la mécanique quantique, elle nous dit en effet que l'Histoire est le plus souvent le fruit de l'improbable et que les mêmes causes ne produisent pas forcément les mêmes effets.

SC : Bonjour je m’appelle Stéphane Chabenat, créateur en 1998 du magazine musical Classica, racheté par Groupe Express en 2000. Je suis resté 8 ans directeur-délégué du Groupe Express-Expansion dans lequel j'ai notamment créé l'activité d'édition. En 2009, j'ai créé les Éditions de l'Opportun (diffusion Le Seuil) qui ont pour but d'éditer des livres de caractère, drôles et instructifs à l'exception du roman. En 2011, les Editions de l'Opportun ont publié 50 titres.

ActuSF : Comment s'est passé la construction de votre livre : Le travail d'écriture, le choix des évènements historiques et de l’uchronie qui en découle ? Pourquoi 40 uchronies ? Et pas 30, ou 50 ?
PV : Et si Napoléon avait triomphé à Waterloo est mon 56e ouvrage historique et le premier imaginaire. L'idée nous est venue en dialoguant avec Stéphane Chabenat d'un livre plus vrai que nature. Autrement dit notre réécriture de l'histoire n'est pas "inventée"! Au contraire: elle raconte les évènements tels qu'ils auraient du se passer. Ce qui est advenu en réalité est une sorte de fiction, la probabilité la moins forte compte tenu des conjonctures historiques. Aussi notre histoire "nouvelle " est-elle, la plus vraisemblable...

L'écriture du "roman" s'est effectuée à deux, chacun, en raison de sa compétence particulière, traitant l'aventure historique qu'il connaissait le mieux. Et en tant que chef de file, j'ai assuré une relecture globale avec mise en cohérence de l'ensemble.

Le choix des uchronies a été facile, basé sur la célébrité des évènements, de façon à composer un livre aussi grand public que possible. Car cette distraction n'est évidemment pas destinée à un public d'historiens...

Le récit "uchronique" lui-même repose sur une connaissance historique parfaite et même érudite. Et le lecteur ignore à quel instant se produit la rupture, le passage de la réalité à la fiction.

Pourquoi 40 uchronies ? Nous en avions prévu 50 à l'origine, pour des raisons d'épaisseur du livre et de prix de revient. Mais aussi parce que, pour le lecteur non spécialiste, ce sont celles qui lui parleront le plus. Inutile de tomber dans le travail de spécialiste, puisqu'il s'agit de distraire, tout en montrant combien l'histoire est incertaine et comment notre destinée française aurait pu, en bien des occasions, voir son cours profondément modifié.

LM : Nous avons choisi d'explorer 40 histoires alternatives de l'Histoire de France pour des raisons évidement pratiques et commerciales : 50 aurait trop fastidieux et trop long et 30 aurait été trop court pour un livre.

ActuSF : Le titre fait tape à l’œil mais en même temps renseigne tout de suite sur ce qui nous attend, comment et pourquoi l’avez-vous choisi ?
PV : Le titre est largement commercial, Napoléon étant avec de Gaulle le personnage le plus célèbre de l'histoire nationale.

LM : Pour le choix du titre, comme l'indique fort justement mon collègue Philippe Valode, il nous semblait plus judicieux de se référer à un évènement ultra-connu plutôt que de choisir un titre ésotérique que le commun des mortels n'aurait peut-être pas compris.

ActuSF : Stéphane Chabenat, qu’est-ce qui vous a donné envie de publier cet ouvrage ? De combien a été le tirage ? Le livre rencontre t-il son public ?
SC : J'ai proposé l'idée du livre à Philippe Valode lors d'une de nos multiples discussions. Ce n'est qu'ensuite que j'ai découvert, à l'instar du fameux Monsieur Jourdain, que cette idée portait un nom : l'uchronie ! Les libraires ont bien accueilli notre projet en mettant en place plus de 4000 exemplaires du livre. Après quelques semaines de vente, nous pouvons déjà parler d'un succès. En outre, le bouche à oreilles semble très bien fonctionner.

ActuSF : Pas mal de vos uchronies se terminent sur des ouvertures possibles, comment faites-vous pour vous dire "on s'arrête là et au lecteur d'imaginer la suite", juste pour le plaisir, pourriez-vous résumer votre alternative uchronique sur Waterloo et nous raconter, un peu, la suite des évènements ? A la lecture de votre sommaire, je me suis dit "tiens, pourquoi ne pas avoir songé à des uchronies, sur la Révolution Française (par rapport à la Terreur, ou à Robespierre), ou sur une mort précoce de Napoléon Bonaparte,  sur une défaite à Verdun (menant à un limogeage de Pétain), sur une véritable mutinerie générale en France en 1917, sur la guerre d'Indochine et la guerre d'Algérie, sur Mai 68, etc." ?

PV : La fin de chaque uchronie est une ouverture sur une nouvelle aventure. Prenons la victoire de Waterloo comme vous le demandez. Bien sûr, on aurait pu poursuivre le récit. Voilà Napoléon ayant étrillé Anglais et Prussiens et capturé Louis XVIII. De quoi faire hésiter Pitt : il faudrait mobiliser une nouvelle armée anglaise, alors que Blücher est bien éloigné de sa base prussienne avec de difficiles problèmes de logistique. Et que Russes et Autrichiens qui n'ont pas encore franchi la frontière française à l'est, vont voir fondre sur eux les forces françaises rassemblées autour de Suchet (l'excellente armée de Lyon) et de Napoléon... Et que faire pour obtenir la libération du roi Bourbon? Assurément, il faut négocier. Napoléon devrait être prêt à rentrer dans les frontières de 1792, celles du premier traité de Paris... Et Metternich réapparaît, tout comme Talleyrand... Quant à d'autres uchronies, assurément vous en suggérez d'excellentes comme la défaite de Pétain à Verdun, et d'autre peu crédibles comme le soulèvement de l'armée en 1917 (en vérité 60 000 y ont participé, aucun au front, tous à l'arrière sur une armée forte de 4,5 millions d'hommes).

LM : Nous ne pouvions extrapoler nos chapitres au-delà de quelques années dans le futur de peur d'empiéter sur l'uchronie suivante (le lecteur peut cependant essayer d'imaginer la suite). L'un des intérêts du livre est aussi de trouver le moment où le récit bascule dans la pure invention, ce que les amateurs de science-fiction qualifient de point de divergence.

Le but de l'ouvrage est aussi de démontrer, comme le précise Philippe, que l'épilogue imaginé n'est pas moins probable que ce qui s'est réellement passé. Mieux encore, l'histoire réelle a souvent consacré le triomphe de l'imprévisible. En toute logique, Jean le Bon devait gagner la bataille de Poitiers, François 1er perdre celle de Marignan et les Allemands entrer à Paris dès septembre 1914 ; mais les aléas de l'Histoire en ont décidé autrement...

ActuSF : Pensez-vous donner une suite à ce livre ? Pour conclure que représente le mot Uchronie pour vous, et pourriez-vous faire une 41ème uchronie pour nos lecteurs ?

PV : Oui, mais plutôt sous une forme internationale, élargie au monde. Nous en discutons avec l'éditeur...

LM : Le thème des uchronies est inépuisable. Littérature expérimentale du Possible, l'Uchronie serait une "utopie temporelle" (le terme aurait été inventé en 1837 par un certain Charles Renouvier il me semble). Mieux encore, l'Uchronie est selon moi le dernier théâtre de l'imaginaire.

Pour le prochain tome, nous envisageons, non sans ambition, de raconter 40 nouvelles histoires alternatives, mais cette fois à l'échelle du monde !

PV : Quant à imaginer une 41e uchronie, du moins le thème, sans doute pourrait-on retenir une défaite de Pétain à Verdun en février 1916. Car, il s'en est fallu de fort peu : les Allemands ont oublié qu'il existait deux rives sur la Meuse, et surtout, ils ont par trop concentré leurs bombardements, rendant leur propre progression extrêmement difficile sur un terrain qu'ils avaient eux-mêmes bouleversé. Enfin, Pétain a eu cette idée géniale de la rotation des troupes qui a évité l'épuisement physique et mental de la troupe enregistré chez les Allemands.
 
LM : Concernant une ultime uchronie, sans doute aurions pu imaginer que le duc d'Epernon arrête le bras de Ravaillac rue de la Ferronnerie. Henri IV aurait ainsi survécu au 14 mai 1610 et serait probablement parti en guerre cinq jours plus tard. En effet, le 19 mai 1610, 30 000 soldats massés à Châlons sur Marne devaient s'ébranler en direction de l'est pour prêter main forte aux Princes Protestants. Une "guerre huguenote" peu populaire auprès des Français.

Contre toute attente, l'offensive française est un fiasco. Henri IV est finalement assassiné au retour de sa campagne...

A long terme, le long fleuve de l'Histoire n'est pas si facile à détourner...

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