Bien qu'il vive aujourd'hui à Los Angeles, Clive Barker est régulièrement présenté comme le pendant britannique de Stephen King. Mais si leurs carrières se font parfois écho, le point de concordance le plus évident reste que Clive Barker est sans conteste, l'une des figures tutélaires de l'Imaginaire anglo-saxon de ces dernières décennies.
C'est avec un roman largement atypique dans son œuvre, qu'il nous revient chez Lunes d'Encre. Détournant en fable boufonne ses thèmes de prédilections, il nous livre ici une facétie inattendue de la part du père du splatterpunk.
Brûlez ce livre...
Jakabok Botch n'est guère impressionnant. En revanche, même pour un démon, il est extrêmement laid. Atrocement brûlé par le feu inextinguible qui consuma ses écrits au cours d'un autodafé maternel.
Car, entre autres perversions, Jakabok a connu très jeune, la passion du mot. Une turpitude que n'aurait su tolérer sa brute de père, le vieux Gatmuss, et moins encore son infernale maman, descendante mal mariée d'une haute lignée de pyrophantes. C'est elle, un jour, qui trouva le journal auquel le jeune Jakabok confiait ses tourments et qui l'incendia d'un seul jet de sa salive de feu, avant que, pour faire bonne mesure, Gatmuss ne précipite à son tour son exécrée descendance dans le brasier.
Point de départ somme toute anodin pour une aventure qui conduira le jeune Jakabok des profondeurs infernales au Monde-d'en-Haut. Là, une providentielle rencontre avec Quintoon, un démon de haute extraction, comme lui exilé à la surface, entraînera le modeste fils de Gatmuss sur les routes d'Occident, à la recherche des inventions des hommes, jusqu'à ce que, finalement, il tombe, en 1450 à Mayence, sur la plus redoutable d'entre-toute.
... mais attendez un peu tout de même.
Depuis celle, fondatrice, de Dante en 1314, avec sa topographie en neuf cercles, les représentations de l'Enfer en littérature ont rarement été pertinentes. Tout particulièrement dans leurs adaptations aux canons des genres qui nous occupent. Elles ne sont qu'occasionnellement brillantes, souvent médiocres (Les Légions de l'Enfer de C.J Cherryh), voire parfois carrément grotesques (Les Chroniques infernales d'Esther Rochon, par exemple). A cet égard, Clive Barker s'en tire plutôt mieux que la moyenne. S'il reprend la géographie classique, il décrit les Enfers avec une surenchère bouffonne, quelque part entre la sanie baroque de Jérôme Bosch et la folie ordonnée de Dante, et parvient, globalement, à garder ses effets sous contrôle. On reste donc dans un mauvais goût savant, trempé de cette sexualité transgressive et d'horreur qui fait floc-floc, véritable marque de fabrique de Clive Barker. En résulte un décalage joliment calibré et pas désagréable du tout, qui ne sauve toutefois pas le roman dans son ensemble, de l'anecdotique.
Sans doute le procédé narratif y fait pour beaucoup. Ce mélange de suppliques et d'injonctions adressées au lecteur par Jakabok et qui entrecoupe le récit devient vite lassant et coud de fil blanc une intrigue qui n'est guère qu'un prétexte à un sous-texte, certes savoureux, mais d'une portée marginale. Même une lecture au second degré, avec sa mise en abyme des douleurs de l'enfantement littéraire ou la série de vacheries que Barker réserve au milieu de l'édition, ne laisse qu'une impression d'aimable potacherie.
Un auteur de cet acabit a bien assez de finesse et de métier pour que l'ensemble reste divertissant, mais précisément, d'un auteur comme Clive Barker, on attendait quelque chose de plus brillant que pétillant.
C'est avec un roman largement atypique dans son œuvre, qu'il nous revient chez Lunes d'Encre. Détournant en fable boufonne ses thèmes de prédilections, il nous livre ici une facétie inattendue de la part du père du splatterpunk.
Brûlez ce livre...
Jakabok Botch n'est guère impressionnant. En revanche, même pour un démon, il est extrêmement laid. Atrocement brûlé par le feu inextinguible qui consuma ses écrits au cours d'un autodafé maternel.
Car, entre autres perversions, Jakabok a connu très jeune, la passion du mot. Une turpitude que n'aurait su tolérer sa brute de père, le vieux Gatmuss, et moins encore son infernale maman, descendante mal mariée d'une haute lignée de pyrophantes. C'est elle, un jour, qui trouva le journal auquel le jeune Jakabok confiait ses tourments et qui l'incendia d'un seul jet de sa salive de feu, avant que, pour faire bonne mesure, Gatmuss ne précipite à son tour son exécrée descendance dans le brasier.
Point de départ somme toute anodin pour une aventure qui conduira le jeune Jakabok des profondeurs infernales au Monde-d'en-Haut. Là, une providentielle rencontre avec Quintoon, un démon de haute extraction, comme lui exilé à la surface, entraînera le modeste fils de Gatmuss sur les routes d'Occident, à la recherche des inventions des hommes, jusqu'à ce que, finalement, il tombe, en 1450 à Mayence, sur la plus redoutable d'entre-toute.
... mais attendez un peu tout de même.
Depuis celle, fondatrice, de Dante en 1314, avec sa topographie en neuf cercles, les représentations de l'Enfer en littérature ont rarement été pertinentes. Tout particulièrement dans leurs adaptations aux canons des genres qui nous occupent. Elles ne sont qu'occasionnellement brillantes, souvent médiocres (Les Légions de l'Enfer de C.J Cherryh), voire parfois carrément grotesques (Les Chroniques infernales d'Esther Rochon, par exemple). A cet égard, Clive Barker s'en tire plutôt mieux que la moyenne. S'il reprend la géographie classique, il décrit les Enfers avec une surenchère bouffonne, quelque part entre la sanie baroque de Jérôme Bosch et la folie ordonnée de Dante, et parvient, globalement, à garder ses effets sous contrôle. On reste donc dans un mauvais goût savant, trempé de cette sexualité transgressive et d'horreur qui fait floc-floc, véritable marque de fabrique de Clive Barker. En résulte un décalage joliment calibré et pas désagréable du tout, qui ne sauve toutefois pas le roman dans son ensemble, de l'anecdotique.
Sans doute le procédé narratif y fait pour beaucoup. Ce mélange de suppliques et d'injonctions adressées au lecteur par Jakabok et qui entrecoupe le récit devient vite lassant et coud de fil blanc une intrigue qui n'est guère qu'un prétexte à un sous-texte, certes savoureux, mais d'une portée marginale. Même une lecture au second degré, avec sa mise en abyme des douleurs de l'enfantement littéraire ou la série de vacheries que Barker réserve au milieu de l'édition, ne laisse qu'une impression d'aimable potacherie.
Un auteur de cet acabit a bien assez de finesse et de métier pour que l'ensemble reste divertissant, mais précisément, d'un auteur comme Clive Barker, on attendait quelque chose de plus brillant que pétillant.