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L'Enfer, le silence

Diaz Canales (Scénariste), Juanjo Guarnido (Dessinateur), Anne-Marie Ruiz (Traducteur)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 31/08/2010  -  bd
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L'Enfer, le silence

C'est dès leurs études, dans une école d'animation, que Juanjo Guarnido et Juan Díaz Canales se rencontrent. Ils deviennent amis et imagineront tous deux une des séries à succès des années 2000, Blacksad. Si les trois premiers tomes – racontant à chaque fois des affaires indépendantes menées par le chat détective privé qui donne son nom à la série – sont parus entre 2000 et 2005, les fans de la série auront dû supporter cinq ans d'attente et des dates de sorties maintes fois repoussées avant de voir enfin le quatrième album sur les étalages des libraires.
Mais cette nouvelle enquête de Blacksad est-elle à la hauteur du désir suscité ?

Blacksad a-t-il le blues dans la peau ?

Blacksad se trouve à la Nouvelle-Orléans, où il a été engagé par Faust Lachapelle, producteur de disques, afin de retrouver Sebastian "Little Hand" Fletcher, musicien de génie mais héroïnomane, qui a subitement disparu. Une enquête qui s'annonce plus simple que bien d'autres menées par le privé. Mais c'est sans compter sur un détective rival et sur les mauvaises fréquentations de Fletcher...

Canales et Guarnido en roule libre

Blacksad est une série de bandes dessinées qui a, avec trois albums parus jusqu'à ce jour, hissé Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido au sommet du panthéon des auteurs de BD. Bien qu'ils racontent les enquêtes d'un détective privé dans les années cinquante – ce qui n'a rien d'original – en mettant en scène des animaux humanoïdes – ce qui est tout autant ordinaire –, les deux Espagnols ont su captiver les lecteurs. Tout d'abord avec des dessins et des mises en couleur d'une qualité irréprochable. Ensuite avec des histoires policières empreintes de suspense, ou la violence n'est pas toujours absente, mais surtout, dès le deuxième tome, en traitant de sujets graves qui ont secoué l'Amérique de l'après-guerre. Ainsi, le racisme et les groupuscules extrémistes étaient-ils au cœur d'Arctic-Nation, la chasse aux communistes étant le thème d'Âme rouge. Avec ces deux précédents albums, Diaz Canales et Guarnido ont habitué leurs lecteurs à une grande profondeur de propos, associée aux éléments de qualité évoqués précédemment.

Avec L'Enfer, le silence, quatrième album de la série, les deux hommes ne déçoivent pas le lecteur, qui découvrira les planches d'un Guarnido qui n'a pas perdu la main en cinq ans, et qui effectue une nouvelle démonstration de son talent tant au crayon qu'au pinceau.
Toutefois, le scénario de Díaz Canales, lui, pourrait ne pas transcender un lecteur qui a goûté du Château Latour et doit se contenter d'un Mouton Rothschild. Un peu comme dans Quelque part entre les ombres, le sujet est plus léger – mais non sans gravité – car si les deux auteurs montrent bien la ségrégation raciale courante dans les états du Sud, le thème principal de l'album est le blues. L'action se situe à la Nouvelle-Orléans, qui sert de décor, ville où règne un certain mystère et dont les habitants dissimulent leurs problèmes en faisant la fête au cours du Carnaval. Malheureusement, et c'est là peut-être le seul défaut de L'Enfer, le silence, l'ambiance si particulière de la ville se fait peu ressentir, tout comme cet album manque d'un peu de caractère quand les autres tomes étaient tantôt noirs, tantôt inquiétants ou émouvants.
Toutefois, se déroulant dans cette ville hétéroclite, il n'est pas étonnant que l'enquête de Blacksad se présente comme tortueuse, faisant intervenir des personnages – noirs/blancs, riches/pauvres – aux relations complexes. On y retrouve en tout cas le détective privé, qu'on aime victime de son caractère ténébreux et romantique. Un caractère qui le poussera, comme souvent, à prendre parti, ce qui va lui attirer bien des ennuis qu'il devra écarter dans des bagarres d'une violence non retenue.
On retrouve également Week, le reporter du What's news, à l'origine de bien des situations cocasses qui apportent quelques pointes d'humour à une bande dessinée qui a du coup tout pour plaire.

Très attendu, L'Enfer, le silence tient ses promesses, sans être la meilleure enquête du chat détective privé, et confirme la qualité d'une série qu'on se plaira à poursuivre puisqu'un cinquième tome est prévu.

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