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La Belle et les Bêtes

Alain Ayroles (Scénariste), Bruno Maïorana (Dessinateur), Thierry Leprévost (Coloriste)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 31/05/2002  -  bd
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La Belle et les Bêtes

Bruno Maïorana, dessinateur de son état, a fréquenté les Beaux-Arts d'Angoulême, travaillé dans le dessin animé et adore les jeux de rôles. S'il était avant un grand lecteur de BD, il préfère aujourd'hui éviter toute influence, tout en restant fidèle à Franquin et surtout Moebius qu'il adule. Garulfo est sa seule Bande Dessinée connue. Il a un style à la fois personnel et malléable lui permettant dès lors de passer de cases proches du cartoon à des cases très stylisées, tirant vers l'enluminure comme a pu le dire Ayroles.

Alain Ayroles est un scénariste hors pair, ses histoires sont des ovnis dans le panorama actuel de la Bande Dessinée. Les histoires qu'il invente sont drôles, innovantes et surtout intelligentes. En 1990, il sort diplômé des Beaux-Arts d'Angoulême. Il se lance alors dans le dessin animé. Puis suivront différentes collaborations avec des revues de la presse spécialisée telles que Racaille, Rackham ou bien encore Yéti. Grand fan de jeux de rôles (çà commence à être très courant chez les auteurs de Bande Dessinée !), il a écrit beaucoup de scénarios, notamment pour L'Appel de Cthulhu, et considère que c'est une très bonne école. La série De Cape et de Crocs, publiée chez Delcourt et dessinée par Masbou, est née d'un jeu de rôles qu'il avait lui-même créé, Contes et Racontars. Cette incroyable BD se situe au XVIIème siècle et est truffée de références littéraires, des Fables de La Fontaine, à travers l'univers où se côtoient hommes et bêtes, à la comédie moliéresque, en passant par le détournement parfois osé de citations de Baudelaire, Hugo et bien d'autres. Toujours chez Delcourt, il fait paraître Garulfo en collaboration avec Maïorana.

C'est connu, jamais deux sans trois : le coloriste Thierry Leprévost a lui aussi fait les Beaux-Arts d'Angoulême et a de même travaillé dans le dessin animé. Il a participé à la fondation de la revue Ego Comme X. Son travail participe pleinement au succès de cette série.

Un dernier tour de piste.

Et voilà le sixième et dernier tome tant attendu qui clôt la série. Garulfo, la grenouille et Romuald, le prince vont-ils enfin réintroduire leur corps respectifs ? Mais avant cela, sortiront-ils vivants du duel à mort contre le chevalier Valdemort ? La sorcière jouera-t-elle un bon ou un vilain tour ? L'ogre qui a miraculeusement échappé à la haine des chevaliers partis le tuer, se transforme en bête sanguinaire et, fou de rage et de tristesse, attaque la princesse Héphylie qu'il croît responsable de la trahison. Comment tout cela va-t-il finir ? Un indice : c'est un conte de fée…

Ils sont venus, ils sont tous là...

Tous les personnages sont présents pour cet ultime album. Ayroles sait clore une série, ce qui n'est pas toujours le cas chez tous les auteurs de BD, et il finit en apothéose. Garulfo est un conte, un vrai, qui fait appel à notre imagination et à l'enfant qui sommeille encore en chacun de nous. Ayroles nourrit sa série de toutes ces histoires que nous lisions petits et qui restent gravées dans notre mémoire. Ce dernier tome n'échappe pas à la règle et les mises en abyme sont nombreuses : Le Petit Poucet, Blanche Neige, Le Chat botté… Comme tous les contes, Garulfo a pour vocation de faire connaître le monde et ses dangers, l'homme et ses vices, à travers le prisme d'un personnage naïf, ici un Candide version batracien. Ayroles fait preuve d'une imagination sans faille et parvient sans cesse à surprendre le lecteur dans un genre pourtant ancien. Entre parodie et volonté de produire un véritable conte, il fait de son histoire un petit bijou. Tous les ingrédients sont là, prince, princesse, sorcière, ogre, chevaliers, tournoi, métamorphoses… et le lecteur ne se lasse pas de tous ces éléments que l'on croyait éculés et à qui ce scénariste donne un nouveau souffle. C'est sans parler de l'humour qui court dans ces pages, comme la planche 26 qui est extrêmement drôle. C'est vieux comme le monde mais on rit toujours autant. La verve d'Ayroles joue une fois encore sur plusieurs registres, et le comique naît de ces différences de niveaux de langue entre le parler soutenu et la langue familière contemporaine. Pourtant, cet album par rapport aux autres est plus tendu et a des accents plus tragiques avec le retournement de l'ogre et la mort de la Princesse Héphylie.

Le dessin de Maïorana s'adapte parfaitement au scénario dans une incroyable osmose. Passant du style cartoon à des dessins beaucoup plus travaillés, il met en exergue les différents temps de la narration et retranscrit parfaitement les moments de tension comme les moments d'allégresse. Maïorana offre au lecteur quelques scènes d'anthologie comme ce duel bondissant entre le Lutin et Romuald ou bien encore la case de la planche 37 où l'on voit Héphylie tomber. Son dessin, très dynamique, ne laisse aucun temps mort dans ce dernier album. Le merveilleux est présent même dans les pages les plus sombres. Il faut aussi rendre hommage à Leprévost pour la mise en couleurs, les scènes d'intérieur éclairées par des lumières artificielles sont particulièrement bien rendues. En bref, une Bande Dessinée innovante, drôle, intelligente et décalée. Que demande le peuple ?

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