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La glace et le fer

Christian L. Meistermann (Traducteur), Wilson Tucker ( Auteur), Sulmer (Illustrateur de couverture)
Langue d'origine : Anglais US
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 30/06/1979  -  livre
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La glace et le fer

Si Wilson Tucker est officiellement considéré comme l’inventeur de l’expression space opera, on ignore souvent qu’il est également à l’origine du mot tuckerisation. Très courante, cette forme particulière de private joke consiste à nommer certains protagonistes d’après des personnes réelles, souvent choisies parmi les amis, la famille, ou des membres du petit univers de la SF. De nombreux auteurs se sont livrés à ce petit jeu, de Lovecraft à Phil Dick pour ne citer que les plus célèbres d’entre eux. Relativement peu traduit en français, Wilson Tucker se montrait fasciné par le thème du temps, qu’il savait aborder intelligemment et avec beaucoup d’originalité. La glace et le fer et À la poursuite de Lincoln, réunis dans l’un des épais volumes du Club du livre d’anticipation à la fin des années soixante-dix, sont devenus assez rares mais avec un peu de patience il est encore possible de trouver à des prix raisonnables l’un des trois mille exemplaires de l’édition originale : que la chasse commence !

Il pleut des briques !

Au temps pour le réchauffement de la planète, c’est une période de glaciation qui s’annonce. Après tout, il s’en faut de quelques millions d’années pour que le pléistocène se termine et la Terre n’en est pas à sa première variation de température. C’est au pied du gigantesque glacier nord-américain que se trouvent Fisher Highsmith et ses compagnons, dans un aéroport désaffecté, afin d’observer et de tenter de comprendre les curieux événements que l’on rapporte depuis quelques années : des objets aussi incongrus que des briques, et même des cadavres humains, semblent tomber du ciel ! Des siècles auparavant un écrivain du nom de Charles Fort avait déjà recensé de nombreux phénomènes étranges du même type dans son Livre des damnés. Se pourrait-il que les pluies d’animaux qu’il mentionne aient été autre chose que des boniments destinés aux âmes crédules ?

Une récompense à la mesure de l’effort du lecteur…

Étrange auteur, que Wilson Tucker... Le lecteur qui s'aventure dans La glace et le fer devra, avant toute chose, lui accorder une confiance aussi totale qu'aveugle. Il faudra accepter de le suivre au cours des quelque deux cent cinquante pages du roman au fil desquelles on sera tour à tour désemparé, dubitatif, un peu inquiet de savoir s'il parviendra à sortir quelque chose de cohérent de tous ces mots... La comparaison avec le whodunit, le roman d'enquête cher à Agatha Christie, finit par s'imposer. Les deux lignes narratives, celles du présent et du futur, s'éclairent mutuellement peu à peu et donnent du sens à l'ensemble. Toute l’histoire n'est pas écrite, il faut parfois déduire et interpréter les allusions, replacer le comportement et le caractère des personnages dans un contexte plus général. Ce n’est pas une erreur de l’auteur, mais plutôt un puzzle dont les pièces ne commenceront à s'assembler que dans le dernier tiers, nous conduisant à accepter ce qui ressemble à une déconcertante inversion de la relation de cause à effet. La lecture de La glace et le fer est certes exigeante mais, comme pour L'année du soleil calme, le chef-d'œuvre de Wilson Tucker, éminemment gratifiante. 
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