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La maison

Thomas Ehrestsmann (Illustrateur de couverture), Yves Grevet ( Auteur)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 31/03/2008  -  jeunesse
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La maison

Enseignant, Yves Grevet est l’auteur de plusieurs ouvrages jeunesse en prise sur leur temps : Mon premier rôle (Nathan, 2004) sur la timidité et la réalisation de soi par l’expression artistique, Comme les cinq doigts du pied (Nathan 2005) sur l’amitié et la solidarité d’un groupe suite à l’absence d’un des leurs, C’était mon oncle !  (Syros 2006) sur l’exclusion et la mort d’un SDF, Jacquot et le grand-père indigne (Syros, 2007) sur la monoparentalité, les relations parents-enfants et le vieillissement.

Avec Méto, Yves Grevet ne renonce pas à ses thèmes de prédilection (l’exclusion, l’injustice, la solidarité), mais il change un peu de registre. Il s’inscrit dans une veine plus SF et s’essaie, dans un souffle plus ample, à la trilogie. Syros n’y va pas par quatre chemins : « le premier roman d’une trilogie époustouflante ». Il est vrai que cet ouvrage est plus ambitieux que les précédents tant sur la thématique que sur le mode d’écriture. D’une portée plus large, son esprit « soyez solidaires ! » et « cherchez à comprendre le monde par vous-mêmes ! » appelle le lecteur à réfléchir et à prendre sa vie en main. Le cadre est original. L’atmosphère particulière. Enfin, un vrai roman SF jeunesse pour les collégiens.

La maison prison

Méto vit dans « la maison », une sorte d’orphelinat-prison où des enfants anonymes mènent une vie chronométrée insipide. Tout débordement est sanctionné. Toute créativité est réprouvée. Méto qui figure désormais parmi les grands est chargé d’initier un jeune entrant, Crassus, aux rites absurdes de la maison.  Mais les enfants refusent de ne vivre que dans le présent. Ils s’interrogent sur leur passé et sur leur futur : d’où viennent-ils ? Que font-ils après la maison quand ils disparaissent ? Certains enfants semblent en savoir plus. Méto, régulièrement châtié, reçoit des informations précieuses quand il est mis, au risque de sa vie, au « frigo ». Il est déterminé, avec d’autres, à en savoir plus. En dépit des règles strictes, des punitions et des mouchards, la révolte gronde. La rébellion éclate. Et, au bout du compte, les jeunes mutins vont découvrir un monde plus dur et plus extravagant que ce qu’ils imaginaient.

(S’)en sortir

Avec Méto, Yves Grevet nous propose un meilleur des mondes vécu de l’intérieur par des enfants qui oublieraient de prendre leur pilule du bonheur. Le lent cheminement de la soumission, des vexations à la volonté de renverser l’ordre des choses est très bien retracé et a valeur universelle : face à une autorité destructrice de la personnalité, face à un arbitraire totalitaire, comment se révolter ? Comment trouver le chemin de la solidarité au sein d’une institution qui cloisonne et terrorise les consciences ? C’est une réponse sous forme de conte à la servitude volontaire de La Boétie. Comme si l’auteur ressentait le besoin, dans notre société qui valorise de plus en plus l’autorité, la soumission, le travail et la réussite personnelle, de donner des armes aux nouvelles générations pour interroger leur monde et oser exprimer leur désir.  Dans la maison, on fabrique des enfants cérébralement modifiés. Des jeunes robots. Bref, le contraire de l’école d’aujourd’hui. Et quid de l’école de demain ?

L’écriture est simple, naturelle, limpide. Méto est le narrateur. Ce sont des enfants naïfs et dociles qui s’expriment dans les dialogues. La juxtaposition de l’ingénuité des propos et de la violence carcérale qu’ils décrivent donne une tonalité étrange et dérangeante au récit. Celle d’un enfer apprivoisé, lisse, sans aspérité. Un enfer accepté. Une abomination plausible. Un univers parallèle possible.

C’est donc avec impatience qu’on attend la suite de la révolte. Les enfants rebelles l'ont  plutôt mal engagée, mais, hors de la maison, l'ambiance devrait être moins oppressante. Qui sait ?

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