Comédien, auteur de pièces radiophoniques, Serge Martel a aussi fait quelques incursions dans la science-fiction où il s’est particulièrement illustré en remportant le prix Jules Vernes en 1958, avec L’adieu aux astres. Comme c’est le cas pour un grand nombre de ces auteurs oubliés qui font les délices des amateurs de vieilleries, les ouvrages de Serge Martel ne se trouvent plus que dans les cartons poussiéreux stockés dans les arrière-boutiques des plus secrètes d’entre les librairies d’occasion. C’est bien dommage, car L’adieu aux astres est un roman dont la mélancolie rétro pourrait encore séduire plus d’un lecteur…
Vieillir ? C’est hors de question !
Pour les pilotes d’astronefs, la carrière se termine à trente ans et, dix ans plus tard, c’est le début du vieillissement accéléré, suivi de l’internement dans un hospice où la fin ne tarde pas. C’est ce qui attend Stéphane Charat et Georges Billoy, deux vétérans des courses interplanétaires. Seulement, les deux retraités n’ont pas l’intention d’accepter la situation sans réagir. Munis des dernières doses de la drogue qui les maintient en bonne santé, ils volent une fusée et partent pour une dernière virée à travers le système solaire. Ensemble, ils reverront ces lieux qui les ont fait rêver et aimer la vie : Mars, Ganymède, Pluton… Ils y ont tant d’amis à retrouver une dernière fois ! Mais les services de sécurité terriens, bien décidés à reprendre leur précieux véhicule spatial, ne l’entendent pas de cette oreille et une course poursuite s’engage…
Une balade interplanétaire teintée de mélancolie…
Là où d’autres n’auraient tiré que des effets ridicules et des blagues potaches de cette histoire de vieillards en cavale, Serge Martel nous offre un récit sensible dans lequel la nostalgie ne devient jamais mièvre et, loin d’entraver l’aventure, la propulse jusqu’à sa conclusion douce-amère. Livre attachant, L’adieu aux astres est bien loin des space operas épiques tels qu’Hypérion de Dan Simmons ou Un feu sur l’abime de Vernor Vinge. La simplicité un peu naïve de son intrigue lui donne cependant un charme rétro des plus irrésistibles, et la révolte tranquille de ses protagonistes contre une société qui oublie ce qu’elle doit à ses anciens est un thème assez puissant pour nous donner de bien belles pages dans le dernier tiers du roman. Même s’il reste loin d’approcher les plus grandes réussites du genre, L’adieu aux astres évoque irrésistiblement Les sondeurs vivent en vain, le chef d’œuvre de Cordwainer Smith, et La piste aux étoiles, de Fredric Brown. Avec des références aussi flatteuses, le roman de Serge Martel devrait bien finir par s’attirer quelques nouveau lecteurs…