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Le Crâne de Cagliostro

Paul (Coloriste), André Juillard (Illustrateur de couverture), Denis Falque (Dessinateur), Didier Convard (Scénariste), Patrick Jusseaume (Dessinateur)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 28/02/2009  -  bd
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Le Crâne de Cagliostro

Après le cycle de la découverte maçonnique du grand secret sur le frère jumeau du Christ (Le Triangle secret), puis celui des origines de la secte (I.N.R.I.), voici que s'ouvre un troisième volet du Triangle secret, à la découverte des origines du bras armé du Vatican.

Le scénariste Didier Convard récidive donc dans sa verve ésotérique et se laisse aller, sur fonds historique, à ses penchants SF et fantastique. Dans les laboratoires secrets de l'Académie pontificale des Sciences, des chercheurs mystiques allient génie génétique avancé et savoirs ancestraux pour modifier le génome humain et vaincre la mort. Sur ces bases gnostiques et éclectiques, il bâtit un univers d'espionnage religieux, digne des plus grandes batailles secrètes de l'histoire. Avec des Gardiens puissants et violents qui n'hésitent pas à verser le sang de leurs congénères.

Le souffle et le rythme du premier cycle ne pouvaient être confiés à un dessinateur unique. Chaque album était dessiné par deux à quatre dessinateurs et André Juillard assurait l'unité graphique apparente, en signant toutes les couvertures. Idem pour l'album solo Hertz, centré sur la biographie d'un personnage complexe et majeur du Triangle secret. Dans le second cycle, en quatre tomes, l'équipe graphique se stabilisait avec Denis Falque, Pierre Wachs au dessin, Paul aux couleurs et André Juillard à la couverture. Seul changement pour ce premier tome du nouveau cycle, Patrick Jusseaume, qui avait déjà collaboré au tome 4 des débuts (L'Évangile oublié), remplace Pierre Wachs.

Nous nous sommes habitués aux cadres et frontispices bordeau couverts du sceau du Triangle secret, un sceau de qualité et d'intelligence scénaristiques.

La fuite


Il y a eu une fuite sur la milice secrète du Vatican. La presse publie des articles sur les Gardiens du Sang, dont le Cardinal Motteli, consultant en génétique auprès du Pape, est considéré comme l'un des leaders.

Devant des étudiants en théologie, Jean Nomane sort de la chambre du Cardinal, en sang, un couteau à la main. Il s'enfuit dans Paris. Le Cardinal a été mortellement poignardé. Le jeune membre des Gardiens du Sang a l'impression d'avoir agi sous l'emprise d'une drogue. Il se réfugie chez son ex, Hélène, qu'il a quittée sans un mot trois ans auparavant, et tente d'alerter d'autres membres de la secte qui sont menacés de mort. Il emporte avec lui un mystérieux crâne, vieux de quelques siècles.

Des voltigeurs, ces miliciens assassins professionnels, lui laissent à peine le temps de reprendre son souffle. Il doit fuir avec Hélène pour survivre et tenter de déjouer le plan des partisans du secret autour des Gardiens. Il a peu de chance de s'en sortir...

Des faces de Cagliostro


Les héros en fuite fournissent d'excellentes trames de scénario (Hitchcock, Truffaut, Godard, Davis, ...), car tout est rapide et se borne à l'essentiel. Jean Nomane, Gardien du sang, est lui-même poursuivi par des Gardiens du sang, en quête d'épuration interne. Trois ans après avoir quitté sa compagne par nécessité, Jean Nomane a hâte de raconter tout ce qu'il a vécu, tout ce qu'il sait, mais il a peu de temps et son récit, qui embrasse le monde chrétien et plusieurs siècles d'histoire scientifique et religieuse, est difficile à croire. Développer un récit didactique et panoramique sous couvert d'urgence est un procédé narratif efficace. Le scénario est très réussi. On n'en attendait pas moins de Convard.

Évidemment, 54 planches, c'est peu pour un tel déferlement d'histoire secrète. Certaines pages ont des allures des premiers Blake & Mortimer ou des premiers tomes d'Alix : des dessins étriqués pour des phylactères surdéveloppés et des caractères à faire fuir les presbytes. Pas de didascalies encombrantes, mais des dialogues bien fournis, qui auraient mérité parfois des raccourcis. L'intérêt de l'histoire compense largement ces petits débordements.

Le bémol est plutôt graphique. Le traitement des couleurs n'appelle pas de commentaire particulier, les ombres sont correctement distillées, les ambiances historiques sont bien rendues par des filtres dominants orange ou gris, les atmosphères secrètes par des rendus très sombres  et les passages contemporains en variété de couleur, douce, sans touches vives. Les décors sont précis. Le trait est réaliste, sans génie, plutôt dynamique. Les drapés, les plis aux relents comics ne sont pas trop exagérés. En revanche, les visages ne sont pas à la hauteur des autres composantes graphiques. Ils donnent parfois l'impression d'être inachevés, comme s'il manquait des traits.

Mais surtout, dès que l'on s'écarte d'une mine d'enterrement, d'un visage de marbre, les expressions dérapent : les bouches sont trop écartées, trop rondes, les dents deviennent carnassières et les yeux exorbités évoquent la surconsommation de drogue ou l'effarement paroxystique. Étrange. En parcourant les pages, les visages s'égrènent comme le faciès emprunté de morts-vivants. Le faciès d'un Cagliostro, sorcier de salon, revenu subitement à la vie. C'est une impression désagréable et d'autant plus dommage que le reste est de bonne tenue (mouvements, découpage, angles, points de vue, etc.).

La série n'en reste pas moins une série de référence et, quoi qu'il en soit, ce cycle démarre haut et fort.

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