Pamela Freeman est née à Sydney en 1980. Auteur de plusieurs romans pour la jeunesse, dont la série Florimonde qui connait un franc succès en Australie. Le Langage des pierres, série devant comporter trois tomes, est sa première incursion dans la fantasy adulte. Elle fait partie de cette vague de fantasy australienne qui déferle sur le monde anglo-saxon et qui pointe le bout de son nez sur nos rivages.
Sous le joug des tyrans
Voilà mille ans que le peuple d'Acton a conquis les Onze Domaines en annihilant la quasi totalité de leurs habitants légitimes. Ceux qui survécurent trouvèrent une nouvelle vie sur les routes et devinrent les voyageurs. Aujourd'hui les Domaines sont gouvernés d'une main de fer par des seigneurs de guerres qui ne rendent des comptes qu'à eux-mêmes. Injustices et tyrannie sont donc monnaie courante dans cet univers.
Mais certaines choses échappent cependant à leur contrôle : la magie des éléments, les esprits et parfois des êtres humains, lointains descendants des Voyageurs bénis des Dieux.
Comme Frêne, laissé par ses parents aux bons soins d'une chef de guilde d'assassins pour apprendre le métier de tueur malgré lui.
Ou encore la belle et farouche Ronce, qui doit fuir les siens après le meurtre accidentel d'un homme de main d'un Seigneur local.
Et enfin le ténébreux Epervier, le noir enchanteur qui a juré vengeance pour son peuple. Prêt à tout pour réussir ses sombres desseins, il va faire revivre, grâce à la nécromancie, les victimes des massacres d'Acton.
Jamais les devins et les pierres n'auraient pu prédire cet avenir et surtout qu'un lien puissant unirait un jour leurs trois destins.
La première pierre de l'édifice
Pour ce premier tome, l'auteur pose les premières pierres de sa série : la mise en place de ses personnages et l'intrigue globale. L'univers est riche et extrêmement fourni. Un monde qui subit la tyrannie des seigneurs de guerres d'Acton et dont le peuple souffre des injustices sans broncher. Mais la colère gronde derrière les volets clos.
Le fameux peuple des Voyageurs issu des premiers habitants du royaume est bien sûr mis au banc de la société et subit les pires inégalités, essuyant régulièrement la haine des occupants des Onze royaumes malgré les mille ans passés. Les dieux sont très présents et la lecture du jet de pierres par les devins semble gouverner souvent la vie au quotidien et le hasard n'a pas l'air d'avoir droit au chapitre dans ce monde sombre.
Pamela Freeman présente de façon alternée ses trois personnages principaux : Ronce, une jeune fille rebelle qui après avoir tuer par accident un soldat va devoir quitter ses parents et prendre la route. Vient ensuite Frêne, un jeune homme idéaliste qui va devoir faire preuve de discernement contre son employeuse extrêmement sournoise et manipulatrice. Et pour finir, Épervier, un noir enchanteur décidé à tout pour arriver à ses fins : la vengeance des siens et en fin de compte de tout son peuple massacrés par les sbires d'Acton. Le lecteur suit pas à pas leurs pérégrination et comprend petit à petit les motivations des personnages. Par exemple comment Epervier arrive à connaître les différents lieux de massacre qui lui serviront pour lever son armée.
Les chapitres passent de l'un à l'autre personnage en donnant une véritable dynamique à l'œuvre. En effet l'envie de connaître la suite pousse plus en avant le lecteur, à la manière d'une série télé. Mais l'idée de l'écrivaine de présenter aussi quelques personnages secondaires, donnant au lecteur une autre vision de la situation et une proximité avec le récit. Ainsi les explications de ces acteurs permettent une approche plus réelle, une immersion plus facile pour le lecteur. On comprend mieux pourquoi certaines choses se passent, comme par exemple quand "Le dit du Hibou" explique le massacre pendant lequel il trouva la mort.
Car c'est aussi là l'une des idées de Freeman, les morts sont très présent et pas seulement revenus à la vie grâce à Epervier. En effet les morts reviennent trois jours après leur mort sous la forme d'un fantôme. Ils attendent souvent simplement qu'on leur dise au revoir mais certains peuvent parler et cela donne pour un esprit peu scrupuleux une source énorme de ragots et d'informations à monnayer. La très charmante employeuse de Frêne le sait bien. Ainsi la connaissance des petits secrets de ses compatriotes permet à Doronit d'avoir des "dossiers" sur tout le monde et lui fournit la meilleure des assurances vie.
Voilà donc un monde bien construit et une galerie de portraits riches et complexes. Et même si la trame de l'intrigue reste assez classique, ce roman est le départ, semble-t-il, d'une trilogie qui permettra de passer un bon moment.
La chronique de 16h16 !