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Le Glaive de Gaïa

Philippe Saimbert (Scénariste), Andrea Mutti (Dessinateur), Eve (Lettrage), Angelo Bussacchini (Coloriste)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 30/04/2005  -  bd
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Le Glaive de Gaïa

Saimbert et Mutti nous avaient déjà entraînés dans un polar sombre à la sauce Usual Suspect lors d’un précédent diptyque chez Albin Michel, Break Point. Enthousiasmée par cette première publication du duo franco-italien, la perspective d’un nouveau thriller est réjouissante. Les deux auteurs se sont rencontrés via Internet, le courant passant bien, ils montent ensemble un premier projet de science-fiction qui ne trouve pas d’éditeur. Albin Michel accepte un autre scénario de Saimbert, un polar qui deviendra Break Point et c’est naturellement que le scénariste fait  alors appel à Andrea Mutti. Ce dernier lui présente un coloriste de talent Angelo Bussacchini qui officie sur ce second diptyque. 

« On a un sujet porteur, bien racoleur : du sang, du mystère, de l’étrange… Et peut-être bientôt de l’action. »

Dans les marais de Sologne, trois journalistes qui enquêtaient sur le centre de recherches génétiques d’OGMajor sont sauvagement tués. Le directeur de cette usine, qui élaborerait en secret des produits transgéniques et ferait des expériences sur les animaux, Duroc, nie toute responsabilité dans l’affaire bien que les écologistes qui manifestent le désignent tous coupable. Pour lui, ce sont les ours réimplantés dans la région qui seraient responsables du massacre. Pour les deux journalistes fraîchement débarqués ce n’est que le début de l’enquête. Deux hommes se dressent contre l’entreprise OGMajor, le premier fait beaucoup de bruit, se fait rosser par les gardes-chiourmes de Duroc et passe pour un grand activiste. Le second est plus discret, Damien Kahn, propriétaire d’un château dans les marais attend son heure. Sa fille Diane est morte dans ce que les autorités ont appelé un « accident de chasse », lui-même a été « exécuté ». Persuadé lui aussi que des animaux génétiquement modifiés se sont échappés des labos de l’usine, il monte un groupuscule d’écolos extrémistes afin de « combattre la violence par la violence ». 

Première partie d’un diptyque qui s’annonce aussi fascinant qu’angoissant

Le Glaive de Gaïa, première partie des Brumes hurlantes, pose d’emblée l’ambiance, ce thriller devrait nous réserver quelques surprises. Saimbert prend son temps, présente un à un ses seconds rôles, creuse ses personnages, les rend ambigus à souhait. Ceux qui apparaissaient comme des écologistes convaincus doivent peut-être leur nouveau credo à l’argent perdu plutôt qu’à de réelles convictions. Nul doute par contre sur les motivations du personnage principal et narrateur de l’histoire, Damien Kahn. Père meurtri, homme brisé, activiste dangereux car désespéré et charismatique, il entraîne dans sa folie vengeresse des gamins malléables. Il est de loin le plus déterminé dans son action et se surnomme lui-même « le Glaive de Gaïa ». Le scénario est d’ailleurs construit sur l’entrecroisement des enquêtes, plusieurs groupes de personnages cherchent à déterminer quels monstres hantent les marais brumeux de Sologne, simples chiens errants ou bêtes génétiquement modifiées ? Les journalistes, les policiers, les écolos, les gens des alentours et les écolos warriors, chacun mène son enquête en parallèle, Saimbert perd ainsi son lecteur, le nombre d’hypothèses allant de pair avec le nombre d’enquêteurs et l’on nous promet une fin surprenante.

Plutôt que de tomber dans le gore, les auteurs ont choisi de suggérer les tueries, de même, les bêtes ne font que de rares apparitions et encore se fondent-elles dans la brume. Ainsi l’atmosphère est plus angoissante qu’effrayante, les peurs irrationnelles et l’inconscient collectif prennent le pas sur la raison. Les marais hantés par des créatures dangereuses sont ancrées dans notre imaginaire, on pense bien sûr à la Bête du Gévaudan mais également au Chien des Baskerville d’Arthur Conan Doyle. Outre les bêtes qui rôdent, il y a les landes, le manoir qu’un descendant vient habiter, le mélange de fantastique et d’enquête policière qui font du roman de Conan Doyle l’une des sources des Brumes hurlantes. Si le scénario est tortueux à souhait, il ne serait rien sans le dessin de Mutti et les couleurs de Bussacchini. A eux deux, ils créent une ambiance oppressante et anxiogène grâce à cette brume suffocante. Les ombres qui se dessinent, floues dans les cases, les grognements lointains qui se rapprochent, l’inquiétude qui se lit sur les traits des personnages, le lecteur est happé par le voile de mystère qui entoure le récit. Entrez à votre tour dans les brumes de Sologne… 

 

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