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Le mage du prince

Cédric Perdereau (Traducteur), David Wyatt (Illustrateur de couverture), Jean-Claude Mallé (Traducteur), Karen Miller ( Auteur)
Langue d'origine : Anglais US
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 30/09/2008  -  livre
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Le Mage du Prince

Karen Miller est australienne et signe avec Le Mage du Prince son premier roman, qui devrait connaître une suite en mars 2009. De facture très classique, l’ouvrage impressionne par une maîtrise parfaite de la narration, du rythme, de la psychologie des personnages, bref, de ce qui fait un roman de fantasy distrayant et enlevé.

C’est dans les vieux chaudrons…

L’histoire n’a rien d’original. Asher, cadet d’une famille nombreuse de pêcheurs, décide de partir à la ville pendant un an pour ramener à son papa de quoi acheter un plus beau bateau. Rapidement, il devient palefrenier du Prince, puis son bras droit et meilleur ami. Il faut dire que la belle Dathné, libraire et membre d’une société secrète, a immédiatement repéré le jeune homme comme étant le « Mage Innocent », qui doit sauver le Royaume des forces du mal. Mais comme il doit rester innocent, elle doit le coacher sans rien lui révéler de ses superpouvoirs, et patati, et patata…

Du style, de la finesse, que demande le peuple ?

On l’aura compris, l’intérêt du roman n’est pas dans l’originalité de l’histoire, mais dans une maîtrise stylistique étonnante. Peu d’action, pas de batailles, pas (tout de suite) de gros méchants à massacrer, mais des problèmes relationnels, politiques, sociaux, familiaux. Les personnages sont campés avec subtilité et équilibre : ni univoques, ni trop compliqués, ils restent attachants et réalistes. C’est donc un récit de fantasy qui évite le bourrin (façon David Gemmel) sans sombrer dans la mièvrerie (façon R. Jordan), et ce grâce à à un ressort qui nous concerne tous un peu : l’ascension sociale…

Colonisation, responsabilité et ascension sociale

Car le Royaume est divisé entre deux races, les autochtones, appelés Olkens, à qui il est interdit d’utiliser la magie, et les Doranens, magiciens exilés par une antique menace, qui forment une aristocratie méprisante mais chargée de protéger le pays grâce à une étrange muraille magique. Dans cette contrée sous cloche, cependant, rien n’est caricatural : le prince se pose plein de questions sur la légitimité de son pouvoir, le manant fait preuve d’un légalisme à toute épreuve, il faut prendre des décisions que la raison approuve et que le cœur rejette. Ce contexte permet de poser une problématique très subtile, toute en clair-obscur, sur les relations entre colonisés et colonisateurs, loin des stéréotypes faciles du genre. Notre héros, Asher, est pris dans une ascension sociale fulgurante dont il ne veut pas réellement, mais qui l'entraîne dans un mouvement qui ne tolèrera pas de retour en arrière, rejeté qu’il est, {in fine}, par sa famille Tout cela arrive dans le roman sans grands discours pesants, mais par petites touches subtiles. Et voilà la réussite paradoxale de Karen Miller : des personnages et des situations très vrais qui surgissent d’un décor en carton-pâte.

Une seule faiblesse : le décor

C’est vraiment le seul reproche qu’on peut faire à ce roman : le parti pris consistant à décrire un Royaume à l’apparence relativement idyllique, sans « extérieur », puisque ses habitants ignorent tout ce qui se passe à l’extérieur de la Muraille magique, donne une certaine impression d’irréalité. Il y a dans cet ouvrage un respect scrupuleux des règles de la fantasy médiévale, sans laisser surnager une pointe d’originalité. Cela fait penser que Karen Miller, quoique réellement douée, est avant tout un « jeune » écrivain futé qui a voulu mettre toutes les chances de son côté avec un texte totalement en phase avec la mode lancée par Robin Hobb. Quoiqu'il en soit Le Mage du Prince signale l'arrivée d'un nouveau poids lourd de la fantasy.

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