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Le Serment de l'acier, tome 1 : Une gloire fantôme - Les secrets d'écriture de Weissengel
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Le Serment de l'acier, tome 1 : Une gloire fantôme - Les secrets d'écriture de Weissengel

A l'occasion de la sortie du tome 1 du Serment de l'acier : Une gloire fantôme, Gwenaël Marcé, alias Weissengel, revient sur l'écriture de ce 1er volet paru aux éditions Drakoo.

Actusf : Comment est née l'idée de ce diptyque ? Qu'aviez-vous envie de faire et de mettre en scène comme univers ?

Weissengel : L'envie originelle, qui doit dater d'il y a 6 ou 7 ans, était celle d'évoquer, de réinterpréter, dans un univers fictif, les conflits européens, plus particulièrement ceux de ex-Yougoslavie et leur impact sur les populations. Des guerres qui, elles-mêmes, puisent leurs racines dans l'Histoire de l'Europe. C'était aussi une façon de se poser la question: qu'est-ce qui fait que des peuples vivent ensemble ou s'entretuent? Une interrogation qui me semble toujours d'actualité dans cette période où les idéaux d'universalisme ont si mauvaise presse au profit de replis idéologiques, identitaires ou autres. Comme j'aime l'Histoire et la Fantasy, le choix de ce type d'univers s'est fait naturellement.

Actusf : Le background présenté est vaste, avec des peuples, une histoire récente, des antagonistes... On sent quelque chose de large. Comment avez-vous travaillé pour la mise en place de l'univers et de l'histoire ?

Weissengel : Comme j'ai été rôliste plus jeune (et que je m'y remets en ce moment (rires)), la création de l'univers du Vaste Pays s'est faite, là-aussi, assez naturellement.
Le récit a guidé l'élaboration des différents peuples et des relations qu'ils entretiennent les uns avec les autres. J'ai puisé dans mon goût pour l'Histoire et les cultures, les influences de chacun d'entre eux : L'aspect méridional pour les Onarques (Italie renaissante, Espagne, Occitanie), les Balkans et le Caucase pour les Aquilins, alpins pour les Lithis et, bien, sûr Manouche et Rom pour les Romanis.
Ces influences se retrouvent dans les noms utilisés, par exemple, ou dans leurs cultures, auxquelles j'ai ajouté des ingrédients de ma composition.
Même chose pour les religions, je me suis inspiré de la gnose des premiers temps du christianisme pour celle des Onarques ou de Mithra pour le culte de l'Uroch.
Mais il y a aussi eu une influence majeure pour moi : ce sont les bouquins de Guy Gavriel Kay (particulièrement Tigane, La Mosaïque de Sarance, Les Lions d'Al Rassan ou La Chanson d'Arbonne). C'est un maître pour ce qui est de transposer des périodes historiques dans des mondes de Fantasy. D'ailleurs, à l'instar des romans de Kay, je souhaitais que la magie reste discrète, voire rare, dans le Vaste Pays, où son utilisation ne peut se faire que dans des conditions particulières.

Actusf : On y suit deux héroïnes, Estèla Ascensal qui enquête sur un meutre, et Aelis Mendigal qui recherche, elle, un scribe disparu. Comment pourriez-vous nous présenter ces deux personnages ?

Weissengel : Estèla est une jeune auxiliaire de la garde de Torrède, la capitale des Province Onarques, son père adoptif étant le maître-chien de cette même garde. Plutôt dégourdie et peu rigide, elle va mettre à profit ses connaissances des milieux interlopes de la cité pour trouver de quoi traquer le meurtrier. Mais ces frères des bas-quartiers n'ont peut-être pas exactement les mêmes objectifs qu'elle...
Quant à Aelis, c'est une soldate Onarque, un peu à l'image d'une Brienne de Torth dans Le Trône de fer, un esprit plutôt militaire et enclin à la méfiance de tout ce qui n'est pas Onarque. Accompagnée d'une caravane nomade, elle est envoyée en mission loin de Torrède, dans une zone devenue frontalière. Ce qu'elle va y découvrir, et qui remonte à la guerre civile qui a déchiré le Vaste Pays, va quelque peu faire vaciller ses certitudes.

Actusf : On est au croisement du polar et de la fantasy. Vous aviez envie de marier les deux genres ?

Weissengel : Oui, même si, au tout départ, la partie polar n'était pas dans le scénario (principalement axé sur le voyage du scribe), mais j'avais des notes d'idées pour un polar urbain dans un univers de Fantasy (une immense ville avec ses secrets, ses quartiers, ses bandes etc...). Puis, au fur et à mesure de l'écriture, je me suis rendu compte qu'assembler les deux pouvait donner une autre dimension au récit (cette construction de deux intrigues parallèles qui se révèlent finalement liées). Concernant cet aspect polar, je dois reconnaître une autre de mes influences : Les Salauds Gentilshommes de Scott Lynch.

Actusf : Comment avez-vous travaillé avec Elisa Ferrari la dessinatrice ?

Weissengel : Très facilement, c'est une dessinatrice à l'écoute et plutôt à l'aise avec ce type d'univers. Elle a fait un boulot graphique conséquent pour la création visuelle du Vaste Pays. L'objectif étant que chaque peuple soit identifiable (que ce soit sur l'aspect des costumes, de l'architecture et de tout le reste) au premier coup d'œil.
Je lui ai envoyé toutes mes descriptions des personnages et des différents peuples ainsi que pas mal de documentation iconographique (pour la plupart issue de costumes où de décors historiques) pour qu'elle puisse s'en inspirer. Ça lui a servi de base et, avec les conseils de Christophe Arleston (l'éditeur), elle a poussé assez loin ses recherches pour s'approprier l'univers.
Pour le travail sur les albums, je lui propose un découpage écrit, planche par planche.

Actusf : Ce n'est pas la première fois que vous travaillez ensemble. Est-ce que son style graphique influence votre scénario quand vous l'écrivez ? Vous y pensez ?

Weissengel : J'ai l'impression que ce serait plutôt l'inverse, son dessin s'adapte au récit proposé. Notre première collaboration, c'était pour la reprise d'une série jeunesse, il y avait donc un aspect graphique précis à suivre. Concernant le Serment de l'acier, le scénario avait été validé en amont et je devais trouver un dessinateur ou une dessinatrice pour l'aventure. J'avais vu des dessins d'Elisa, des croquis de personnages Fantasy dans un style réaliste qui m'ont beaucoup plu et qui correspondaient à ce que je cherchais. Du coup, je lui ai demandé si le projet pouvait l'intéresser et ce fût le cas, ce qui m'a ravi. (rires)
Plus généralement, oui, des dessins peuvent inspirer une histoire, peut-être pas au point d'influencer une écriture en cours (en tout, cela ne m'est jamais arrivé), mais plutôt en être l'origine.

Actusf : Hormis les Elfées, on vous connaît plutôt sur des one shot et des formats courts. Cette fois c'est un diptyque. C'est une bonne longueur selon vous pour raconter une histoire ?

Weissengel : En tout cas, c'est un format qui permet de développer une histoire sans pour autant trop s'étaler sur la longueur. Il a aussi l'avantage d'être plus "rassurant" (avec les one-shot à pagination épaisse) dans le paysage éditorial actuel où les propositions de projets longs ont tendance à effrayer les éditeurs.
Pour en revenir au récit du Serment de l'acier, celui-ci est dense, mais il me semblait difficile de mener l'histoire des deux intrigues parallèles sur trois tomes, donc le diptyque s'est imposé. Après, je dois reconnaître qu'il ne me déplairait pas de pouvoir raconter d'autres histoires au sein du Vaste Pays. Il y a pas mal de peuples, seulement effleurés, à rencontrer et de personnages à découvrir plus en détails.

Actusf : Sur quoi travaillez-vous ? Quels sont vos projets ?

Weissengel : Pour l'instant, question travail du moment, il y a :
- Le tome 12 des Elfées qui doit sortir en février aux éditions Dargaud (avec Serge Carrère au co-scénario, Elisa Ferrari et Véronique Bonnet aux dessins et couleurs).
- Je reprends le dessin le temps de 5 pages, sur un scénario de Gaet's et des couleurs de Véronique Bonnet pour "Toulouse, des guerres de religions à la cité de l'espace" aux éditions Petit à Petit. Il s'agit d'un album collectif sur l'Histoire de la ville rose (un tome 2) où j'ai en charge le chapitre évoquant le premier titre de champion de France du Stade Toulousain en 1912.
- Et, bien sûr, au scénario, le tome 2 du Serment de l'acier chez Drakoo avec Elisa Ferrari et Axel Gonzalbo.

Sinon, j'ai, au moins, trois/quatre projets de scénarios en cours d'élaboration (de la Fantasy, de l'aventure historique et même du thriller teinté de fantastique). Mais, avant de pouvoir en parler concrètement, il faudra qu'ils convainquent les éditeurs. (rires)

Jérôme Vincent

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