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Le Souffle du temps

Robert Holdstock ( Auteur), Laurent Calluaud (Traducteur), Aurélien Police (Illustrateur de couverture)
Langue d'origine : Anglais UK
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 31/08/2008  -  livre
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Le Souffle du temps

On connaît le Robert Holdstock de La Forêt des Mythagos, cet auteur de fantasy celtique obsédé par les arbres. Ce qu’on sait moins c’est qu’il a commencé par écrire de la science fiction. Nombre de ses nouvelles appartiennent à ce genre, de même que Eye among the blind son premier roman publié, jamais traduit pour le public Français. Where Time Winds Blow, en revanche, écrit en 1981 est traduit pour Denoël en 2004 et publié sous le titre : Le Souffle du temps. Ce roman de science-fiction est repris en poche en septembre 2008 dans la collection Folio SF.

L’impossible archéologie

Le monde de VanderZande, rebaptisé Kamélios, est un monde caméléon en perpétuel changement. Il y souffle fréquemment des tempêtes dites temporelles qui remodèlent le paysage et déposent sur le sol des vestiges d’autres époques, plus anciennes ou plus avancées. Coloniser une telle planète se révèle très compliqué, comprendre son histoire est une tâche impossible, d’autant que les récits de rencontres avec des êtres intelligents tiennent plus souvent de la légende que des faits avérés. Pour ne rien arranger il devient clair que Kamélios exerce une puissante influence sur les pionniers. Enthousiastes à l’atterrissage, ils sont de plus en plus blasés, las d’explorer et cependant, peu désireux de repartir. Léna Tanoway et Léo Faulcon, en poste depuis plusieurs mois, ont déjà pu s’en rendre compte. L’arrivée dans leur équipe d’un nouveau, le jeune Kris Dojaan, vient confirmer leurs intuitions et réveiller leur curiosité sur ce que sont réellement les vents du temps.

Expérimentations psychologiques

Dans ce planet opera, peu de paysages à contempler. Ce qui est le plus observé, c’est l’homme dans ses rapports avec un monde inconnu et imprévisible. Kamélios lui inflige en effet des changements d’humeurs superficiels, mais également des mutations plus profondes. Comment les amoureux Léo et Léna pourront-ils maintenir leur relation vivante dans de telles conditions ? Comment l’individu et la communauté intègrent-ils le changement et le passage capricieux du temps ? Dans la cité d’Acier qui abrite les colons, on voit se développer des superstitions très prégnantes, ainsi que des peurs nouvelles. Dans les villages où vivent les modifiés (des humains améliorés pour vivre sans masque sur Kamélios), se sont des rituels différents et un même sentiment du danger. Que sont les fantômes sans âge qui apparaissent à certains ? Hallucinations collectives ou messagers de l’outretemps ?

Une altérité radicale

Thème de prédilection de bien des romans de SF, la rencontre avec l’autre occupe une grande place dans les pages du Souffle du temps. L’autre, c’est d’abord le compagon, le coéquipier, le supérieur, qui, bien que plongés dans le même univers en ont une expérience unique, bien à eux. L’autre, c’est aussi le nouveau venu, qui fait prendre conscience aux colons de l’évolution de leur personnalité. L’autre, c’est l’humain modifié, son apparence étrange et sa philosophie étonnante. Tout ceci reste classique. Ce qui l’est moins, c’est le retournement brutal de tout ce qu’on pouvait attendre d’une rencontre avec les entités peuplant le monde de VanderZande. Et si les extra-terrestres étaient encore plus différents que prévu ? Si leur nature difficilement concevable constituait un obstacle insurmontable à toute communication ?

Un roman au charme étrange

Le Souffle du temps est un roman qu’on ne pénètre que lentement. La première de ses quatre parties n’est que questionnements et ambiance. Où va-t-on ? Que se passe-t-il exactement ? L’atmosphère particulière de Kamélios imprègne le texte de nostalgie. Lorsque, enfin, on est embarqué dans le récit qui comporte quelques longueurs, on éprouve bien souvent un sentiment de confusion. Mais n’est-ce pas là l’état d’esprit des héros eux-mêmes ? Ils ne se reconnaissent plus, et le lecteur peine à les cerner. Leurs doutes, leurs peurs, leur lassitude, se transmettent efficacement, rendant la lecture difficile.
Des questions demeurent, par ailleurs, quant à certains choix de l’auteur. Pourquoi placer six lunes, pas plus, pas moins, dans le ciel de VanderZande ? Quel est l’intérêt de mettre en scène des colons venant de mondes différents si, au bout du compte, c’est leur humanité commune qui fait sens ? Que penser de l’anecdotique lien télépathique entre Kris Dojaan et son frère ? Que sont venus faire les hommes sur cette planète ? Assouvir leur curiosité ?
Malgré ces quelques bizarreries et difficultés, Le Souffle du temps reste un roman captivant. Très différent de ce qu’on peut lire dans le même genre, il adopte un angle tel que, même sans les arguments science-fictifs qui les rendent cruciales et les amplifient, les interrogations des différents protagonistes trouveraient écho dans nos esprits. La preuve, s’il en fallait, est que l’on oublie aisément les vingt sept ans de ce roman.

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