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Le Tsadik aux sept miracles
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Le Tsadik aux sept miracles

Isidore Haiblum, plutôt oublié en France depuis une vingtaine d'années, est l'auteur d'une dizaine de romans de science-fiction teintés d'humour et de romans policiers dans le style hard boiled cher à Chandler et Hammet ; un genre qu'il affectionne tout particulièrement puisqu'il constitue l'essentiel de sa production récente. Nombre de ses ouvrages sont fortement marqués par la culture juive et Le Tsadik aux sept miracles, un livre qui mêle voyages temporels, univers parallèles et tradition, est considéré comme étant le premier roman de science-fiction yiddish.

Oy vey ! Et si finalement le cosmos avait bien la forme d'un bagel ?

Dans un futur éloigné, l'enquêteur Lund se trouve face à une difficulté de taille : il a détecté une fuite cosmique qu'il est impératif de colmater sans délai. Hélas, la Barrière l'en empêche et il n'existe pour la contourner qu'une solution, potentiellement plus nuisible que le mal qu'elle est censée prévenir... Un autre enquêteur du Corps Cosmique est dépêché pour lui prêter main-forte cependant qu'au quinzième siècle le tsadik Isaac Ben Rubin, un saint homme juif, et son assistant, un homoncule nommé Greenberg, se trouvent confrontés à un autre problème. Ils ont le pouvoir de voyager dans le temps mais éprouvent de grosses difficultés à se maintenir sur leur ligne temporelle d'origine...

La dimension des sept miracles, à toute allure...

Lorsqu'il est question d'utiliser  des particularismes linguistiques, religieux, ou encore des caractéristiques locales dans une histoire, il faut bien reconnaître que c'est plutôt du côté de la littérature fantastique qu'il faut se tourner. Une part non négligeable des récits de science-fiction, gorgés de technologies futuristes, revêtent un aspect universel qui tend à gommer les influences liées à l'origine de leurs auteurs. Rares sont les écrivains qui parviennent à conserver et utiliser avec intelligence les ressources de leur environnement culturel. La culture yiddish est de ce point de vue relativement bien représentée dans le domaine de la science-fiction avec, entre autres, Avram Davidson (Le Golem, Goslin Day...), Robert Silverberg (Le Dybbuk de Mazel Tov IV)...

Le roman démarre à un train d'enfer  et se poursuit sans lasser jusqu'à la conclusion. Les chapitres narrés du point de vue du tsadik contiennent de nombreux dialogues émaillés d'expressions et de mots yiddish et à l'humour délicieusement absurde qui rendent le récit extrêmement dynamique. Les chapitres consacrés aux enquêteurs du futur ne sont cependant pas en reste et c'est sur le même tempo effréné que fusent les répliques. Rien d'affecté dans ce récit ancré dans la tradition, et les références au judaïsme sont utilisées avec beaucoup de naturel là où d'autres, moins talentueux, auraient pu forcer la note.

Les lecteurs qui ont apprécié La Dimension des miracles ne manqueront pas de remarquer une vague parenté entre les deux romans, ce qui laisse penser que les admirateurs de Robert Sheckley y trouveront sans aucun doute leur compte. Parfois déroutant mais drôle d'un bout à l'autre, Le Tsadik aux sept miracles est un livre dont on se souvient longtemps après avoir tourné la dernière page et l'on ne peut que regretter la rareté de ce type de récits, à la fois enracinés dans une tradition multiséculaire et dans la prospection science-fictive.

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