Une vie héroïque !
Hind vit dans un monde jeune, encore peuplé des monstrueuses créatures préhistoriques. Il est le dernier de sa race, recueilli au sein d'une grande ville peuplée par de valeureux soldats et d'industrieux ouvriers. Il y a trouvé une sorte de plénitude. Toutefois il est obligé de fuir la cité, accompagné par Ham, un soldat courageux, lorsque les femelles prennent le pouvoir et veulent tuer les mâles pour prendre l'espèce en charge. Partant à l'aventure, ils errent seul dans la gigantesque forêt pleine de dangers pour les infimes créatures qu'ils sont.Ha oui ! Car nos héros sont deux fourmis préhistoriques, c'est important à noter...
Capturés par des fourmis-esclavagistes, Hind retrouve par chance Mâh, une des dernières survivantes de sa race, une femelle encore vierge et pourvue d'ailes. Ensemble et aidés par Ham, ils quittent la ville avec les premiers enfants de Hind et Mâh. Commence une longue marche, vers un occident infini. Le groupe devient horde, tribu puis armée , atteignant le milliard d'individus. Rien ne leur résiste. Ils traquent les cités dans lesquelles les femelles ont pris le pouvoir et massacré les mâles. Ils détruisent tout, même une étrange civilisation de fourmis blanches qui maîtrisent le métal jaune et les outils. La ville merveilleuse est effacée, le peuple décimé, seule la gardienne d'une étrange créature rouge et brûlante est sauvée par pitié. Elle seule - et ces brûlants fils du Soleil qu'elle sait mettre au monde - décidera peut-être de la survie ou de la mort du peuple de Hind.
Les grandes idées se retrouvent...
Oui, bon, encore un livre sur des fourmis... Pas mal, mais c'est du réchauffé, du déjà vu. Bernard Werber nous a déjà raconté en long, en large et en travers la vie de ces magnifiques bâtisseuses, leurs états d'âme et leurs prouesses devant l'adversité. Que peut bien apporter une nouvelle mouture de roman d'aventures de ces bestioles ?
Non, vous n'y êtes pas du tout si vous pensez ainsi. Car Les Formiciens a été écrit en... 1932 ! Soit bien avant que notre amateur d'énigmes en trois dimensions ne soit simplement né. L'histoire contée dans ce livre est unique, originale et en plus, avec le recul des années et des époques, pleine d'un humour, d'un décalage que ne devaient pas ressentir les lecteurs de l'édition originale.
Le texte est bien écrit, bien construit, une sorte de Conan à six pattes. la lecture est fluide et passionnante, bien qu'un peu répétitive dans les actes et les rencontres. Mais ce qui est attrayant, c'est d'analyser comment l'auteur a insufflé une pensée humaine à ses fourmis, avec des désirs, des envies et des haines bien trop éloignées des comportements de ces animaux. Le héros est beau quand il lutte contre les matriarches, pour la liberté de vivre et d'aimer, pour assurer sa descendance face à celles des autres fourmis et finalement vaincre l'obscurantisme.
L'auteur semble tout simplement oublier que de nos jours les fourmis sont dirigées par une Reine et que les mâles ne vivent pas vieux, qu'il s'agit du mode de vie normal de cette espèce. Mais, bah... Ce n'est qu'une fiction et elle vaut le temps que l'on peut passer à la lire.
D'autres avant nous aussi l'ont trouvée d'un intérêt certain. Lors de sa sortie en 1932, le livre a soulevé une petite polémique lorsque Joseph-Henri Boex (J.H. Rosny Ainé de son nom de plume) a voté pour lui lors du jury du Goncourt, créant ainsi un scandale.
Il s'agit du roman le plus connu de Raymond de Rienzi (1890-1971) dont les autres oeuvres ne sont pas vraiment passées à la postérité.