Le scénariste, Serge Perrotin, est enseignant mais à ses heures perdues il est également amateur de bande dessinée. Un jour il franchit le pas et décide de raconter ses propres histoires qui sont plutôt dans une veine science-fictive. Pourtant, c’est grâce à un récit policier qu’il fait ses premières armes, sa série Lance Crow Dog dessinée par Gaël Séjourné, voit le jour chez Le Téméraire, elle est depuis reprise par les éditions Soleil. Il rencontre Chami, de son vrai nom Bernard Jamilloux, grâce à l’entremise de Crisse. Ce jeune dessinateur a d’abord fait l’école Brassart à Tours avant de travailler dans la publicité où il exerce les métiers d’illustrateur, de maquettiste et d’infographiste. Le troisième larron, le coloriste Jean Verney, est infographiste dans une maison d’édition. C’est là qu’il rencontre Gaël Séjourné qui lui propose de travailler sur les couleurs de Lance Crow Dog. C’est naturellement qu’il se retrouve de nouveau à jouer du pinceau pour la nouvelle série de Perrotin, Terra Incognita. A noter que ce premier tome du triptyque que sera Terra Incognita fut à l’origine publié par les défuntes éditions Nucléa². A l’occasion de la sortie du deuxième tome, la toute jeune et dynamique maison d’édition Théloma le réédite.

« Vous serez les 28 survivants, mais aussi les 28 mémoires de l’ancien monde »

2154, la Terre vit ses dernière heures, la guerre totale que s’y livre l’humanité va bientôt signer sa fin. Erwan Le Naec continue malgré tout son travail de journaliste, il s’aperçoit que des descendants des lignées des grandes civilisations disparaissent « proprement », enlevés par un mystérieux rayon lumineux et à son grand étonnement, il sera la vingt-huitième personne du groupe. Ces élus ont été choisis par une entité intelligente pour être la mémoire vive de l’humanité, ils doivent éviter que les erreurs du passé ne se répètent. Ils sont alors projetés 30 000 ans plus tard sur une Terre redevenue vierge et sur laquelle il ne semble subsister aucune trace du monde qu’ils ont quitté. Les rescapés commencent à s’organiser, mais la première nuit dans cette forêt faussement accueillante leur sera fatale. Tous sont égorgés à l’exception d’Erwan, de Jezabel, la seule femme du groupe et princesse Inca, de Sal, un Indien, et de Christobal, également d’origine indienne. Quel peuple peut commettre un tel crime ? Pourquoi seules les personnes d’origine indienne sont épargnées ?

« Vous êtes la seconde chance de la Terre. Vous pourrez reconstruire un monde nouveau… Si vous le désirez… »

Une constatation après la lecture de ce premier tome, pas un instant de répit n’est laissé aux survivants comme au lecteur. Perrotin et Chami nous entraînent dans un monde post-apocalyptique où la Terre, vierge et purifiée, a retrouvé une apparence édénique. Une apparence seulement car le paradis terrestre se révèle très vite être un nouvel enfer pour les survivants. Dans ce récit de science-fiction, aucune avancée technologique, aucun gadget cybernétique, aucune trouvaille génétique, les rescapés devront trouver en eux les ressources nécessaires pour créer un monde nouveau. Ces vingt-huit élus sont les garants de la mémoire de l’ancien monde, ils font tous partie des civilisations qui ont forgé le destin de l’humanité, à eux de ne pas répéter les erreurs de leurs ancêtres. Pourtant dès leur arrivée sur la planète, des tensions se créent, Jezabel, la seule femme du groupe, ne tient pas spécialement à jouer le rôle de reproductrice en chef même pour repeupler la Terre et Erwan se sent un peu exclu du groupe. D’ailleurs, ce dernier est un anti-héros parfait, râleur et boudeur à souhait. Le dessin de Chami vient donner de l’ampleur au récit et pour un premier essai en bande dessinée, il faut dire qu’il maîtrise particulièrement bien ses cadrages. Il prend un plaisir évident à noyer ses personnages sous une végétation luxuriante rehaussée par les couleurs éclatantes de Verney. Un bon premier tome donc qui laisse espérer un triptyque dépaysant. A noter qu’un carnet de croquis vient compléter cette réédition des Survivants.