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Les Yeux de Brume

Tiburce Oger (Scénariste, Coloriste, Dessinateur)
Cycle/Série : 
Langue d'origine : Français
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 31/10/2005  -  bd
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Les Yeux de Brume

Treize ans, c’est pas rien. Et chez le même éditeur en plus. Sans heurt apparent ou presque et un style que l’orgie d’heroic fantasy des années récentes n’aura pas suffi à épuiser. Treize ans de présence à la fois discrète et réputée. Voilà le bilan que l’on pourrait tracer de Gorn, la série phare de Tiburce Oger chez Vents d’Ouest. Alors quand on ouvre ces Yeux de brume sur la première planche, ce paysage d’hiver avec sa perspective, ses pics neigeux et ses inimitables nuages, on sait que l’on risque bien peu de passer un mauvais moment. On est à l’aise ; on reconnaît presque tout comme chez soi. Ce qu’on peut juste espérer en somme, c’est d’être encore surpris.

Eloïse s’en va-t-en guerre

L’hiver est de retour sur les terres de Gorn. Maëlle est désormais prisonnière des prêtresses de Rivas qui comptent bien exploiter ses talents de communication avec les trépassés. Mais tous les mauvais traitements, toutes les drogues ne semblent guère opérer sur la jeune effrontée. Même l’humiliation de son rasage de crâne n’entamera pas sa nature retorse.

De son côté, Eloïse redoute la montée en puissance des Yeux rouges qui ont déjà signé leur retour en même temps que le printemps semble avoir déserté le monde. Et Gorn n’est plus là pour les protéger. A la tête de l’armée de Dame Gorge, Eloïse chevauche en compagnie de Dorian, défiant les envahisseurs partout où ils se manifestent mais jusque quand ? En rêve déjà, Eloïse a vu la mort de Dorian, mais une fin plus douce que celle qu’il va trouver dans les griffes du skroll géant, démantibulé comme un pantin abandonné. A Eloïse seule alors de gagner le temple de Rivas pour y délivrer sa demi-sœur. Une tentative à laquelle les fantômes d’Eliette et de Gorn ne peuvent que se joindre, désertant une fois encore la froidure des murs de pierre.

Fragments de lune égarés sur papier

Huile sur toile en couverture, Tiburce Oger nous convie à ses nouvelles amours. Pourtant, ce dixième tome nettement plus guerrier que Le Chant des elfes (Gorn-9), renoue avec les encrages au noir, plus fins à mon sens, et plus exigeants sur la composition des couleurs, que les encrages sépia adoptés dans le volume précédent. Que le style plus brouillon du Chant des elfes n’ait pas plu ou que l’auteur lui-même ait ressenti la nécessité de revenir à sa technique première, c’est à Oger qu’il faudra s’adresser pour la réponse.

Toujours est-il que ce revirement est pour moi des plus agréables, la lisibilité étant de nouveau au rendez-vous. Les planches du bûcher de Dorian et du temple de Rivas sont des plus réussies, intérieur comme extérieur avec un travail sur le bleu et le vert d’eau assez somptueux, comme Oger sait le faire. Les perspectives inimitables sont toujours la signature d’un auteur en perpétuelle recherche graphique. Le froid s’insinue partout dans les Yeux de Brume, autant de petits morceaux de lune égarés sur le papier, signe que la magie opère toujours.

Alors on pourra reprocher à ce nouvel opus son ‘classicisme’ (si on imagine seulement que le style d’Oger appartienne désormais aux classiques), mais l’auteur ne semble toujours pas avoir épuisé ses ressources de merveilles. Alors sans doute je ne m’émeus plus autant qu’à quinze ans, mais on devra juger que c’est moi qui vieillis, mal comme il se doit, plutôt que Gorn qui s’use. La constance des spectres sans doute...

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