Au XIIème siècle, deux princesses se déchirent pour l'amour d'un homme. Akane jalouse de la beauté de sa sœur la défigure. Celle-ci épouvantée par cette flétrissure se jette dans un lac qui la garde captive. Deux siècles plus tard, une fillette prénommée Setsuko naît sans visage. Source de rejet dans son enfance cette difformité lui vaut un grand succès au bordel qui l'a accueillie. Elle décide de s'enfuir et croise sur sa route Seminaru un peintre aveugle qui, inspiré par son maître, un spectre, peint inlassablement le visage de la même femme. Ils s’éprennent l'un de l'autre et entreprennent un périlleux voyage vers le lac souterrain. Mais Akane envoie une de ses créatures pour leur barrer la route. Ramenés en enfance dans le monde de l'illusion, ils lui livrent un combat difficile. Au début de ce troisième et dernier tome Setsuko confie Seminaru, alors entre la vie et la mort, à des moines et repart seule en quête de la mystérieuse et fascinante inconnue. Un allié inattendu la rejoint. Mais ce renfort inespéré suffira-t-il à effacer tous les ressentiments des protagonistes pour que s'accomplisse la prophétie et qu'enfin soient réunis les amants maudits ?
Une légende japonaise pour inspiration
Jung a débuté avec une série en quatre tomes : Yasuda, chez Hélyode-Lefranc. Le scénario de Martin Ryelandt pour La Jeune Fille et le Vent (trilogie publiée en 1997 aux éditions Delcourt) lui offre une première incursion dans l'imaginaire asiatique. Cet artiste d'origine coréenne signe avec Kwaidan son premier scénario inspiré d'une légende japonaise.
Du chaos au zen
Les règnes végétal et aquatique ainsi que les créatures fantasmagoriques, qui s'incarnent dans l'un des deux personnages, sont très bien rendus. Les fantômes dessinés dans un grisé font penser aux personnages des films d’Akira Kurosawa. Les transformations physiques et mentales parsèment ce récit entraînant l'ambivalence et donc le doute. Des petites cases insérées dans les grandes plus descriptives introduisent de façon saisissante les rebondissements dans l'histoire ou réinterprètent la scène en se focalisant sur la subjectivité d'un personnage. Le cadrage parfois oblique confère une grande dynamique aux déplacements ou aux combats. Le personnage de Toshiro Ikeda apporte une distance ironique à l'intrigue dramatique. Ce conte nous livre une belle réflexion sur le sacrifice et la beauté et se conclue après beaucoup de tensions et de complications sur un dénouement apaisé, proche du zen.
La chronique de 16h16