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Morgane Pendragon - Les secrets d'écriture de Jean-Laurent Del Socorro
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Morgane Pendragon - Les secrets d'écriture de Jean-Laurent Del Socorro

A l'occasion de la sortie en janvier prochain de Morgane Pendragon aux éditions Albin Michel Imaginaire, Jean-Laurent Del Socorro revient sur l'écriture de ce nouveau roman qui aborde cette fois-ci les légendes arthuriennes sous un angle nouveau.

Actusf : Morgane Pendragon, votre nouveau roman sort prochainement aux éditions Albin Michel Imaginaire. Comme auparavant avec Boudicca, vous mettez en scène une femme forte qui doit lutter contre de grands bouleversements dans son pays.
Pourquoi choisir ce personnage ? Que représente-t-elle ?

Jean-Laurent Del Socorro : Cela fait plusieurs années que je veux faire de Morgane l’héroïne centrale d’un livre sur la légende de la Table ronde. C’est dans la continuité de ma démarche littéraire. Après avoir questionné la disparition des personnalités féminines dans notre histoire, je voulais m’interroger sur leur place et les rôles dans lesquels on les cantonne souvent (princesse en détresse, méchantes, sorcières maléfiques, etc.) dans nos contes et légendes. C’est encore une fois ma modeste contribution pour leur rendre hommage et les remettre en avant.

Actusf : Au contraire de Boudicca, dont on peut trouver traces dans l’histoire, Morgane tient plus du personnage mythique et ses attributions et vies peuvent changer d’un récit à l’autre. Comment avez-vous choisi les facettes que vous vouliez explorer ?

Jean-Laurent Del Socorro : Très simple : je voulais Morgane en héroïne de l’histoire, et l’entourer d’autres femmes qui ne soient pas juste des dames de la cour. Il y a ainsi autant de chevalières que de chevaliers autour de la Table ronde, et des reines politiquement influentes.
Morgane est parfois citée comme la demi-sœur D’Arthur, mais je l’ai voulue totalement indépendante. De la même manière je n’ai pas souhaité que ma version de Morgane soit seulement reléguée à sa dimension magique, mais qu’elle se batte, qu’elle commande des armées, etc.

Actusf : Pouvez-vous nous dire quelques mots sur l’intrigue ? Ce n’est pas courant de découvrir quelqu’un d’autre qu’Arthur comme possesseur d’Excalibur.

Jean-Laurent Del Socorro : Là encore, c’est simple : Arthur essaye de sortir l’épée, mais n’y arrive pas. Morgane y parvient et devient reine de Logres car c’est elle la fille d’Uther Pendragon. On peut parler d’uchronie de la légende de la Table ronde.
Des reines et des rois vont reconnaître la légitimité de Morgane, mais pas d’autres qui vont s’y opposer en prenant les armes. La situation se complique encore avec l’arrivée du catholicisme sur l’île de Bretagne.
Morgane et Arthur sont amants, et vont lutter ensemble, entourés de personnes de confiance. Mais les alliances peuvent se briser aussi vite que les trahissons arrivent…

Actusf : Avez-vous fait beaucoup de travail de recherche ? Vous n’avez pas été submergé par les différentes sources et récits ?

Jean-Laurent Del Socorro : Pour l’écriture de ce roman (mon plus gros texte à ce jour) J’ai parcouru quelques 6000 pages de textes du XII-XVIe siècle qui constituent le cœur du cycle littéraire des Chevaliers de la table ronde (Lancelot et le chevalier à la charrette de Chrétien de Troyes, Le Roman du roi Arthur de Thomas Malory).
Alors, forcément, j’ai été un peu submergé par la masse d’information, souvent contradictoires, entre les différents récits. Mais habitué à la recherche historique pour mes autres romans, j’ai appliqué cette méthode à celui-là. Ça m’a permis de faire des tris, mais surtout des choix quand je devais décider quel chevalier garder ou pas, quelle géographie définir pour les royaumes, etc.
J’avais effectivement des relectrices pour mon premier jet, comme à chacun de mes ouvrages. Elles m’ont aidé à valider/invalider mes choix. Je remercie particulièrement Justine Breton (maîtresse de conférences en littérature française à l'Université de Reims Champagne-Ardenne) pour ses conseils et pour avoir fait la relecture de mon manuscrit avec son œil d’experte de la légende de la Table ronde.

Actusf : Outre les combats et la magie, vous abordez un autre sujet qui revient régulièrement dans vos écrits (Boudicca, Du Roi je serai l’assassin), la religion, ici la religion chrétienne. Ces moments charnières sont-ils les moments propices à l’apparition de héros ? Quel est votre regard sur ces bouleversements par les armes. Est-ce inévitable ?

Jean-Laurent Del Socorro : Pour Morgane Pendragon, je voulais pour une fois faire un récit de fantasy épique sans forcément coller à un cadre historique. Mais chasser le naturel… (rires). J’ai voulu vite savoir à quelle époque on était et j’ai choisi le début du VIIe siècle – les âges sombres, ou Dark Ages – et l’arrivée du christianisme sur l’île de Bretagne.
La question de la religion n’était pas tout de suite présente dans mon projet d’écriture initial. Mais là encore, cela m’a permis de réaborder une thématique qui revient en effet souvent dans mes ouvrages : la cohabitation entre les religions.
Je ne sais pas si ces « moments charnières », comme vous dites, sont propices à l’apparition d’un héros. Ils sont en revanche l’occasion de confrontations très fortes, aussi bien politiques qu’individuelles. Dans Morgane Pendragon, la religion est un des nombreux moteurs de d’intrigue, dont la quête du Graal est certainement l’aspect le plus connu.

Actusf : Et maintenant ? Avez-vous d’autres projets en cours et à venir ? Où pourrons-nous vous rencontrer dans les prochains mois ?

Jean-Laurent Del Socorro : Je viens de finir mon deuxième roman pour l’École des Loisirs. Intitulé Vainqueuse, il nous emmènera à Sparte au IVe siècle avant J-C, sur les traces de Cynisca, la première femme à avoir remporté une épreuve aux Jeux Olympiques antiques, celle de la course de char à quatre chevaux. Le livre sortira fin 2023.
Je vais pouvoir attaquer l’écriture d’un nouveau roman. Cela devrait faire plaisir aux fans de Royaume de vent et de colères et de Du roi je serai l’assassin, puisque ce nouveau texte s’inscrira dans cet univers. Il aura pour cadre l’Angleterre élisabéthaine, entre intrigues, magie, sociétés secrètes et, bien sûr, théâtre. Une époque que j’avais commencé à investir avec ma courte novella Noir est le sceau de l’enfer (Didaskalie).
Je recommencerai les festivals en 2023 avec Atrebatia, escales imaginaires les 18 et 19 février au Beffroi d'Arras.

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