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Paroles d'Anges

Jean-Louis Tripp (Scénariste, Dessinateur, Coloriste)
Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 30/04/2005  -  bd
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Paroles d'Anges


Jean-Louis Tripp, né à Montauban en 1958, s’est exilé au Canada où il enseigne la bande dessinée à l'Université du Québec en Outaouais depuis 2003, succédant ainsi à Edmond Baudoin. Il publie ses premières planches dans Métal Hurlant en 1977. Pendant plus de dix ans il publie de nombreux albums dont les aventures de Jacques Gallard (Milan) ou Soviet Zig-Zag (Glénat) avant d’abandonner la bande dessinée pour se consacrer à la peinture et à la sculpture. C’est en 2002 qu’il revient à la bande dessinée grâce à Didier Tronchet avec qui il relance le personnage de Jean-Claude Tergal avec Le Nouveau Jean-Claude (Albin Michel). Il travaille aujourd’hui dans le même atelier que Régis Loisel avec qui il prépare une série qui vraisemblablement s’intitulera Magasin général.

Il paraîtrait, c’est une contre-vérité fortement établie, que les anges, sont asexués

Que nenni, les anges sont des créatures bien plus douées dans les choses de l’amour et du désir que les humains. En voici la preuve par quatre.

Printemps 1958, dans les Cantons de l’Est au Québec, Louise et Réal ont dix-huit ans et d’affreux appareils dentaires. Trop complexés, ils n’osent s’avouer leur amour réciproque. Heureusement, un couple d’angelots, Philibert et Perronnette, vient à leur secours, pas toujours adroitement certes, mais l’essentiel est que l’entreprise finale réussisse.

Eté 1982, Ginette et Eric sont installés ensemble depuis trois mois dans le quartier de la Petite Patrie à Montréal. Ginette croit avoir rencontré l’homme de sa vie, celui avec qui elle se mariera, aura de beaux enfants, son prince charmant en vérité. Mais Eric ne la désire pas, Adonis va lui faire prendre conscience de son homosexualité et va l’aider à faire son coming out tandis qu’Epiphane va s’incarner sous les traits de l’homme qu’il a toujours aimé.

Automne 2004, Ginette a rencontré Sylvain un an après sa rupture avec Eric, ils se sont mariés et ont eu un beau garçon Jimmy. Puis les années ont passé et ont terni la passion, l’insidieuse routine s’est installée. La simple présence de l’ange Zotic aux côtés de Ginette va rallumer le feu presque éteint.

Hiver 2005, Louise et Réal, nos deux amoureux timorés sont au crépuscule de leur vie. Le temps s’écoule lentement. Désormais à la retraite, ils vivent au chalet dans les Laurentides et attendent des amis rencontrés en Floride. Un bien joli petit ange prénommé Hypoline va leur redonner goût aux saveurs oubliées de la chair qui leur feront vivre un second printemps.

Un album pour redonner le goût du désir et du plaisir… de la lecture…

Ce one shot de Jean-Louis Tripp est un petit bijou d’humour joliment irrévérencieux et gentiment érotique. L’on suit ces personnages à la vie triste et terne qu’éclairent soudain de leurs facéties sensuelles nos chérubins qui prennent très à cœur la vie sexuelle des humains. Comme le dit si malicieusement Isabelle Motrot dans sa préface « Que l’amour soit du ressort de Dieu, certes, l’affaire était entendue… mais que le sexe soit du domaine des anges, voilà bien un truc qu’on ne nous avait pas appris au catéchisme. » L’album découpé selon les quatre saisons, métaphores des quatre âges de la vie, est totalement muet ce qui lui confère un charme supplémentaire. Les personnages s’expriment par pictogrammes, des petits dessins sont parfois plus éloquents qu’un long discours et Tripp en fait la brillante démonstration. Son dessin réaliste et généreux rend parfaitement les émotions des personnages qui habitent au sens propre les cases de l’album et croque ces petits instants de vie teintés de fantastique.

L’auteur crée un album drôle (l’une des planches les plus sympathiques met en scène notre couple de Séraphins, après d’infructueuses tentatives dans le rapprochement de Louise et Réal, venu demander l’aide du Tout-Puissant. Celui-ci leur fait comprendre, fort judicieusement, qu’il a bien d’autres problèmes à régler dans ce bas monde – guerre, famine, fanatisme religieux – que les affres amoureux dus à un appareil dentaire) et résolument positif. Avec un sens de la narration d’une efficacité sans faille, une imagination débordante, une tendresse et une volupté loin d’un quelconque carcan rigide et moraliste, Tripp offre une bande dessinée insolite, savoureuse et revigorante.

 

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