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Sénéchal, Grégory Da Rosa se livre.

Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 01/01/1970  -  livre
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Sénéchal, Grégory Da Rosa se livre.

Actusf : Sénéchal est votre première parution. Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? Comment en êtes-vous arrivé à l'écriture ?
Grégory Da Rosa : Avec plaisir !      
Grégory Da Rosa, jeune homme de 28 ans, vivant en pays héraultais, lecteur de romans de fantasy et historiques, jadis étudiant en géologie et hydrologie, aujourd’hui chômeur, ou plutôt auteur. Et étant donné que c’est ce dernier point qui nous intéresse, allons-y gaiment !
L’écriture m’est tombée dessus lorsque j’avais 13 ans, après la lecture des deux premiers volumes de la saga Harry Potter. Je n’ai jamais cessé depuis. Bien sûr, il y a eu des petites coupures de quelques mois sans écrire la moindre ligne, mais la plume n’est jamais partie bien loin. Autant dire que je n’ai pas lésiné sur la besogne pour fourbir mes armes. Il m’aura quand même fallu attendre une petite quinzaine d’années avant de créer une vraie histoire, mûre, solide, réfléchie, avant de trouver ma plume suffisamment adulte, fluide et… jolie. Encore que ! il m’arrive parfois d’en douter. Mais ça, le doute de l’auteur, c’est une autre question !  

"Ainsi, si la religion a autant d’importance et se rapproche autant du christianisme, c’est parce qu’elle me permet d’une part d’exacerber le réalisme de l’histoire, d’autre part de mettre à mal le manichéisme... "

Actusf : Dans cette trilogie, nous sommes clairement dans un monde médiéval fantastique. Mais certains personnages et caractéristiques font clairement penser au nôtre. Je songe par exemple au clergé, aux démons et aux anges ou encore à l'ordre des chevaliers du Syncral (inspirés des Templiers?).
Est-ce voulu ?

Grégory Da Rosa : Tout à fait ! Et si ça ne l’était pas, ça serait inquiétant, tant les ressemblances sont frappantes.
L’ordre du Syncral est en effet inspiré de l’Ordre du Temple, notamment de par sa structure, sa hiérarchie, sa croyance, mais il s’inspire également du Saint Graal, de par ses sonorités d’abord, de par la véritable quête qui en découle ensuite. Car si l’ordre du Syncral se nomme ainsi, c’est bien parce que les chevaliers qui le composent sont justement en quête dudit Syncral. Ça, le lecteur ne le sait pas encore, mais le découvrira bientôt (Ne vous inquiétez pas, je ne « divulgâche » pas. En tout cas, pas trop.)
Quant à la religion que je nomme la Syncrésie, elle est une sorte de Christianisme fantasmé avec ses anges, ses démons, son Église, son Enfer et son Paradis. Dans un monde que j’ai voulu résolument médiéval, je voulais garder les 3 ordres de la société féodale : Belladores, ceux qui font la guerre (noblesse), Oratores, ceux qui prient (clergé) et Laboratores, ceux qui travaillent (tiers-état). Dans Sénéchal, le premier ordre est représenté par le roi Edouard et sa suite de courtisans, dont le chancelier Othon de Ligias. Le deuxième a comme figures l’archisyncre Boniface III et le séraphin Démosthène. Quant au troisième, c’est justement Philippe Gardeval, grand sénéchal de Méronne, bourgeois, et donc de la roture, qui s’en fait le porte-parole.
Ainsi, si la religion a autant d’importance et se rapproche autant du christianisme, c’est parce qu’elle me permet d’une part d’exacerber le réalisme de l’histoire, d’autre part de mettre à mal le manichéisme... Cette envie commence dès la genèse du monde, lorsque je décide, en tant qu’auteur, de revisiter les notions d’Enfer, de Paradis et de Terre. Dans mon univers, ces trois lieux ne sont pas situés sur des plans spirituels différents (bénéfique, neutre ou maléfique), mais tout simplement dans le même système solaire : ce sont trois planètes distinctes. Les anges ne sont pas des êtres éthérés qui visitent les humains de temps à autre en proférant la bonne parole, mais des personnes physiques, capables eux aussi des pires travers. Dans cette même idée, les démons ne sont pas des êtres foncièrement diaboliques, et s’ils sont considérés comme étant des démons (terme religieux), c’est peut-être la faute de certains écrits dits saints véhiculant une sorte de bien-pensance purement subjective. De fait, dans l’univers de Sénéchal, je décide d’abattre ce manichéisme en faisant se heurter les trois planètes dans un cataclysme dantesque et de reconstruire, avec les débris restants, une seule et même terre plate sur laquelle vivent toutes les ethnies. C’est une bien belle tambouille, une cohabitation forcée que la Syncrésie, avec ses beaux principes, continue d’interdire néanmoins.
La dernière raison d’être à cette religion ressemblant fort au christianisme est plus personnelle. J’ai été élevé dans une famille catholique, fait quasiment toute ma scolarité dans des écoles catholiques, et cela, très tôt, a soulevé en moi des interrogations, des remises en question, de la fascination et de la répulsion tout à la fois. Il y a quelques années, si l’on m’avait demandé quel était, selon moi, le plus célèbre roman de fantasy jamais écrit, j’aurais répondu sans hésiter : la Bible. Je ne pouvais donc pas résister à la tentation de revisiter tout ça et d’y mettre mon grain de sel !

Actusf : D'ailleurs, ce n'est vraiment pas une situation facile pour Philippe Gardeval, surtout que celui-ci commence à avoir de l'âge. En effet, ce n'est pas si courant d'avoir un héros usé. Car en plus de la cité à défendre, il doit gérer les complots et la politique intérieure. Sacrée charge ! Pourquoi ce choix ?
Grégory Da Rosa : Écrire un personnage qui commence à prendre de l’âge est, certes, peu courant, mais je ne l’ai pas écrit dans l’optique d’être « original » comme on dit si bien dans le jargon. Je ne jure pas sur une prétendue sacro-sainte originalité, mais sur une sacro-sainte cohérence. Et il m’a semblé qu’un personnage relativement âgé (rappelons qu’il n’a quand même que 43 ans) était l’âge parfait : celui où l’on commence à faire le bilan de sa vie sans pour autant qu’elle soit achevée ; l’âge où le poids des années commence à se faire sentir, où l’on est désabusé, parfois déçu par les innombrables gens déjà rencontré, peut-être même un brin aigri, pris d’un nombre certain de remords et de regrets. Pourtant, c’est aussi l’âge de l’expérience, où l’on a appris de ses erreurs, devenu vieux briscard à qui on ne la fait plus. On peut alors s’en servir pour reconstruire autre chose, ou du moins, agir différemment, car tout est encore possible. La quarantaine, c’est un âge charnière. Et justement, pour Philippe Gardeval, cette situation d’extrême urgence : ce siège, ces complots, la remontée des secrets, permet d’impulser ce changement. Reste à savoir s’il agira comme il faut ou s’il restera bloqué dans son passé.
Ensuite, en ce qui concerne ses multiples charges (guerre à mener, politique intérieure et complots), je dirais que j’aime tout simplement noyer le poisson, mais pas que !
Premièrement, il y a des raisons d’efficacité. J’ai choisi d’avoir un personnage narrateur. Cette narration à la première personne permet de donner très rapidement vie au protagoniste qui parle, certes, mais il réduit également le champ de vision du lecteur. Or un champ de vision réduit, c’est une affaire complexe à gérer, surtout si l’on souhaite développer la géopolitique, les différentes cultures, la densité et la vastitude de l’univers. Problème que l’on ne possède pas avec un narrateur omniscient, grâce auquel on pourrait allégrement glisser des info-dump en veux-tu en voilà. De fait, avoir un personnage au centre de tous les choix globaux, de toutes les problématiques, de tous les pouvoirs (politique, militaire, religieux et magique) me permet de condenser toutes ces informations de manière crédible et cohérente, et les exposer au lecteur par le biais d’un personnage qui, de par sa charge, sait et doit savoir.
Deuxièmement, comme je le disais, j’aime noyer le poisson. Il y a des intrigues dans l’intrigue. Est-ce l’histoire d’un siège que nous suivons ou l’histoire du sénéchal Philippe Gardeval ? Est-ce l’histoire d’une guerre de religion ou d’une guerre entre officiers de la couronne ? Quelle est l’intrigue principale ? Dans ce roman, il y a des enjeux globaux, des enjeux locaux et des enjeux personnels. Et si tout était lié ?


"Un auteur ne doit pas proposer des réponses aux problèmes de société, ni même une morale, mais simplement soulever des questions, et de toute sorte."


Actusf : Finalement, même si nous sommes dans un roman de l'imaginaire, vous abordez des problématiques très actuelles comme le fanatisme et les conflits idéologiques. Est-ce qu'à travers Philippe, vous avez voulu parler de sujets qui vous tiennent à cœur ?
Grégory Da Rosa : Oui et non.
Dans ce que j’écris, je ne cherche pas à dénoncer quoique ce soit, ni à insérer une morale qui n’appartiendrait qu’à moi. Un auteur ne doit pas proposer des réponses aux problèmes de société, ni même une morale, mais simplement soulever des questions, et de toute sorte. Il ne doit pas critiquer le monde dans lequel il vit, mais le décrire. Et c’est en le décrivant – même à travers le prisme de l’imaginaire – que le lecteur se fera ou non sa propre critique. Mes personnages ont tous des opinions, des valeurs, des idéologies différentes. Et ce n’est pas parce que j’ai choisi Philippe Gardeval comme personnage narrateur que je partage ses opinions, loin de là.
Ces sujets d’actualité sont, en premier lieu et pour dire le vrai, une source d’inspiration. Ils ont un rôle purement scénaristique, car je cherche avant tout à dérouler une histoire, pas à écrire un essai ni un pamphlet. Ils sont donc le socle sur lequel je pose mes intrigues. Ils permettent aussi d’amener des motivations supplémentaires à mes personnages. Le fanatisme, notamment, apporte une motivation autre que les sempiternelles jalousies, ambitions personnelles ou vengeances.

Actusf : Au niveau de la création, lorsque vous écrivez, vous avez toujours un plan ou laissez-vous votre plume vous guider ?
Grégory Da Rosa : Tout dépend de l’évolution de mon histoire, si j’en suis à ses prémices ou vers sa fin.
Au début, lors de la rédaction du premier tome, j’avais déjà la conclusion de la trilogie en tête sans savoir exactement comment j’irais du point A au point Z. J’ai donc laissé libre cours à mon inspiration, à ma plume, me suis laissé surprendre par des personnages non prévus. Par exemple, en démarrant le roman, je n’avais aucune idée de l’existence de Roufos. Pire, je ne savais même pas que le sénéchal Philippe Gardeval avait un fils, Charles. Tout ça s’est dessiné naturellement, au fil de l’écriture, sans que j’y réfléchisse vraiment. Ces surprises que je me réservais à moi-même me permettaient de toujours garder la motivation pour écrire car, lorsque je suis aux balbutiements d’une histoire, l’abandon peut survenir n’importe quand, faute d’intérêt.
En revanche, lorsque j’ai eu à écrire le deuxième volume, j’avais alors, en plus de la conclusion de la trilogie en tête, la matière du premier tome en main. Peu à peu, tout s’est agencé de façon logique, et un plan de plus en plus précis a vu le jour. Le libre arbitre que pouvait posséder mes personnages aux prémices de l’histoire est inexistant aujourd’hui. Leurs chemins convergent tous vers la conclusion.



"Je commence à faire de grosses recherches pour un prochain roman. Un roman qui sera toujours situé sur la Plaine Céleste, monde dans lequel évolue Philippe Gardeval, mais dans une région différente et à une époque différente."

Actusf : Quels sont vos projets actuels et futurs ?
Grégory Da Rosa : Je commence à faire de grosses recherches pour un prochain roman. Un roman qui sera toujours situé sur la Plaine Céleste, monde dans lequel évolue Philippe Gardeval, mais dans une région différente et à une époque différente (150 à 200 ans plus tard). Je vais quitter l’inspiration « médiéval occidental » pour me diriger vers des inspirations bien plus orientales. Il y aura des terres arides, des déserts, un océan et des navires, la civilisation varake et archaïanne, l’immensité et la puissance du Grand-Vide, ainsi qu’une ville suspendue au bord du monde. Je quitterai aussi le principe du personnage narrateur pour éclater la narration entre plusieurs personnages, ce qui me permettra de jouer sur un terrain différent : un roman bien plus épique qu’intimiste. Ce sera un nouveau défi (d’envergure, m’est avis !).
 
Actusf : Où peut-on vous retrouver dans les mois à venir ?
Grégory Da Rosa : Je serai présent du 23 au 25 mars au salon de l’Imagina’Livres, à Toulouse.

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