Grand nom de la Science-fiction, Robert Heinlein, mort en 1988, a reçu quatre prix Hugo. Son premier roman, Sixième Colonne narre la résistance d'un petit groupe d'américains face à l'invasion totale des panasiates aux Etats-Unis. Réfugiés dans une citadelle secrète, leur territoire est devenu un gigantesque camp de concentration. Numéro d'immatriculation, rationnement, matons sont au menu.
Les ingrédients d'une époque
D'une manière générale, Sixième colonne ( 1941) représente le bon côté de la Grande époque de la SF américaine. On pense à Clarke, Dick, Van Vogt, Asimov, Matheson. Une situation initiale captivante. Une écriture simple qui vise à l'efficacité. Des idées clairement exposées. Une progression scientifique, sur des postulats solides suivie de découvertes inventives. On débute dans un huis clos bien senti où l'on apprend la terrible nouvelle. La Citadelle, dernier bastion scientifique qui aurait pu créer la différence, vient d’acquérir son autonomie absolue – tout le commandement est tombé. Le messager, Artmore, découvre en arrivant la moitié du personnel mort. La situation est au bord du gouffre. Cette simplicité et cet à-propos contraste avec la tendance moderne qui emprunte la voie de la Fantasy et de ses pavés assomants. C'est extrêment agréable. Et l'image percutante des Etats-Unis asservis à dû à l'époque créer son effet.
Du moins jusqu'à la première moitié du premier chapitre l’histoire a ce parfum. Puis le poids de l'âge se fait sentir et l’illusion s'écroule. Le contenu, le dévellopement nous font vite oublier le frisson d'intéret et le chame entraperçu pour un ennui complet.
Bilan indigeste
Nous parlions d'une époque et des qualités d'un genre. Au-delà de cela, Sixième colonne reste un roman affligeant. Sa seule qualité irréprochable demeure la clarté et un sens du récit. Ensuite c'est un festival d'improbabilité. Mesurons l'étendue du drame de cette naïveté assumée ( désavouée par la suite) avec la plus grande rigueur scientifique: six hommes vont sauver le monde face à des milliards d'envahisseurs. Au hasard : une arme mortelle sur des ondes qui choisissent une cible selon le rayonnement racial, un système d'espionnage basé sur la religion, un système de propagande basé sur la publicité. En somme des rouages psychologiques grotesques, preuve flagrante d'un manque de maturité. Ces deux dernières idées ne sont pas anodines : la manière dont les expose heinlein on comprend que ce sont des éléments psychologiques qu'il a compris et qu'il veut mettre en oeuvre. En cela c'est assez pathétique, car tel sera le contenu du livre pour les idées. Et ce n’est pas le décalage avec l’époque qui veut ça ( un dick ou un van vogt feront l'affaire) : juste une étouffante fermeture d’esprit et une réflexion trop peu intuitive. A l'image des personnalités des protagonistes sculptées dans des stéréotypes surannées. Heinlein est un jeune auteur. On sent le reflet d'une réflexion rigoureuse à qui fait défaut la finesse. En fin de compte il est tellement hors de propos que le livre devient involontairement la parfaite parodie de l'âge d'or de la SF.
Les premiers faux pas inhérents d'un genre
La SF est la littérature découlant de la structure d'esprit du mathématicien et du scientifique. Il n'est pas rare que cette soif de connaissance technique se couple d'un manque d'intérêt, de pertinence ou de considération pour l'élement humain. Ce fut même pendant longtemps dans les deux camps une opposition farouche qui demeure aujourd'hui dans les epsrits les plus obtus. Quelles qu'en soit les raisons, la sf possédait bien à ses débuts ce symptôme indécrottable. Elle justifia son existence et fut acceuilli par une certaine tranche par l'engouement qu'elle sucitait en proposant quelque chose de nouveau en littérature. Mais cet aspect resta longtemps une de ses limites et peut-être ce qui dans le fond a fait railler si vigoureusement le genre. Son talon d’Achille. Ce roman nous rappelle que ceux qui ont su dépasser cette barrière sont devenus les livres cultes, des monuments de la littérature contemporaine. Le temps nous montre aussi que les écrivains qui ont relevé le dur pari d'une extrapolation scientifique crédible, durable et esthétique passaient, paraxodalement, par le biais de la compréhension humaine. Cette dichotomie absente ici ne fait de Sixième Colonne qu’un livre pénible à lire. Conseillé aux très jeunes pour son ambiance. Mais ce n'était que le premier essai romanesque, désavoué par son auteur, d'un écrivain qui associera à jamais son nom au genre pour son apport et qui passera les dîtes barrières.