Sortilèges

Sortilèges

Pour le second numéro de leur anthologie thématique, les éditions de l’Oxymore ont décidé d’aller explorer toutes les arcanes de la magie. Et il y avait fort à faire à la vue des neuf différentes nouvelles sur le sujet qui se cachent derrière la superbe couverture de Ruby ! Pour les amateurs, il y a même une partie analytique, diablement trop courte (un article et une bibliographie, c’est peu).

Sérieux...

S’il faut faire des distinctions, je dirais qu’il y a deux types de nouvelles dans ce recueil. D’une part, les auteurs « sérieux ». Ici l’ambiance est primordiale au bon exercice de la magie. Que ce soit Charles de Lint et ses Oiseaux ou la réécriture de La belle au bois dormant de Tanith Lee, on sent que le rythme et le style du récit et tout aussi important que la trame. Il faut s’y plonger totalement pour les savourer complètement. Parfois même, ces nouvelles proposent un peu de réflexion et de morale. Par exemple, Michelle West, avec Sacrifice, a brodé sur le thème du « tu ne peux pas avoir de pouvoir sans laisser quelque chose de toi-même ». Grosso modo, à chaque fois qu’elle a besoin de faire appel à la magie pour améliorer sa vie, son héroïne doit faire un sacrifice qui lui coûte. Classique mais efficace. Toujours dans l’ambiance décalée et imposante, on peut noter aussi Véra de Villiers de l’Isle Adam. Les éditions de l’Oxymore ont été déterrées avec beaucoup de goût cette histoire du siècle dernier de cet homme qui se leurre en se persuadant que sa jeune femme morte est toujours vivante. Ce texte a ce petit charme suranné qui plaira à certains mais qui ne manquera pas de laisser froids les autres.

Pas sérieux...

D’autre part, il y a les auteurs qui ont choisi de traiter le sujet avec humour. A ce petit jeu-là, on peut distinguer Eric Boisseau et Fabrice Colin, ce dernier remportant la palme du délire. Sa nouvelle, dans laquelle un père cherche à savoir où passent les lapins lorsqu’ils disparaissent dans les chapeaux des magiciens, est un véritable petit bonheur. On y retrouve toute la verve de son auteur pour notre plus grand plaisir et son sens de l’absurde. Dans la même veine, Eric Boisseau joue plus sur la Satire. Imaginez que la confédération des sorciers de Grande Bretagne a trouvé un « élu » parmi ses troupes. Une nouvelle inacceptable pour les autorités françaises qui décident aussitôt de partir à la recherche de leur messie pour combattre les forces des ténèbres. Malheureusement, le sauveur est un bien piètre magicien… Une nouvelle sympathique qui vous fera sourire.

Au final, ce deuxième numéro d’Emblèmes est plutôt réussi. A peine regrettera-t-on le classicisme de certaines histoires (et encore, tout n’est affaire ici que de jugement et cela ne concerne que deux ou trois textes ; mais par exemple, pas de traces de magie chamanique dans le recueil) et la partie analyse qui ne fait que survoler le sujet. Pour le reste, l’ensemble est plaisant et ravira tous les amateurs de nouvelles et de magie.