La jeune fille et les clones
David Brin est un de ces auteurs américains qui écrivent une science-fiction à base de " science dure ", où nos connaissances et découvertes actuelles en physique et/ou en biologie sont les ferments de récits imaginaires. J'avoue un certain penchant pour cet auteur, pour deux raisons principales :
- premièrement, c'est un vrai scientifique (diplômé de physique et docteur en philosophie) qui sait de quoi il parle quand il nous entretient de physique spatiale, d'évolution ou d'exobiologie.
- deuxièmement, c'est un écrivain doué et prolifique (avec plus de quinze romans à son actif, de nombreuses nouvelles non traduites, et des prix en veux-tu en voilà). Un véritable artiste de la mise en scène maniant le suspens avec dextérité. Dans La jeune fille et les clones, ces qualités transpirent à nouveau.
Une paire de jumelles qui voient loin
Maïa et sa sœur Leie connaissent le destin peu enviable des enfants vars. Aucune chance pour elles de s'élever dans l'échelle sociale du monde pastoral de Stratos, aussi rigide qu'une solive de châtaignier baignée dans le calcaire. Car sur Stratos, le décor est immuable. Seules les filles clones ont le droit d'occuper la " niche " de leur mère dont elles sont les parfaites répliques, assurant par là l'immortalité de leur identité. Ce sont des filles d'hiver. Conçues à cette époque de l'année où les femmes se reproduisent par parthénogenèse (un peu à la manière des abeilles), invitant les hommes à offrir leur semence dans le seul but d'activer la formation de leur placenta, mais sans mélanger leurs gènes.
Maïa et Leie n'ont pas eu cette chance. Elles ont eu un père. Un vrai père d'été dont elles ont hérité la moitié de leur identité, sans l'avoir jamais connu. Et comme les hommes, les descendants estivaux (les " vars ") sont la lie de la société.
Mais les deux sœurs ont ceci d'extraordinaire qu'elles sont jumelles. Parfaitement symétriques. Et comme elles sont plutôt rusées, un plan a germé dans leurs cervelles connexes de sillonner le monde en usurpant le statut de filles d'hiver.
Deux jumelles montent sur un bateau…
Malheureusement, leurs plans sont ruinés par la disparition de Leie lors d'une tempête. Maïa, désemparée, va tâcher de prendre son destin solitaire en main. C'est sans compter sur le hasard qui la place au centre d'une conspiration mondiale. Il y a peu de temps en effet qu'on parle d'un messager extraterrestre, dont le vaisseau en orbite ajoute un point lumineux aux ténèbres stratoïnes déjà pourvues en lunes nombreuses et colorées. En fait de messager, il s'agit d'un homme. Tout simplement. Mais un homme dangereux, ignorant les règles strictes qui entourent son genre. Un danger public, en somme, pour toutes les extrémistes anti-hommes.
Maïa n'en a cure. Elle le comprend mieux que quiconque, mais ne pourra profiter de son amour car il lui sera ravi en même temps que son enfance. Quel peut bien être le message de ce visiteur pour le rendre si précieux aux yeux de toutes les grandes familles de Stratos ?
Un roman d'aventure exotique
La jeune fille et les clones est un livre étonnant. Un tant soit peu décevant du point de vue de son contenu de science-fiction pure qui est un peu caricatural voire poussif. Il nous emballe tout de même par des trépidations et un rythme infernal dignes des meilleurs films d'aventure et de piraterie. Ce style est servi par l'exotisme du monde de Stratos et quelques idées géniales (le " jeu de la vie ", espèce de parodie des automates cellulaires, en est le meilleur exemple), de sorte qu'on le lit avec goût. On regrettera juste une fin qui semble appeler une suite.