Le Masque de la Mort Rouge et autres nouvelles fantastiques
Pour qui ne connaît pas encore Edgar Allan Poe, sachez que vous êtes ici en présence d'un des fondateurs du fantastique, le maître incontesté du cauchemar et de l'humour noir, à côté de qui Tim Burton passerait pour le scénariste de la Petite Maison dans la Prairie. Les Etats-Unis du 19eme siècle n'ont pas reconnu tout d'abord ce génie du fantastique et du policier et il lui a fallu trouver un public en France pour que son talent soit enfin estimé à sa juste valeur.
Mort en 1849, à 40 ans, Edgar Allan Poe a passionné ses contemporains, en particulier Charles Baudelaire puis Stéphane Mallarmé qui reconnurent à l'auteur américain un génie exceptionnel et un travail poétique, critique et littéraire de véritable précurseur. Après une vie de misère et d'éthylisme, Poe a laissé peu de romans, un bon nombre de nouvelles et quelques poèmes (dont Le Corbeau, Ulalume, Les Cloches, Annabel Lee, Pour Annie).
Un recueil indispensable
Le Masque de la Mort Rouge, recueil d'une vingtaine de nouvelles, pour la plupart traduites par Baudelaire… Parmi celles-ci, les plus célèbres, le Chat Noir et La Chute de la Maison Usher, exaltent une vision particulièrement morbide et romantique de Poe. La traduction de Baudelaire, intemporelle, ajoute une touche au style déjà riche, englobant et comprenant son humour et son sens du verbe. On sent dans cette traduction, non seulement la tournure de notre poète national, mais également son appréhension de l'auteur : poète maudit, torturé, génie méconnu. Sous le récit maîtrisé de Poe (en particulier dans Ne pariez jamais votre tête au Diable et le Chat Noir), malgré les caches et les labyrinthes analytiques propres à l'auteur, se dessine déjà la fin proche, une fin digne de ses récits les plus terrifiants et les plus insalubres. " Le fantastique ne vient pas d'Allemagne mais de l'âme. ", écrivait-il. Effectivement, on entre ici dans l'univers de l'âme aspirée et souffrante. Véritable condensé de la poétique du 19eme, et pourtant étrangement intemporel dans la narration (signe d'une véritable vision), on ne peut que se laisser absorber, en découvrant ou redécouvrant certaines nouvelles, par son extrême maîtrise du lexique du ressenti et de la peur.
Une édition de Poe dans une collection inhabituelle
Les recueils d'Edgar Poe n'ont jamais été structurés par lui et par conséquent ont souvent été ordonnés de manière aléatoire. Folio SF publie donc un recueil reprenant les nouvelles les plus représentatives du poète-conteur, édité jusqu'ici en Classique. Le choix du titre (l'une des nouvelles, évidemment) et l'organisation du recueil attestent sans doute d'une envie du directeur de collection de le faire découvrir à un plus large public, moins conventionnel et peut-être rebuté jusque là par l'estampillage " classique " ou " scolaire " de l'auteur. Ou peut-être simplement le plaisir de rééditer l'un des maîtres du fantastique américain, dont Baudelaire, maintenu de nos jours dans la réputation du " bon goût " littéraire français, s'est inspiré tout au long de son œuvre…
Pour les néophytes : A dévorer
Pour les puristes : Une excellente réédition de Poe