Le Bal des vampires

Le Bal des vampires

Voici le tant attendu quatrième tome de la série Requiem de Mills et Ledroit. Les deux acolytes, qui s'étaient déjà taillé la part du lion avec Sha, leur précédente série, ont carrément conquis les étalages des librairies grand public, avec ce cycle où un officier SS se réincarne en vampire dans un monde alternatif franchement gothique : le monde de Résurrection, où le temps s'écoule à l'envers. Pourtant, sorti chez une maison d'édition plutôt cryptique, avec un dessin et des couleurs excessifs, une mise en scène aussi audacieuse, Requiem semblait voué aux seuls aficionados d'Olivier Ledroit. Enquête sur une série qui déjoue les pronostics...

"J'ai troujours trouvé le 'style' rébarbatif et oiseux..."

Heinrich, devenu Requiem le chevalier vampire, a enfin retrouvé son amante Rebecca, sous les traits de Torquemada, la chef lémure, ennemie héréditaire de la caste des vampires. Mais la victoire des troupes de Dracula face aux lémures a un goût amer pour Requiem, qui se voit aussitôt ravir celle qu'il aime, qui doit être offerte en sacrifice avec ses pairs au lige du royaume de Draconia. Aussi va-t-il tenter de profiter du bal des vampires pour la faire échapper à son funeste destin.

Et tandis que les chevaliers vampires festoient à bord de la flotte draconienne, d'autres continuent leur entreprise de trahison de Dracula. Au coeur des pyramides renversées du royaume de Thanatos, Black Sabbat se fait de biens étranges alliés dans son projet remplacer le comte Dracula par Sire Cryptus à la tête de l'état de Draconia .

"...parce qu'il distrait de l'atroce beauté d'un carnage irraisonné"

À la suite des précédentes chroniques de Requiem, j'ai reçu pas mal d'avis de lecteurs plus ou moins pertinents, mais qui relevaient de façon assez unanime ma "dureté" à l'égard de la série. J'avoue ne pas avoir été tendre avec le tome 3 (Dracula) notamment, ce qui ne signifie en rien que j'avais rangé la série au rayon des irrécupérables (au contraire des Chroniques de la Lune noire, par exemple, initialement mises en lumière par le même Ledroit). Mais Requiem est un projet audacieux, autant du point de vue scénaristique que dans le trait, et quand des auteurs de bande dessinée prennent autant de soin à vous faire comprendre qu'ils ne sont pas là pour faire semblant, on a souvent tendance à avoir la dent dure. Tout cela pour dire que, sans renier mes avis précédents, je suis plutôt content de ce que j'ai trouvé dans ce quatrième volume de la série : mes craintes à l'égard d'une répétition des apparitions de monstres tous plus exotiques les uns que les autres et s'étripant joyeusement sont atténuées par un épisode où le volume narratif est largement au-dessus des deux précédents.

Pour ne rien gâcher, on retrouve un Ledroit au meilleur de sa forme et d'une étonnante lisibilité. On trouve dans Le Bal des vampires des planches d'une magnificence sans bornes et on s'étonne encore de voir la technique d'un Ledroit, déjà irréprochable, s'affûter encore au cours des épisodes successifs. Un petit regret quand même : le côté très "Methraton" de l'Archi-Hiérophante de Thanatos, et la tendance à la systématisation du trait de Ledroit qui restreint sa gamme de formes et de personnages. Un bon cru en tout cas, qui remet dans le droit chemin une série allant à vau-l'eau.