La Partie se joue dans le noir

La Partie se joue dans le noir

Écrivain britannique de la fin du 19e et du début du 20e siècle, Ernest Bramah fut également journaliste et éditeur. Il est l'auteur de textes de fiction, de recueil de contes chinois, de romans politiques et humoristiques et de nombreuses nouvelles. C'est au cours d'une pièce de théâtre policière que née l'idée d'un détective privé aveugle dans l'esprit d'Ernest Bramah. Impressionné par la façon qu'ont les aveugles de surmonter leur infirmité et par les "contorsions des esprits malhonnêtes", il imagine le personnage de Max Carrados. Ainsi, entre 1911 et 1913, l'auteur écrira douze nouvelles dont huit sont publiées dans ce recueil. Par la suite, Ernest Bramah publiera d'autres intrigues et un roman (The Bravo of London, 1934) mettant en scène ce drôle de personnage.

Dans La Partie se joue dans le noir, titre emprunté à la dernière nouvelle du recueil, l'auteur "présente" son personnage. Une introduction fort intéressante et drôle à la fois où il explique comment on arrive à jouer "sur le caractère absurde de la conjonction d'un homme atteint d'une telle infirmité et d'une occupation qui passe pour être particulièrement visuelle".

Huit intrigues policières

Le Tétradrachme de Denys ouvre ce recueil sur une sombre histoire de pièce volée. Louis Carlyle, détective privé, fait appel à Max Carrados, numismate, pour l'aider à expertiser une ancienne pièce de monnaie. Ainsi, commence la carrière de détective amateur de ce héros aveugle. Escroc professionnel, terroriste indien, mari cupide, héritière étourdie, acteur perfide, voisin rusé... Tous verront leurs plans tortueux déjoués au fil des nouvelles par l'esprit infaillible de Max Carrados.

Ce surprenant recueil se termine sur la nouvelle éponyme, plutôt drôle, du malfaiteur armé qui se retrouve dans la seule situation où il ne peut rien contre un aveugle même désarmé: une pièce obscure.

Une forte personnalité pour un héros tranquille

Les intrigues de ce recueil ne tiennent pas sur l'originalité du crime, mais sur la forte personnalité de Max Carrados et sur le cheminement de son esprit qui le mène sur les traces du criminel. En général, l'aveugle est associé à l'ignorance, à l'incapacité d'agir, mais ici, Ernest Bramah présente son personnage comme celui qui ignore les apparences trompeuses du monde qui l'entoure. Il voit d'autres choses avec la clairvoyance que n'ont pas les voyants. Avec des qualités extraordinaires, -en effet étant aveugle, ce détective amateur a développé ses autres sens au-delà du normal et même un "sixième sens indéfini", qualifié ainsi par Ernest Bramah lui-même-, Max Carrados est un vrai personnage de fiction et on ne pourrait demander à un aveugle dans la réalité de développer de tels dons.

En tant que lecteur, on laisse notre crédulité de côté et on se laisse prendre avec plaisir dans la toile des intrigues. Avec un style simple et fluide, on découvre avec stupeur comment ce héros tranquille reconnaît une fausse pièce de monnaie rien que par le toucher, comment il enregistre toutes les odeurs, tous les parfums... Peu d'action, peu de suspens, ce livre s'adresse aux amateurs de romans policiers, fascinés par la déduction.