Dracula, Vlad Tepes

Dracula, Vlad Tepes

Pascal Croci a connu le succès avec son album de mémoire Auschwitz qui a obtenu le Prix jeunesse de l’Assemblée nationale. Longtemps, il a dessiné dans la presse religieuse avant de se consacrer à une bande dessinée plus personnelle et gothique avec les albums Gloriande de Thémines et Lady Tara Cornwall tous deux parus aux éditions Emmanuel Proust.

Françoise-Sylvie Pauly qui a co-écrit le scénario est l’auteur d’un roman publié par Denoël dans la collection Lunes d’Encre, L’Invité de Dracula qui donne une suite au célèbre roman de Bram Stoker.

« Bram Stoker – Seriez-vous superstitieux, mon cher ?
L’archiviste – En théorie, non. Je n’accorde aucune foi à ces choses-là, Monsieur ! Cependant, j’ai mené ma propre enquête… »

Hiver 18888, Stoker s’entretient avec un archiviste du British Museum. Il lui confie différents articles de journaux qui évoquent une ombre errant dans un cimetière de Munich. Ce ne sont pas là les documents les plus rares, il a en sa possession le testament de la princesse Cneajna, l’épouse légitime de Vlad Tepes rédigé en 1462. S’ouvre alors au lecteur l’âme de celle qui partagea la vie du cruel Prince de Valachie que l’on surnomma à juste titre Dracula.

Un album que tout amateur du mythe de Dracula se doit de posséder

Cela faisait longtemps que les amateurs du trait écorché de Pascal Croci se demandaient quand naîtrait sous ses pinceaux un album inspiré du mythe de Dracula, ses histoires aux ambiances gothiques, hommages non dissimulés aux récits fantastiques du XIXème ayant déjà convaincu. Qui d’autre qu’une amatrice du roman de Stoker, si passionnée qu’elle lui donna même une suite, aurait pu l’épauler pour construire cette biographie imaginaire du cruel Prince de Valachie ?

Avec un art consommé de la mise en scène et une fascination pour le personnage, les deux auteurs proposent de revenir aux sources du mythe de manière singulière. Vlad Tepes est ici vu à travers le regard de son épouse. Jouant sans cesse entre véracité historique (les noms de lieux comme le château de Poïnari ou les actes barbares commis par le prince) et fantasmes d’écrivain (la présence d’une étrange peintre aux côtés de Tepes), les auteurs perdent le lecteur dans un fantastique ténébreux et glacial. Le modèle dont s’inspira Bram Stoker n’a jamais été aussi cruel et sanguinaire et son frère Mircéa, jamais aussi présent. Les dialogues parfois grandiloquents ne brisent pourtant pas l’illusion romanesque et dramatisent admirablement bien le propos.

Les planches aux couleurs froides, où la neige omniprésente et glacée est le reflet du cœur sans pitié de Tepes, de Croci paralyseront le lecteur. Son trait écorché et incisif qui dessine les personnages, et qui ne serait rien sans les décors torturés à l’habillage gothique, se gravera dans les souvenirs du lecteur impressionné. Un album indispensable à n’en pas douter.