Le Sang des Boyards
Patrick Weber est un touche-à-tout. Journaliste, romancier, chroniqueur, scénariste... Mais c'est surtout un historien de l'art, attaché à sa Belgique et à son Roi. Ses romans et ses scénarios tournent donc souvent autour des passions de l'auteur : l'art, l'histoire et la monarchie. Il collabore pour sa série NOVIKOV avec le dessinateur italien Bruno Brindisi. Le sang des Boyards est le second tome de cette série et clôt la première enquête d'Alexis Novikov.
Une fin d'enquête parmi les alcôves de Saint-Petersbourg...
Saint-Petersbourg est en émoi. Une série de meurtres affecte des membres haut placés de l'aristocratie. Sur la piste du principal suspect nommé Troublekine, le « Fou de Dieu », Novikov va naviguer parmi les nobles, particulièrement les dames qui parfois ne semblent pas insensibles à son charme viril et à son uniforme. Le policier est aussi à la recherche de l'assassin de sa femme, qui pourrait bien être Troublekine lui-même. Aidé par une courtisane splendide mais au jeu trouble, le policier va peut à peu dénouer les fils de ces meurtres. Entre progressistes révolutionnaires, boyards rêvant du passé glorieux, prédicateur intégriste et jolies dames, l'enquête va avancer parmi les morts qui construisent un piste menant aux coupables. Une fois justice faite, il restera un goût amer tandis que les remous de l'affaire disparaissent derrière les impératifs de la Cour et des apparences.
Un roman historique dans lequel l'enquête n'est pas seulement un prétexte.
Au travers des aventures de son policier, Patrick Weber cherche, évidemment, à nous montrer la vie de l'aristocratie russe dans cette période trouble, avant que le pays ne bascule dans la révolution et ne détruise toutes les merveilles que les nobles avaient bâties. En cela, l'album est une réussite. Les dessins bien renseignés et fouillés de Bruno Brindisi mettent en valeur fastes des fêtes, palais, lustres et surtout toilettes des Dames. Précis, clairs, détaillés parfois à la limite de l'excès, chaque case est une fenêtre ouverte sur une monarchie régnante et absolue qui vivait dans le luxe. C'est aussi, à d'autres moments, une peinture sans fards des rues de la cité et de ses habitants qui vivent hors des palais.
La piège pour le scénariste, dans ce genre d'exercice, est de se contenter d'aligner une histoire plate et sans intérêt, calquée sur une véritable enquête de l'époque ou une légende plus ou moins connue. Patrick Weber ne tombe pas dans cette trappe. Son héros, manipulé par des manipulateurs parfois eux-mêmes manipulés par d'autres acteurs, court et se démène pour résoudre l'intrigue. Il fait des erreurs, accepte des compromis pour parvenir à arrêter les coupables avant que la tuerie ne soit trop importante. Avec lui, nous suivons les pistes des palais jusqu'aux forêts russes, croyons tenir le coupable qui se dérobe tandis que de nouvelles routes s'ouvrent à l'histoire.
La seule faiblesse du scénario est ce filigrane que veut imposer l'auteur, cette recherche de la vérité sur la mort de la femme de Novikov. Etrangement, tout le monde semble savoir quelque chose sur le meurtre, mis à part Novikov. En fait, cette enquête derrière l'enquête sert plus à permettre des pressions sur le héros que comme moteur de l'histoire. C'est dommage et un peu frustrant, surtout au vu du peu d'information récoltées à la fin de l'album. Cette recherche fait artificiel dans une histoire qui n'en avait pas besoin pour tenir la route.
Les deux tomes de cette enquête : Le Fou de Dieu et Le Sang des Boyards sont à lire à la suite l'un de l'autre et forment un tout qui se suffit.