Solstice d’Hiver
Enrico a seize ans. C’est un gamin tout ce qu’il y a de plus normal, élevé par sa mère, amateur de jeux vidéos, paranoïaque avec les filles (enfin, une en particulier) et qui attend Noël avec impatience. Enfin, pas tout à fait Noël, parce que dans sa famille, on le fête le 21 Décembre, jour du solstice d’hiver. Une tradition comme il y en a beaucoup chez les Roseflamme, sa famille, qui apparaît un peu décalée. En fait, comme Enrico va s’en apercevoir, elle n'est pas qu’un peu décalée, mais franchement : sa mère est une fée. Elle vit d'ailleurs à moitié dans un monde irréel où il va devoir entrer les armes à la main et les pieds dans le plat.
Trop classique ?
Il s’agit d’une histoire initiatique, et il est difficile d’être original dans ce genre de récits. On ne peut d’ailleurs pas vraiment le reprocher à Felicioni ; le parcours initial du héros (auquel il fait d’ailleurs référence régulièrement) fait partie de ces histoires primordiales qui, tant que l’auteur s’applique à varier les lieux et les enjeux, restent toujours intéressantes. Ici, l’histoire va d’une grande ville italienne et son vieux ghetto (touche plaisante) à un palais de fées, en passant par un lycée parfaitement banal. Les personnages sont un peu minces, mais cela aussi, c’est normal pour un parcours initiatique, où c’est au cours du voyage que le héros acquerra ses caractéristiques principales. Bref, le genre de choses qu’il est difficile de vraiment rater, et Magna Veritas s’en sort honorablement.
Trop contemporain ?
Graphiquement, il s’agit d’une copie de manga, dans ce genre un peu caricatural qui réussit beaucoup en ce moment. Une version plus professionnelle de ce que votre voisin de classe dessinait au lycée. Même pour les monstres, on peut facilement trouver l’original dans les mangas animés célèbres. C’est parfaitement contemporain et parfaitement oubliable. Et c’est dommage, parce que c’est quand Camagni s’affranchit des codes du manga qu’il devient intéressant. Par exemple au sein des fées, certains des personnages, qu’on n’aperçoit que chacun dans une case, présentent une vision vraiment originale et dérangeante. On se prend à vouloir que le dessinateur se mette à voler de ses propres ailes, qu’il trouve un style à lui, que clairement il est capable de trouver, mais qui est encore pour le moment enfoui sous les conventions habituelles.
Affaire à suivre
Solstice d’Hiver n’est pas un mauvais album de BD. Il se lit agréablement, réserve des surprises, accroche l’oeil. Mais ce n’est pas non plus un grand album. Il ne se donne pas de difficultés, et donc on peut craindre que pas grand-chose ne le démarque des autres dizaines de productions semblables fournies par les éditeurs. Pourtant, le scénario comme le dessin contiennent les germes de quelque chose de plus original, de quelque chose qui pourrait rester dans les esprits plus longtemps que ne le fait à l’heure actuelle ce tome 1. Reste à savoir si la série pourra concrétiser son potentiel, ou restera un modèle oubliable parmi d’autres.