L’Affaire Sylvak
Il y a des bandes dessinées complexes, pleines d’auto-références, qui trahissent un certain âge. Et puis il y en a d’autres, plus directes, plus fraîches, dont on pourrait dire qu’elles sont plus jeunes, même si elles ne visent pas forcément la jeunesse. Les Arcanes du Midi-Minuit sont dans cette première catégorie. Gaudin, le scénariste, a maintenant pas mal roulé sa bosse, tout en restant principalement dans l’écurie Soleil, qui privilégie les scénarios fluides et simples. Trichet, par contre, peut être considéré comme un dessinateur débutant, vu qu’il s’agit de sa première série. Mais elle en est au cinquième tome, ce qui n’est pas si courant dans la bande dessinée moderne, et l’on sent que les deux auteurs commencent à être bien à l’aise avec leur sujet.
Jim et Jenna
Sujet pourtant difficile, car il tourne autour de deux personnages principaux à la relation, disons... complexe. Ils se connaissent, et ils s’apprécient, ils sont même cousin-cousine. Mais ils ne peuvent pas se rencontrer. Quand l’un est présent, l’autre disparaît, et vice-versa. Ceci par l’entremise d’une mystérieuse horloge et d’une “malédiction” familiale. Jim et Jenna enquêtent donc tour à tour, apportant des forces et des faiblesses différentes à leurs aventures, et ce n’est que sur les couvertures des albums que le lecteur peut les voir ensemble.
Ils évoluent dans un monde à mi-chemin entre le steampunk et le fantastique “féerique” cher aux victoriens anciens, avec un petit côté Buffy pour l’aspect “têtes de monstres interchangeables”. Jim fait partie des services secrets du Roi, il manie le pistolet et la technologie de la vapeur, tandis que Jenna tient une horlogerie. Tous deux ont une relation ambiguë avec la police locale, et doivent régulièrement faire des entorses à la loi.
Cela devient encore plus gênant quand l’enquête commence à toucher les services secrets eux-mêmes. D’abord un ancien ministre assassiné, puis une série d’attentats. Ce qui est encore plus gênant, c’est que ces crimes semblent le fait de forces paranormales, d’un contrôle magnétique sur les objets qui n’est pas sans rappeler celui que les services secrets avaient tenté de maîtriser des années plus tôt au travers du grand prestidigitateur Sylvak...
Dans les détails
Comme je le disais, cela fait cinq tomes que la série tourne, et cinq tomes, c’est long pour expliquer une seule histoire entre deux personnages. A juste titre, donc, l’album rend plutôt hommage aux personnages secondaires, qui vont du très bon (le commandeur de la garde royale) au modérément nouveau (la psychokinésiste avec un faible pour Jenna). Il faut chercher les détails pour trouver les aspects vraiment marrants de l’album. Le problème, c’est que la série a un style qui ne se prête pas à beaucoup de détails. C’est donc à un exercice d’équilibre assez heureux que se livrent les auteurs dans L’Affaire Sylvak : garder le côté frais et fluide de la série tout en parsemant assez de détails annexes pour se renouveler.