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La Jungle de glace

Butch Guice (Dessinateur), Philippe Thirault (Scénariste), Mike Perkins (Coloriste)
Aux éditions : 
Date de parution : 31/10/06  -  BD
ISBN : 2731618124
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Virginie   - le 31/10/2017

La Jungle de glace

Avec La Jungle de Glace, second tome de la série Mandalay, Philippe Thirault et Jackson « Butch » Guice nous proposent une seconde collaboration. Le voyage dans le temps, thématique chère à Philippe Thirault, se poursuit en plein exotisme birman.

Soldats contre zombies

Février 1941, soit neuf mois après le terrible incendie qui clôturait Les Miroirs de l’Ombre, le premier tome de Mandalay. Rien ne va plus en Birmanie centrale, et la rationalité semble capituler devant une succession d’événements plus étranges les uns que les autres. Le tome s’ouvre sur les terreurs nocturnes de la fille d’un marchand d’art occidental, persuadée d’être observée et menacée par un démon… Parallèlement, les troupes du pouvoir colonial se trouvent aux prises avec des rebelles aux pouvoirs maléfiques : les soldats ne sont plus que l’ombre d’eux–mêmes. La lutte va s’intensifier, déroulant des événements toujours plus violents et inquiétants.

Plongée dans l’horreur

Au fur et à mesure que la guerre évolue, les phénomènes fantastiques se font plus noirs et plus nombreux, soutenus par ce qui devient une esthétique de la terreur : on note une succession de gros plans sur des visages aux traits terrifiés, tout droit sortis d’un cauchemar. Le trait de Butch Guice oscille entre un contour propre typique de la BD franco-belge et une sorte de déliquescence lorsqu’il s’agit de représenter les guerriers rentrant du combat ou s’y dirigeant. Progressivement ils semblent perdre forme humaine pour ressembler à une armée d’ombres dépossédée de toute force vitale. Cette dégénérescence des corps était préparée par la succession de visages terrifiés au début du tome : les gros plans donnaient à voir une répartition de la lumière faisant la part belle à l’ombre, de plus en plus présente.

Une multiplicité d’actions déroutante

Après un premier tome consacré, conformément aux règles narratives, à la mise en place de l’intrigue et des relations entre les personnages, le second met l’action en valeur. Les rebondissements sont rois, mais leur multiplication peut parfois perturber la compréhension littérale, obligeant à quelques relectures de planches pour pouvoir poursuivre plus avant. Paradoxalement, on s’ennuie un peu à la lecture de ce deuxième tome, certainement en raison d’une approche parfois un peu trop caricaturale : les méchants sont vraiment très méchants et inversement. Les auteurs laissent place à bien peu de nuance, n’hésitant pas non plus à forcer le trait : le méchant marchand d’art occidental est bien sûr raciste - « Tu ferais mieux de mesurer tes paroles, espèce de babouin » dit-il à son chauffeur birman - , mais il est aussi macho, exigeant d’un ton péremptoire que son dîner soit servi à temps, etc, etc… De plus on est surpris de voir, malgré l’intensification de l’action, si peu d’évolution dans le caractère des personnages, à l’exception notable de celui du mage Leng qui dévoile au fur et à mesure une importante ambiguïté dans son rapport aux pouvoirs ancestraux des miroirs. Les autres semblent figés dans les rôles définis dans le premier tome, leur évolution est comme éclipsée par l’obsession des rebondissements.

Un récit engagé

Finalement, le plus intéressant dans cette série est le choix du basculement dans le fantastique pour raconter l’histoire de la guerre coloniale : la représentation des rebelles indépendantistes comme des créatures démoniaques est une dénonciation efficace de l’incompréhension de la culture birmane par les Occidentaux. Il semble être toujours d’actualité que lorsqu’un peuple entre dans une lutte de pouvoir avec un autre, il entre souvent dans un phénomène de diabolisation de l’ennemi, qui passe ici par le biais de pouvoirs maléfiques accordés au peuple birman.

Le bilan est donc mitigé à la lecture de ce second tome de Mandalay : si les problématiques posées sont toujours originales et intéressantes, le scénario, mêlant trop de rebondissements, pèse à la lecture et peut provoquer un certain ennui.

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