Le King
Rich Koslowski a travaillé depuis 1990 dans le domaine de l’animation et du comics en commençant comme encreur, puis en auto publiant
The 3 Geeks, qui remporta trois Eisner Awards, et dont est dérivée sa série
Geeksville (et qui, comme son titre l’indique, relate les aventures de trois geeks). Il a également plusieurs albums one shot à son actif, dont
Three Fingers (2002), situé dans un monde où les personnages de dessin animé vivent aux côtés des humains, comme des citoyens de seconde zone, et pour les enfants, il a illustré la série de Craig Ploetz sur les aventures de
Milo (1994). Il travaille en ce moment à une novella illustrée intitulée provisoirement
The List. Il maintient son propre site
web.
Seul The King (2005) a été traduit en français.
Le King est mort, vive le KingTout le monde s'accorde à dire que le King s'est suicidé le 16 août 1977. Les opinions divergent sur ce qui s'est passé ensuite. Pour un certain nombre de fidèles, il n'est pas vraiment parti, ou bien il est revenu d'entre les morts, et il ne se passe guère une année sans que l'un d'entre eux ne soit convaincu d'avoir assisté à une manifestation de la présence de leur dieu personnel. Témoignages qui font le bonheur d'un certain type de feuilles de chou américaines, entre un Nième reportage sur Bigfoot et le récit véridique de la manière dont votre voisine s'est faite kidnapper et tripatouiller par les extra-terrestres. Ces récits ont fait les heures de gloire de Paul Erfurt, journaliste raté qui aurait bien aimé avoir plus glorieux à son palmarès qu'un nombre record d'articles dans The Enquirer sur les apparitions posthumes d'Elvis Presley. Lorsque le prestigieux Time Magazine le recrute pour l'envoyer en reportage à Las Vegas, il voit là l'opportunité de rebondir et de se remettre du départ de sa femme. Même si le sujet du reportage est un mystérieux chanteur casqué, que certains prétendent être en fait le King...
Une variation réussie sur l'une des plus célèbres légendes urbaines américainesRichard Koslowski nous livre là une histoire douce-amère, un road movie sur la rédemption du journaliste, bien sûr, mais également celle de nombre de personnes que le chanteur casqué a touchées. Il parvient à entretenir le doute en alternant les indices sur les qualités messianiques et terre-à-terre du personnage, sa mégalomanie et ses côtés inquiétants en même temps que le renouveau et l'espoir véritables qu'il apporte autour de lui, en particulier dans son équipe de disciples (qui ont des relents fortement bibliques). Face à cela, il pose le contraste de l'enquête désabusée de Paul Erfurt, et parvient à tenir l'alternance de désespoir et d'humour jusqu'à ce qui, à la réflexion, est la seule fin adaptée. Le dessin sans détail, avec ses cases qui se répètent, et les nuances de bleu-gris, de blanc, et de noir d'Adam Wallenta, illustre brillamment les temps morts de cette errance vers la vérité où le but ne compte peut être pas autant que le cheminement de chacun. Un album attachant, original et réussi, sur un type de sujet où il est aussi délicat d’obtenir un équilibre entre le rire et le pathétique que de faire un article de fond sur le monstre du Loch Ness…