Fatale Mélodie
Pierre Fournier dit Makyo, débute dans les journaux Spirou et Pistil en 1978.
Il est à l'origine de la série Jérôme K. Jérôme Bloche (1985, Ed.Dupuis) et a conquis un large public avec Balade au bout du monde (aux éditions Glénat), une œuvre commencée en 1981 en trois cycles (1981-1988, 1992-1995, 1997-2000) et illustrée par trois dessinateurs : Vicomte, Herenguel puis Faure. Avec Prédictions, une histoire prévue en trois tomes, Makyo revient au thriller fantastique contemporain.
Au graphisme, pour le trait nous trouvons Massimo Rotundo, dessinateur italien, né en 1955 ; qui est également story-boarder et peintre ; auteur de la série Ex-Libris Eroticis (Ed. Albin Milchel). A la couleur, Emanuele Tenderini dessinateur et coloriste BD italien (Couleurs : Wondercity - Ed.Soleil-2006 / Dessin et L’œil de Jade – Ed. les Humanoïdes associés - 2006 )
Que fait-on lorsqu'on a plus que trente-neuf jours à vivre?
David, Gabriel et Marie sont frères et soeur, issus d’une famille de funambules. Avant chaque représentation, ils accompagnent à l’église leur mère qui a coutume de se recueillir. Au cours d’un spectacle, la mère de David et Gabriel, et leur sœur, Marie, trouvent la mort. De chagrin et de colère, David retourne alors à l’église détruire la statue de la Vierge de Notre-Dame-du-Sphinx, qui n’a pas su entendre les prières de sa mère.
Des années ont passé, David a renoncé à jouer les fils de l’air et a trouvé un certain réconfort dans la sculpture ; reconversion qui lui vaut les sarcasmes de son père.
Un jour qu’il rend visite à son épouse, internée pour schizophrénie, il croise Mélodie More, patiente dans le même établissement. C’est une solide et puissante femme, psychotique, qui semblerait-il possède le don de prédire aux gens la date exacte de leur mort. Celle de David arrivera le 23 Juin.
Ce dernier est troublé, bien qu’il ne croie pas à ce genre de superstition. Accompagné de la psychologue de sa femme, il va essayer de voir plus clair dans les prédictions de Mélodie.
Et si ce sombre présage était lié à la destruction de la Vierge, il y a dix-huit ans ?
Une intrigue palpitante...
L’introduction de l’histoire mise en place, et une fois faite la présentation du héros, Makyo nous plonge rapidement dans un polar penchant vers le surnaturel.
La galerie de personnages tous plus énigmatiques les uns les autres renforce l'ambiance pesante et le ton inquiétant de l'intrigue.
Au fil des pages, le lecteur s'enfonce dans une histoire sombre, avec une pointe d’ésotérisme. L'auteur sait ménager le suspense, jouer avec les choses qui perturbent, qui angoissent (la folie, la mythologie, les croyances…) Autant d’éléments, de symboles, qu’il a su distiller dans ce premier tome et qui laissent présager un inquiétant déroulement.
Parfois pourtant, la narration et le découpage peuvent sembler étranges, déroutants. Des ellipses (changement de lieu, changement d’époque) brutales et longues ne facilitent pas la compréhension du récit ; le lecteur est un peu baladé (au début de l'histoire on fait un bond de dix-huit ans dans le temps ; ou bien, sans aucune transition, on atterrit dans un hôpital psychiatrique).
Sur le plan graphique, c'est soigné, net et fin, avec des cadrages variés, offrant un visuel cohérent. Mais le trait de Rotundo peut paraître figé, dur. On aimera, ou pas, ce genre de dessin à la ligne clair et aux silhouettes des héros carrées et trop bien proportionnées. Les personnages n’ont pas toujours des postures naturelles, et font très statiques.
Les couleurs de Tenderini quant à elles, fonctionnent plutôt bien ; elles sont adaptées au ton du récit. Les passages sombres, où l'on se retrouve enfermé avec le personnage de Mélodie More sont très bien rendus ; oppressants de par les cadrages et la couleur, ils créent un réel malaise.
En bref…
Pour ma part, lorsque j’ai entamé la lecture, le graphisme -certes irréprochable- m’a un peu refroidie. Mais, une fois l’intrigue posée, je me suis laissée entraîner pour arriver à la fin de l’album, frustrée de ne pas avoir assez d’éléments pour mieux comprendre…
Un premier tome qui pose là une histoire mystérieuse ; et une collaboration Makyo / Rotundo efficace pour les amateurs du genre et du style.