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La Promesse des Loups

Dorothy Hearst ( Auteur), Marina Boraso (Traducteur)
Aux éditions : 
Date de parution : 02/10/08  -  Livre
ISBN : 9782226188571
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romain2   - le 27/09/2018

La Promesse des Loups

Le loup a changé. Dans le temps, il venait croquer les jolies filles en robe rouge. Ce n’est plus le cas maintenant, il est devenu gentil, comme en témoigne La promesse des Loups, premier tome d’une trilogie publiée chez Albin Michel. Dorothy Hearst a un passé d’éditrice d’ouvrages consacrés à l’écologie. Elle a passé deux ans à observer les loups dans le parc de Yellowstone et a reçu pour son ouvrage le blanc-seing des meilleurs scientifiques. Un tel pedigree nous promet donc une immersion dans la peau du loup.

Loup, y es tu ?

Et nous ne sommes pas déçus, de ce côté-là. Dans la tradition du Bildungsroman, ou roman initiatique, la narratrice est une jeune louve de sang-mêlé, Kaala, qui doit se faire accepter par la meute, dépasser les rivalités entre jeunes loups, et faire ses preuves. Malgré l’hostilité dont les adultes font preuve à son égard, elle se forge de solides amitiés et apprend à se débrouille dans la Grande Vallée. Cependant Kaala n’est pas seulement une louve éprouvant des difficultés d’intégration. Elle est également élue, eu égard à une prophétie, sauvée par les Grands Loups, représentants des mystérieux Anciens, parle avec des loups fantômes et une vieille chamane humaine. Car, au mépris des règles les plus sacrées, elle a développé une relation d’attraction/répulsion avec une petite fille humaine.

Anthropomorphisme, quand tu nous tiens…

Cette dimension plus « fantasy » s’appuie sur un substrat mythologique précolombien, et constitue le principal moteur de l’intrigue. Hélas, le rythme de construction de l’arrière-fond surnaturel est relativement mal maîtrisé. Les révélations fusent de partout, et une fois sur deux n’apportent rien à ce qu’on avait pu comprendre par soi-même, de sorte que le grand secret niché aux tréfonds de l’intrigue paraît assez vite éventé. D’autant que le loup ne semble digne d’intérêt que dans son rapport à l’homme. A l’image de Kaala, obsédée par l’humain, le roman tout entier semble parler surtout de l’homme de Cro-magnon, comme si Lupus n’était invoqué que pour parler d’Homo sapiens et de ses défauts.

Pesanteurs idéologiques

C’est que le roman, on le sent très vite, tourne autour d’une grave question : comment maintenir l’Equilibre, sorte de pacte entre les créatures du monde et les Dieux, et qui est bien sûr l’équilibre écologique menacé par l’homme. Ici, un ton pontifiant et doctoral, chaque occasion étant bonne pour faire une leçon de choses à la jeune Kaala. En revanche, pas de place pour une réflexion critique, par exemple sur la culture, l’histoire, qui différencient les hommes et les loups. La société humaine, la culture, l’histoire, l’outil, qui font de l’homme autre chose qu’un animal, sont à peine évoqués. Pour Mme Hearst, l’homme a le tort de sortir de sa niche écologique, de manger un peu trop et de brider la liberté lupine, tandis que quelque chose en lui désire tout de même le loup… Bref, l’homme détruit la nature tout en ayant besoin d’elle, et le loup, incarné par la sympathique Kaala, est là pour y remettre bon ordre par des moyens non-violents. Le regard de la narratrice aurait pu permettre une histoire fortement originale, marquée par une plongée dans la peau d’un animal fascinant. On se retrouve avec des discours écologiques bas de gamme, passe-partout, et très consensuels. En bref, si vous êtes fan de Danse avec les loups, vous apprécierez peut-être La Promesse des Loups. Si par contre vous vous intéressez à l’étrangeté du comportement animal, dans ce qu’il a de fondamentalement non-humain, vous ne la trouverez pas ici. Le loup de Mme Hearst, fasciné par l’homme, est un animal de zoo, même s’il ne s’en rend pas encore compte.

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