Le fils de nulle part
Sean Stewart est né en 1965. Il a débuté sa carrière en écrivant des romans classiques avant de progressivement s'orienter vers la fiction interactive. C'est ainsi qu'il a été scénariste pour le jeu en ligne The Beast. Son roman Cathy's book représente le point de rencontre entre ses deux carrières, au croisement du jeu interactif et du roman. Avec Le fils de nulle part, il s’attaque aux contes de fées pour mieux les détourner.
Un donjon maléfique
Depuis fort longtemps, les plus grands héros ont échoué à rompre le maléfice qui entoure le Bois des spectres, au cœur du royaume de Swangard. Jusqu’au jour où Mark Bouclier, un simple paysan en quête de gloire et d’aventures, vient réclamer la récompense promise pour avoir brisé le maléfice. Notre nouveau héros va cependant bien vite s’apercevoir qu’il est plus facile de briser des maléfices que d’affronter la Cour et ses intrigues.
L’auteur pose le récit sur la base suivante : que peut-il se passer après le traditionnel "...et ils vécurent heureux" des contes de fées ? Après un premier chapitre qui raconte comment le héros parvient à briser le maléfice, l’auteur s’attache à montrer que les exploits et les récompenses ont aussi leur revers, et accéder à un nouveau statut peut aussi amener de nouveaux problèmes.
Une histoire bien menée
Ces prémisses posées, et après un premier chapitre qui aurait pu faire une nouvelle intéressante, le roman reprend les figures traditionnelles de la fantasy, avec le motif de la quête et les rencontres qui émaillent le récit. Les entorses aux règles traditionnelles de ce type de récit sont rendues visibles avec la mise en scène de deux points de vue : la façon de se comporter considérée comme normale et celle adoptée par le héros et ses amis. Un héros qui s'aperçoit que l'univers de la Cour est bien différent de ce qu'il avait imaginé.
Si le récit est classique au final dans sa forme, on est pris au jeu et on prend plaisir à suivre les aventures de ce héros qui n’a rien de très chevaleresque et qui lutte pour garder son identité dans un monde de faux semblants où les intrigues foisonnent. Les personnages secondaires sont bien campés, aisément identifiables, et quelques excellents passages parsèment le récit. On a aussi un jeu intéressant sur le temps et le rapport au passé, et sur l’abandon de l’enfance (les contes de fées) pour la vie adulte (la réalité de la vie quotidienne).
On regrettera cependant les trop nombreuses coquilles qui viennent gâcher la lecture. Coquilles jusque sur le quatrième de couverture : le héros étant affublé du nom de Forgeron, alors que c’est Bouclier dans le corps du texte ! On passera sur plusieurs tournures de phrases maladroites, au point que parfois on ne sait plus trop qui parle... C'est dommage, d'autant que le roman est intéressant.
Il reste un récit agréable, qui prend le contrepied des romans de fantasy habituels : une histoire intéressante sur la différence et la difficulté de l’exprimer dans un monde régit par des codes et des règles strictes. Le tout dans un seul volume, ce qui n'est pas si fréquent en fantasy !