Jeunesse
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La Reine des Lumières

Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/10/09  -  Jeunesse
ISBN : 9782081230163
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jean   - le 27/09/2018

La Reine des Lumières

Xavier Mauméjean est professeur de philosophie, diplômé en sciences des religions. Il écrit depuis plusieurs années et nous a offert de beaux textes ( La Ligue des Héros, Les Mémoires de l’homme-éléphant, La Vénus Anatomique ... ). Il dirige aussi la collection Royaumes Perdus chez Mango. Il a une attirance pour le berceau de notre civilisation (en particulier dans Car je suis légion), qu'il prend encore ici comme décor de son aventure.

2000 ans après Alexandre

Lors de son périple en Asie, Alexandre le Grand n'a pas - comme dans notre histoire - coupé le nœud Gordien avec son épée. Au lieu de cela, il l'a défait. Ce qui a permis à la prophétie qui présidait l'union de l'Asie sous son aile de s'accomplir. Ainsi, une civilisation mêlant Grecs et Indiens s'est forgée et a guidé le monde en lieu et place de Rome et de la Chrétienté.
Deux millénaires plus tard, l'Empire est toujours fort, contrôlé par les descendants du conquérant. Mais après que l'empereur soit assassiné s'engage une guerre de succession entre son frère et sa fille. Si l'un dispose des troupes et de la puissance, l'autre, elle, dispose de son honnêteté et de plusieurs conseillers et protecteurs.
Parmi ceux-là se trouve Thomas Drake, qui n'est ni Indien ni Grec et qui pourtant, en conquérant le cœur de la princesse, prendra la tête de la rébellion et luttera jusqu'au bout contre le tyran qui veut épouser sa propre nièce pour mieux asseoir son pouvoir.

Un équilibre délicat

Mauméjean s'est lancé avec cet ouvrage dans un exercice d'équilibriste un peu périlleux. Il lui fallait bien évidemment raconter une aventure, épique si possible, avec comme moteur le courage et l'amour. C'est réussi.

Mais il s'agit aussi d'une uchronie, ce qui signifie un univers ayant dérivé du nôtre à partir d'un point du passé - ici l'histoire du nœud. Ce qui signifiait construire un monde cohérent qui soit unique et entier, mais nous offrons quand même des clins d'œil vers nous-mêmes, des références sous forme de rappels, de différences ou au contraire de similitudes. Il s'en tire bien, quoique son explication sur l'existence des marchés et de la place de Londres soit un peu discutable.

Mais aussi - et il s'agit là du vrai sujet de ce livre - il a fait diverger les religions. Or, dans notre monde gouverné presque exclusivement par les religions du livre, faire disparaître le christianisme et l'islam pour les remplacer par une évolution des croyances grecques et indiennes est loin d'être une évidence.

Ce qui est particulièrement délicat est de savoir doser les différents ingrédients. Une épopée guerrière sans contexte - à la Conan - ne mériterait pas d'être classée comme uchronie et une étude sur les dérives possibles des religions dans des contextes différents serait fort ennuyeuse.

Alors, est-ce réussi ? Pas complétement...

Si l'auteur a su créer un monde, il n'a pas su le faire vivre, progresser, exister de manière autonome. Mauméjan place l'aventure vers 1844 (dans notre temps) mais l'action aurait aussi bien pu se dérouler deux siècles ou un millénaire plus tôt. Mis à part deux ou trois détails techniques (la machine à vapeur et la poudre) le monde est grec, antique. Il ne s'est rien passé en deux millénaires !

Nous vivons certes avec les héros une superbe histoire grecque mythologique, mais qui a juste un vernis de modernité. C'est comme si l'imagination des hommes, leur génie pour découvrir - ou se tuer - avait été gommée par le geste d'Alexandre. Et c'est dommage, car l'Histoire sonne creux, alors qu'elle devrait être le fondement du livre. Ou sont les équivalents de l'Islam, du Calvinisme, de l'Inquisition ? Le monde, comme le lecteur, à été téléporté de deux mille ans sans subir d'altération.

Ce texte est loin de valoir La Rédemption de Christophe Colomb, mais il nous emporte dans des lieux étranges et particuliers. La Reine des Lumières réussit à intéresser le lecteur et à le plonger dans une mythologie teintée de modernisme sans trop l'assommer. Peut-être juste pas assez...
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