Estampes sur eaux troubles
Un premier recueil étonnant.
Marianne Lesage a publié depuis 2006 une dizaine de nouvelles dans divers revues, fanzines (Monk, Elegy, Mort Sûre, Eclats de Rêves) et anthologies ( Voyageur — Contes et légendes... revisités, Parchemins et Traverses, 2006).
Ce premier livre sous son seul nom regroupe neuf histoires, dont certaines sont inédites, comme Art is a Hammer ou La nuit, ma chambre est pleine de diables. Allant d'une dizaine à une vingtaine de pages, les nouvelles de Marianne Lesage nous entraînent rapidement au vif du sujet, nous enveloppant dans une atmosphère énigmatique et insolite, distillant un un suspense venimeux, feuillet après feuillet.
Des contes étranges.
Marianne Lesage s'est parfois amusée à nous retranscrire des histoires célèbres, après les avoir fait passer à travers le sombre filtre de son imaginaire...
Sans trop en dévoiler, on peut citer un « Belle au bois dormant» érotique, un «Barbe Bleue» d'un point de vue inédit, ainsi qu'un «Petit Chaperon Rouge» des plus noirs et des plus délicieux...
De même, une des nouvelles (à vous de trouver laquelle), peut faire penser au film «La Fin absolue du Monde» de John Carpenter (un des fameux «Master of Horror»).
L'ambiance lourde et chargée de mystère est sensiblement de même facture, les deux sujets étant la découverte d'un film maudit... Hommage ? Hasard ? Il n'en reste pas moins que les deux oeuvres sont remarquables et que les parallèles en sont nombreux...
Estampes sur eaux troubles...
Qu'est-ce qu'une estampe ? D'après un fameux dictionnaire, il s'agit d'une image à caractère artistique, imprimée, le plus souvent sur papier, par le moyen d'une matrice traitée en relief (gravure sur bois, sur linoléum), en creux (sur métal: taille-douce) ou à plat (lithographie, sérigraphie).
Il s'agit donc de tableaux, parfois monochromes (en noir), soit colorés pour la grande majorité. Chaque couleur devant être imprimée tour à tour sur le support, à l'exacte place qui lui est désignée, ce qui demande une dextérité impressionnante...
Mais dans notre imaginaire occidental, «estampe» fait le plus souvent référence aux estampes japonaises, importées et appréciées en Europe au XIXème siècle.
Ces tableaux (mis à part ceux inspirés par la nature), racontent une histoire, une tranche de vie ou une action quotidienne, sans fioriture, ni excès... Le maître-mot semble être simplement «naturel»...
Le titre de ce recueil me paraît donc être des plus judicieux car Marianne Lesage nous esquisse avec simplicité des histoires prenantes, aux atmosphères brumeuses, épaisses, voir inquiétantes... La plupart des personnages sont agis, subissent les évènements sans pouvoir changer ce qui se déroule devant eux, les marquants à jamais. Et les rares qui agissent, qui tentent de modifier le cours du temps et des choses... Malheur à eux.
Et il est bien difficile de savoir si ces histoires se terminent bien ou mal...
Tout n'est parfois qu'une question de point de vue...