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Le Chant des spectres

Tad Williams ( Auteur), Manchu (Illustrateur de couverture), Jean-Pierre Pugi (Traducteur)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/05/10  -  Livre
ISBN : 9782266197618
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fredcombo   - le 27/09/2018

Le Chant des spectres

Tad Williams, l'un des spécialistes incontestés des longues sagas de fantasy (L'Arcane des épées, Les Royaumes des marches) poursuit ici une octalogie de science fiction qui conjugue cybernétique et quête de l'immortalité. Le Chant des spectres s'adressera donc en priorité à ceux qui ont lu les livres précédents et souhaitent se replonger dans cet univers virtuel qu'ils avaient quitté après plus de trois mille pages de lecture. Les trente pages de résumé des volumes précédents que l'on trouve au début de ce septième tome seront néanmoins une aide appréciable pour ceux à qui la mémoire jouerait des tours, ainsi qu'aux intrépides qui auront décidé d'attaquer le monstre par sa pénultième incarnation.

Plus qu'un et c'est fini !

Les personnages poursuivent leurs errances au sein des univers virtuels d'Autremonde, à la recherche des causes du coma dans lequel sont plongés un certain nombre d'enfants à la suite d'une fréquentation un peu trop assidue du réseau... Reinie, Sam, !Xabu, qui se sont momentanément alliés à deux de leurs ennemis de la compagnie du Graal, Félix Jongleur et Ricardo Klement, s'apprêtent à descendre du sommet de la montagne sur lequel le dernier tome les avait laissés, alors que la qualité de la réalité virtuelle de cette partie d'Autremonde commence à décroître. Celui qu'ils nomment l'Autre, une intelligence artificielle faisant office de système d'exploitation et qui semble avoir créé ce secteur indépendant du projet Graal, est à présent contrôlé par John Terreur Wulgaru. Le psychopathe aborigène pourrait désormais être en mesure d'étendre considérablement son influence. Dans le monde réel, l'inspecteur Calliope Skourros continue son enquête sur celui-ci tandis que le major Sorensen et sa fille Christabel doivent fuir la base militaire dans laquelle ils vivaient et d'où ils ont aidé l'énigmatique M. Sellars à s'échapper...

Délicieux comme un carré de chocolat, écœurant comme trois tablettes entières...

Même s'il ne s'agit pas de l'un des chefs-d'œuvres impérissable de la science-fiction, il faut reconnaître que cette série parvient à maintenir un niveau d'intérêt constant. Il y a de l'action et le lecteur s'ennuie rarement, d'autant que l'auteur opère dans un spectre suffisamment large pour attirer dans ses filets un public des plus variés. Ses personnages vont de la fillette de cinq ans au vieillard, en passant par toutes les étapes intermédiaires. Les différents niveaux d'Autremonde permettent des incursions dans des univers aussi divers que le dessin animé, la mythologie antique, la fantasy, le tout étant ficelé dans un cadre cyber... Cette diversité pousse à la consommation selon le fameux principe de la tablette de chocolat : on savoure un carré, puis un autre, puis encore un autre, jusqu'à l'écœurement... et on jure qu'on ne recommencera plus, jusqu'à la fois suivante !

En lisant entre les lignes, on imagine Tad Williams vendant la mèche et plaidant coupable à travers ses personnages, comme lorsque l'un d'entre eux émet l'hypothèse qu'un démiurge a planifié leurs errances : « Bon, pour les occuper on va leur faire escalader une montagne haute de cent mille mètres ». Tad Williams semble lui-même parfois écrasé par la tâche titanesque qu'il est en train d'accomplir lorsqu'un autre personnage déclare, à la page suivante : « Si je ressors un jour d'ici, je ne remettrai plus jamais les pieds dans cet univers à la con ». Libre interprétation du texte, certes, mais... C'est le paradoxe de ces séries colossales dans lesquelles le nombre considérable de personnages permettrait de multiplier à l'envi les péripéties à la découverte desquelles l'auteur entraîne son public bon gré, mal gré. Les mânes de Charles Dickens et Michel Zévaco apprécieront...

C'est bon, mais c'est long...


Tad Williams possède un indiscutable savoir-faire et en dépit des quatre ans qui nous séparent de la sortie en poche du dernier tome, nous retrouvons dans Le Chant des spectres les personnages, comme si nous les avions laissés la veille. Peu importent les détails, un vague souvenir de l'intrigue suffit pour reprendre ce torrent de papier aux environs de la trois mille cent soixantième page sans pour autant perdre complètement pied. Tad Williams connaît son métier et manie avec une dextérité certaine les lieux virtuels tous radicalement différents les uns des autres, les rebondissements, les nombreux fils narratifs et toutes sortes de ficelles. Les personnages sont bien définis, ce qui est particulièrement appréciable étant donné leur nombre important. Du coup, on ne s'ennuie presque jamais et le temps file agréablement malgré l'épaisseur du pavé, ce temps si précieux et que l'on se sent finalement un peu coupable de dépenser avec la même prodigalité que celle dont nous faisons parfois preuve lors de soirées passées à zapper devant la télévision. Ce qui nous amène à une conclusion en forme de syllogisme :
Prémisse majeure : La vie peut être bonne, parfois, mais elle est trop courte.
Prémisse mineure : La série Autremonde est peut-être bonne, parfois, mais elle est trop longue.
Conclusion, au choix : C'est comme ça que naissent les addictions / On ne m'y reprendra plus / Courage, plus qu'un tome et c'est fini...

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