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D'Or et d'Emeraude

J-S. Rossbach (Illustrateur de couverture), Eric Holstein ( Auteur)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 28/02/11  -  Livre
ISBN : 9782354080945
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jean   - le 27/09/2018

D'Or et d'Emeraude

Éric Holstein a longtemps été un des piliers du site d'ActuSF, en plus d'être la voix d'une radio parisienne et d'écrire des nouvelles. Aujourd'hui, il se consacre surtout à l'écriture. Son premier roman, Petits Arrangements avec l'Éternité, est paru en 2009. Moins de deux ans plus tard, il récidive avec un roman uchronique et politique aux accents acides.

 

Réécrire l'histoire

 

Simon est français, mais d'adoption. Cela n'a jamais été un problème pour lui, jusqu'à ce que les petites remarques s'accumulant, il se décide enfin à visiter la Colombie, sa terre natale, à la recherche de ses racines. Appareil photo en bandoulière, il découvre un monde étrange, tellement différent de tout ce qu'il connaît, mais fort de la richesse de ses cultures mêlées.

Il y retrouve son père et de vieux amis de celui-ci. Les accompagnant lors d'une cérémonie rituelle, il se trouve projeté en 1537, alors que Quesada, à la tête d'une troupe espagnole, s'apprête à prendre possession de l'Altiplano. Fort des techniques de la guérilla moderne, aidé par celui qui l'a envoyé dans le temps, Simon va tenter de réécrire l'Histoire.

Pour le conquistador, au début sûr de lui, commence une descente aux enfers imprévue. Pourtant, son adversaire a des projets qui n'incluent pas la mort de tous les envahisseurs. Sa culture mélangée fait de lui un trait d'union, un levier pour soulever l'avenir. Mais jusqu'où pourra-t-il aller ? Peut-on changer le destin des peuples ?

 

Une écriture prenante, personnelle

 

L'auteur a sciemment séparé en trois parties son histoire, suivant la trajectoire de Simon et de l'avenir qu'il construit : avant son voyage, pendant sa nouvelle vie puis la Colombie alternative de notre époque. Chacune des portions est certes un peu longue, un peu lourde, mais l'écriture de Holstein, ses descriptions impressionnistes et ses personnages esquissés juste comme il le faut nous accrochent et nous tiennent.

Dans la première partie, celle qui comporte le moins de fiction, l'auteur nous dessine un portrait à l'eau-forte d'un pays de contrastes, de couleurs et de métissage que, situé à l'autre bout du monde, nous connaissons peu. Une agréable ballade dans Bogota, ses lumières et ses ombres.

La seconde nous plonge dans l'aventure espagnole, la conquête de ces territoires riches en pierres précieuses et or, ces terres de l'Eldorado. Le parti-pris de suivre l'envahisseur Quesada et non le vrai héros, Simon, donne un accent étrange au roman, oscillant entre chroniques de guerre historique et fiction à peine dessinée dans l'ombre de l'avancée des cavaliers. Quoi qu'il en soit, nous sommes pris, suant et priant avec ces soldats perdus loin de leur terre chrétienne.

La troisième partie, elle, est carrément uchronique. Bacatà (Bogota), capitale d'un empire sud-américain en déclin, au bord de la banqueroute, est impressionnante. Ce qui l'est plus encore est le propos sous-jaçant de l'auteur, qui nous martèle cette inéluctabilité des destins, qui laisse planer l'idée que l'avenir est écrit. Même si ponctuellement, on peut en dévier la trajectoire. Une Amérique forte et imbue de l'argent qui coule de ses poches, une Europe vieillissante et incapable, une Russie perdue dans ses rêves... autant d'échos de notre présent qui résonnent et font fondre le rêve de Simon.

 

La force du roman est ici : mêler le rêve, la possibilité d'une option, d'un monde meilleur à peine entrevu, avec un regard pessimiste et désabusé sur notre culture et nos certitudes.

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