Clopinettes
Marcel Gotlib a commencé sa carrière de dessinateur dans la revue Vaillant en 1962 où il fait notamment apparaître Gai-Luron. Il collabore ensuite aux Dingodossiers avec Goscinny dans Pilote puis fait cavalier seul pour sa Rubrique-à-brac. Gotlib écrit également le scénario de nombreuses histoires pour ses amis et collègues dessinateurs comme les Cinémastock avec Alexis. Clopinettes est issu de sa collaboration avec Nikita Mandryka, qu’il a rencontré à la revue Vaillant.
Nikita Mandryka a d’abord fait des études de cinéma, puis choisit de faire carrière en bande dessinée. Il publie dans Vaillant puis Pilote Les Aventures du Concombre masqué. Il fonde en 1972-1973, avec Gotlib et Claire Brétécher, L’Echo des Savanes, qu’il quitte en 1979. Il est successivement rédacteur en chef de Charlie Mensuel puis de Pilote en 1983.
Une rafale de blagues
Dargaud réédite pour notre bonheur à tous l’intégral des Clopinettes, reprenant les planches parues dans Pilote entre 1970 et 1973, plus 33 pages inédites.
Les histoires sont courtes (entre 1 et 8 pages) et se présentent sous diverses formes : fables express, rébus, anecdotes, démonstrations farfelues et récits « historiques » comme « L’Attaque à Sohaint ». Les auteurs vont même jusqu’à se représenter avec leur collègue Brétécher.
Du 72ème degré
Tout au long de l’album, on rit de l’humour bien décapé des deux maîtres. On ne peut s’empêcher de pouffer aux belles moralités de la fin de chaque histoire : jeux de mots vaseux et absurdes, l’humour est ici poussé à son extrême limite, mais on apprécie toujours cette audace. Clopinettes est le reflet des esprits illuminés et excentriques de Gotlib et Mandryka.
Dans sa version augmentée, l’album est à lire par petits morceaux pour ne pas faire une indigestion de fables burlesques : les 96 pages de gags ne se lisent pas forcément d’une traite.
Les dessins caricaturaux et colorés ne sont pas démodés, bien au contraire, ils traduisent graphiquement la folie et le délire des « fables ». On oublie enfin pour un moment de se prendre au sérieux.
Dargaud fait plaisir aux fans en rééditant cet album, mais une contextualisation aurait été bienvenue. On ne peut se contenter de publier en 2011 le travail commun réalisé au début des années 1970 par deux pontifes de la bande dessinée, sans resituer la vie et la carrière des auteurs par rapport au milieu artistique de l’époque. La dédicace de Gotlib à sa fille de 3 ans encore présente dans l’édition de 2011 est certes touchante, mais paraît presque incongrue. Ce n’aurait pas été une façon d’enterrer les auteurs que de permettre au lecteur actuel de mieux découvrir une des œuvres de deux piliers de la bande dessinée franco-belge.