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Les deux du balcon

Francis Masse ( Auteur), Nicole Masse (Coloriste)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/08/11  -  BD
ISBN : 9782723477659
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Lavadou   - le 31/10/2017

Les deux du balcon

Francis Masse fut un auteur majeur de la bande dessinée dans les années 70-80. Tout d'abord réalisateur de dessins animés, il commence à publier des histoires courtes au début des années 70, dans des revues phares telles que Fluide Glacial ou Métal Hurlant. Ces histoires seront reprises ensuite en albums, par exemple On m'appelle l'avalanche (Les Humanoïdes Associés, 1983), Les deux du balcon (Casterman, 1985) ou La Mare aux pirates (Casterman, 1987). À partir de 1987, il met de côté la bande dessinée pour se consacrer à la peinture. Depuis 2007, certains de ses albums sont réédités. Les deux du balcon ressort ainsi chez Glénat 26 ans après sa première parution.
 
La science au balcon
 
Sur un balcon qui surplombe la ville, deux hurluberlus, Diderert et d'Alembot, devisent jour et nuit sur des sujets divers et variés. Invariablement, la discussion tourne à une leçon scientifique que Diderert assène à d'Alembot. Ce dernier, à l'esprit terre à terre et hermétique aux mystères de la science, interprète toujours les propos de son compagnon avec un pragmatisme mêlé d'ignorance. Ce dont Diderert ne cesse de se moquer, occasionnant de multiples chamailleries.
 
Ainsi, les deux compères aborderont, avec un sens de l'absurde inégalable, des théories aussi sérieuses que la mécanique quantique, l'évolution ou l'origine de l'univers, mais aussi l'amour, le rêve ou l'effet papillon.
 
Une fantaisie scientifique
 
Masse est connu pour son humour noir et absurde. Les deux du balcon prouve que cette réputation n'est pas usurpée ! Si les exposés scientifiques de Diderert restituent des théories réelles parfois très complexes et tirées des travaux d'éminents scientifiques, la mise en images de ces théories fait la part belle à la fantaisie la plus débridée, créant un contraste plaisant et amusant. Les décors ou les personnages qui illustrent ces spéculations défient les lois d'une physique qu'ils sont pourtant censés incarner. En particulier, la ville qui accueille ces histoires ne cesse de surprendre : elle évolue au gré des délires de Masse, qui n'hésite pas par exemple à la pendre sur une corde à linge pour la faire sécher après une inondation ! La place carrelée sur laquelle donne le balcon devient une arène privilégiée pour le déroulement des événements observés et commentés par Diderert, comme si cet espace où tout peut arriver était l'incarnation même de l'absurde.
 
Le dessin de Masse se prête admirablement à son imagination. Les bâtiments de la ville sont tracés avec un soin minutieux, donnant au décor des allures de gravures d'antan, un aspect très sérieux et ordonné. Mais cela n'empêche pas la fantaisie de s'exprimer à travers la mise en images des théories scientifiques expliquées par Masse. Le dessin rejoint le texte pour personnifier l'absurde avec un sens de l'humour et de l'à-propos qui fait mouche. Masse se permet même quelques petites mises en abîme, ses deux héros se sachant personnages de BD et jouant sur cette nature admise.
 
Un album trop statique
 
Malgré ces qualités indéniables, on a toutefois du mal à se laisser véritablement emporter par l'imagination de Masse. La faute à un texte extrêmement dense dans des bulles qui phagocytent l'image. Les concepts scientifiques soulevés par l'auteur sont desservis par cette profusion de mots, un propos souvent trop technique qui manque son objectif de vulgarisation. S'il n'y avait l'humour omniprésent, on s'ennuierait vite à lire ces tartines d'explications théoriques.
 
Mais le problème vient surtout d'une narration trop statique, au point que l'on en vient à s'interroger sur la nature de cet album. Peut-on réellement le qualifier de bande dessinée ? Le dessin n'est là que pour illustrer les histoires, et non pas les faire vivre. Témoin, ce balcon immobile que les deux héros ne quittent jamais et qui ne s'autorisera qu'un bref voyage de quelques pages. Les images sont belles, fantaisistes, drôles, mais elles manquent de dynamisme. Les deux du balcon s'apparente plus à une galerie de tableaux qu'à un récit graphique.
 
Les passionnés d'absurde seront donc séduits par l'art très abouti de la fantaisie de Masse, appliqué à un propos scientifique qui ravira les amateurs éclairés mais risque de rebuter les lecteurs moins savants. Si l'on reconnaît sans peine le talent de l'auteur, Les deux du balcon ne convainc pas totalement, de par son immobilité globale.

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