Dimension super-héros 2
Avec une seconde anthologie consacrée aux super-héros de l'univers d'Hexagon, la Rivière Blanche continue à développer une galaxie originale et qui, si elle poursuit l'expansion qualitative dans laquelle elle semble engagée, pourrait bien devenir incontournable d'ici quelques années. Issues de bandes dessinées franco-italiennes des années soixante-dix telles que Zembla, Mustang et autres Wampus, les aventures de quelques-uns des personnages les plus emblématiques de ces BD ont fait l'objet de récentes rééditions sous l'impulsion de Jean-Marc Lofficier. Modernisées, elles continuent de plus belle et après un premier tome de Dimension super-héros, nous voici aux prises avec un second volume dont nous ne pouvons qu'espérer qu'il ne sera pas le dernier...
On ne se pose pas de questions quand c'est l'heure de la baston !
Dans le monde des super-héros, il y a des figures imposées que respectent à la lettre les nouvelles de Dimension super-héros malgré leur spécificité européenne : ils gagnent (presque) toujours, sûrs de leur puissance ils bavardent et plaisantent pendant les bagarres, qui sont bien évidemment époustouflantes et menées à un train d'enfer. Le super-héros est fort, et cette force les pousse presque tous à faire preuve d'une réjouissante insolence. Peu importe qu'ils soient localisés à Gotham City ou à Lyon, dans un passé immémorial ou de nos jours, l'action prime et met au second plan toute autre considération. Dérivées de la bande dessinée, toutes les nouvelles en respectent les codes, ce qui donne à l'ensemble un aspect visuel, une écriture que l'on pourrait qualifier de graphique, rehaussée par les nombreuses illustrations placées au début de chaque texte. Une cape, un masque, et le tour est joué... Tout le côté théâtral et quelque peu grandiloquent des comics est respecté, comme dans certaines pages où les cases explosent pour laisser déborder l'action dans les marges de l'imagination du lecteur.
Autre fait notable : le super-héros se moque du Deus ex machina. Il l'utilise quand bon lui semble, sans pour autant se moquer du lecteur. Les super-héros pourraient même être considérés, en poussant le raisonnement plus loin, comme le Dieu lui-même dans cette machine littéraire qu'est une nouvelle, et il faut reconnaître que cela fonctionne plutôt bien. On y retrouve en abondance des concepts scientifiques un peu fumeux et aux noms ronflants mais toujours efficaces, comme dans les meilleures productions populaires des années soixante : rayon temporel, impulsions électromagnétiques, bombes à antimatière, siphons d'énergie pure et autres disques antigrav'.
Un univers à suivre... de très près
Le recueil est conséquent puisqu'il est composé de dix-neuf histoires dont la première pose un cadre dont ne sortiront quasiment pas les dix-huit nouvelles suivantes. Le mot d'ordre est : de l'aventure avant tout, avec de la bagarre, de l'humour, et même parfois une touche de poésie ou une pincée d'érotisme. Sur la totalité, seuls trois ou quatre textes se révèlent sans grand intérêt, sept sont d'un bon niveau si l'on accepte aveuglément les prémisses citées plus haut, sept autres nouvelles sont très plaisantes et les deux ou trois restantes sont de véritables petits joyaux. En revanche, même les moins intéressantes du lot montrent d'indéniables qualités d'écriture. Parmi les plus remarquables, citons seulement la nouvelle très métaphysique Le dieu incomplet de Romain Dhuissier et, tout aussi épatante, Valeurs, de Raphaël Lafarge, qui clôt le volume en beauté. Mais ce ne sont pas les seuls textes dignes d'être lus et nous ne pouvons que conseiller au lecteur potentiel d'explorer plus en détail ce second opus de la Dimension super-héros. Sous sa forme littéraire, l'univers d'Hexagon est constitué d'éléments très disparates et se trouve encore dans sa prime jeunesse. Les liens entre les différents personnages semblent souvent assez élastiques, mais peu importe... Le recueil reste d'une lecture plus qu'agréable, avec en prime de très bonnes, voire d'excellentes surprises. Une opération à encourager avec enthousiasme !