La loi du sang

Frère du scénariste Xavier Dorison, Guillaume Dorison qui publie sous le pseudo d’Izu, a travaillé un moment dans l’univers du jeu vidéo aussi bien comme créateur que rédacteur en chef d’un magazine. Chez les Humanoïdes associés il lance la collection « Shogun ». Il est aux scénarii des adaptations des jeux vidéo Lost planet, et Devil May Cry. Il est aussi au scénario de l’excellent Omega Complex, et de Crusades. Dans Le cycle de Nibiru Izu met tout son talent pour offrir un scénario original et complexe qui ravira les adeptes du genre. 

 

Cet album est mis en dessin par Mathieu Moreau, un jeune dessinateur limougeaud freelance. Le premier tome du cycle de Nibiru est sa première BD, et sa première association avec Izu.

 

 

Nous sommes en 5612 après JC, et depuis pas loin de 3 millénaires un virus a infecté la Terre entière, et les conséquences sont terribles : les humains souffrent d’une anémie particulièrement sévère nécessitant, pour rester en vie, d’être transfusé très régulièrement. Après des années de chaos et de barbarie terribles, un semblant d’ordre s’est instauré grâce à l’Empire qui a instauré une loi, la Loi du Sang, qui permet à tous de se voir offrir une dose de sang égale. 

 

Mais c’était sans compter une secte dont les partisans vénèrent les Seigneurs du Sang, et qui offrent du sang à ces dieux pour, semble-t-il, sauver le monde d’une destruction annoncée par une prophétie légendaire. Alicia est la descendante d’une civilisation oubliée mais puissante, portant sur ses épaules les clés pour sauver l’humanité !

 

 

Le scénario se développe autour du sang, richesse inestimable et présente en chacun de nous. C’est bien cet élément qui rend l’intrigue très intéressante : chaque être humain est porteur de cette richesse tant convoitée, et devient alors une cible de choix à attaquer ! Les complots s’organisent et les agressions se multiplient. La vie dans l’Empire est particulièrement difficile, et les dirigeants doivent donc être prudents dans chaque décision à prendre. La présence d’une secte fait basculer la balance vers le chaos et l’intrigue gagne en ampleur : l’action se développe, la survie s’organise et les protagonistes se révèlent. Les personnages principaux sont intéressants et les trahisons, retournements de situation et non-dits permettent d’offrir au récit une profondeur et une complexité bienvenues. 

 

Le travail d’Izu est remarquable, aussi bien sur la construction des personnages que sur la construction autour de la notion du passé et de ses interactions avec le futur. La dualité entre le monde fantastique et le monde réel (comprenez à l’époque actuelle) est fascinante, grâce à une construction efficace et des flashbacks bien menés. Et c’est la protagoniste principale qui fait le lien entre ces deux mondes à travers des rêves qu’elle ne comprend ni ne maîtrise. En trame de fond, la menace de la chute de la planète Nibiru est à l’origine du stress et de la pesanteur ressentis aussi bien par les protagonistes que par le lecteur. La menace de la fin du monde n’est jamais très facile à supporter… 

 

Le tout est servi par un dessin vif et dynamique de Moreau. Non dénué d’influence du manga, son travail permet une lecture aisée et rapide. Le découpage des scènes reste classique mais efficace, et n’est pas déstabilisant pour le lecteur. La mise en couleur ne se démarque pas, mais reste agréable et bien réalisée. On pourra noter - et regretter - pour seul défaut une sensation de lourdeur lors de la première lecture, essentiellement par manque de place tant le projet d’Izu semble ambitieux. 

 

Izu et Moreau nous servent sur un plateau un diptyque particulièrement prometteur, dont le scénario est riche et complexe, servi par un dessin et une mise en couleur à sa hauteur. Une association de deux artistes qui semblent s’être bien trouvés !